Malgré l'opposition de son mari pianiste, Maurice, Jenny Lamour, petite chanteuse de music-hall qui a grand peine à trouver des engagements, accepte un rendez-vous à souper avec Brignon, vieil homme d'affaires qui doit lui procurer un rôle. Maurice, au courant du rendez-vous, se rend chez Brignon, mais il ne trouve plus qu'un cadavre. Affolé, il se réfugie chez une amie, Dora, photographe et lui raconte son histoire.
Dora a déjà reçu la visite de Jenny, venue lui avouer qu'elle avait assommé Brignon, devenu trop entreprenant. L'alibi que s'est fabriqué Maurice ne tient pas devant l'enquête de l'inspecteur Antoine et, malgré les mensonges de Jenny et Dora, le policier arrête Maurice.
La confession de Jenny est rejetée : Brignon a été tué par une balle de revolver. Finalement, l'inspecteur Antoine fait avouer un repris de justice, Paulo, entré dans la maison entre la venue de Jenny et celle de Maurice.
Film avec une certaine noirceur et relativement tragique : Brignon, pédophile fait photographier des jeunes filles nues par Dora, une des meilleures amies de Jenny. Celle-ci est amoureuse de Jenny Lamour. L'inspecteur Antoine est un ancien de la coloniale dont il a ramené un fils qu'il a placé en pension et qui est le seul être qu'il aime. Un temps attiré par Dora, il sait qu'il n'a aucune chance.
Jenny est d'extraction modeste et reproche à l'inspecteur d'inquiéter les pauvres gens alors que l'assassinat de Brignon n'a fait que retirer un nuisible du sein de la société. Antoine admet qu'il nettoie les déchets de la société mais protège aussi les gens modestes des agissements des criminels. Clouzot ne bascule cependant pas dans sa noirceur habituelle qu'aurait pu constituer un suicide réussi de Maurice et la culpabilité de Jenny. Au lieu de cela, Paulo endosse le crime le couple se réconcilie. Si Dora veille sur Jenny Lamour, l'ambitieuse et sur Maurice son petit mari, c'est par amour pour Jenny. Tous les personnages sont d'ailleurs prêts à mentir pour sauver l'être qu'ils aiment.
Clouzot semble en prendre note à regret dans le commentaire final d'Antoine au commissaire : on croit que l'on va être sur une grande affaire de passion et tout se termine dans une misérable petite affaire... comme d'habitude.
Quelques moments notables de mise en scène, le célèbre plan du lait qui déborde, métaphore de la relation sexuelle entre Jenny et son mari et le moment où Antoine voit que les spectateurs professionnels au balcon du théâtre ont tous leur manteau et leur chapeau. Il en déduit que si Maurice l'a laissé au vestiaire, c'est pour que soit noté son heure d'arrivée et de départ.
Quelques bons mots aussi : "Qu'est-ce que tu veux, il a été mal élévé. C'est un fils de bourgeois : il voit le mal partout" et "On connait ça les amis d'enfance : ça commence avec les billes et puis ça finit dans les draps".
Jean-Luc Lacuve, le 17 mars 2015