Miami vice, deux flics à Miami

2006

(Miami vice). Avec : Colin Farrell (James 'Sonny' Crockett), Jamie Foxx (Ricardo 'Rico' Tubbs) Gong Li (Isabella), Naomie Harris (Trudy Joplin), Ciarán Hinds (Fujima, l'agent du FBI), Justin Theroux (Det. Larry Zito), Luis Tosar (Jesús Montoya), Barry Shabaka Henley (Lt. Martin Castillo), John Ortiz (José Yero), Elizabeth Rodriguez (Det. Gina Calabrese), Domenick Lombardozzi (Det. Stan Switek). 2h14.

Sonny Crockett et Ricardo Tubbs sont deux as de la police de Miami. Le premier est célibataire et dragueur ; le second s'est casé avec sa co-équipière Trudy. Un soir, alors qu'ils tentent de remonter une filière de prostituées, un ancien indic les appelle. Il les prévient d'une affaire qui va mal tourner. La copine de l'informateur est exécutée et l'indicateur désespéré se jette sous un camion. Au même moment, deux agents fédéraux sont écécutés alors qu'ils cherchaient à piéger une bande de faschos, trafiquants drogues et armes.

Une certitude : la fuite qui a permis ce massacre en règle provenait des sommets de la hiérarchie... Les deux inspecteurs découvrent rapidement que les tueurs étaient au service de la Fraternité Aryenne, organisation liée à un réseau de trafiquants internationaux doté d'un système de protection ultra-sophistiqué. Poursuivant leurs investigations, les deux partenaires prennent contact avec l'administratrice financière du cartel, Isabella, une sinocubaine aussi experte en investissements et transferts de fonds qu'en blanchiment d'argent....

La série télévisée opposait une réalité criminelle très dure à l'ambiance colorée, décontractée et ensoleillée de la Floride. Le film mondialise le crime et ne laisse aux héros que le fragile espoir d'un ailleurs hors du temps et de l'espace. La série policière s'est ainsi transformée en film d'espionnage où l'infiltration des criminels est aussi périlleuse que l'était naguère l'infiltration des communistes et où s'entremêlent et se confondent les éléments les plus hétérogènes.

Ce sont d'abord les juxtapositions des tailles des écrans sensés contrôler le monde (celui de surveillance pour piéger le proxénète, ceux de la boîte où s'exhibent les danseuses, ceux des ordinateurs et téléphones portables). Ce sont ensuite les frictions entre sphères de pouvoir : Police, FBI, CIA, narcotraficants qui permettent le cheminement du crime pour une résolution hypothétique. Le cheminement du crime démarre du plus simple, ou du plus archaïque : un réseau de prostitution, se prolonge en traque d'une bande d'assassins fascistes puis en démantèlement d'un réseau mondial de narco-traficants qui pourraient bien cacher un réseau de contre-espionnage impliquant les hautes sphères de l'état américain à l'origine des fuites. Ce dernier point n'est pas résolu et pèse comme une menace suspendue sur les vies de Sony et Isabella. Yero était en effet le spécialiste du contre-espionnage pour son patron, celui-ci bénéficiant de techniques de brouillages de téléphones réservés à la CIA. Il réussit à s'échapper de son domaine en Colombie et l'origine des fuites au sein du FBI ne sera pas trouvée.

C'est ensuite la perméabilité entre vie privée et vie publique. Après l'échange de regards entre Sony et Isabella lors de la première rencontre avec Jesús Montoya tout est dit sur l'amour qui les unit mais il ne pourront guère profiter de cet amour qu'en camouflant ce qu'ils sont, elle son enfance, lui son métier. Riccardo quant à lui vit avec sa coéquipière Trudy et seuls les courts instants d'une douche et d'une courte nuit échappent aux traques permanentes qui constituent leur vie.

C'est les interstices entre les tenions qui classiquement génèrent le plus d'émotion : les douches, la danse sous surveillance dans une boite, une rencontre brûlante dans un taxi et un adieu sur la plage.

Film d'espionnage efficace où, comme le note Cyril Neyrat dans les Cahiers du cinéma : "la confusion du monde s'accorde aux changements de texture et de couleur dominante due à la haute réactivité du numérique aux variations de la lumière naturelle."

Jean-Luc Lacuve le 28/09/2006