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Les gerbes de blé

1890

Les gerbes de blé
Sheaves of Wheat
Vincent Van Gogh, mi-juillet 1890
huile sur toile, 50.8 × 101.6 cm
Dallas, Tate Gallery

D'après son sujet, Les gerbes de Blé figure est parmi les dernièrs tableaux du groupe des format en double carré. La récolte du blé dans la région du Vexin, dans laquelle van Gogh a peint, a lieu de la mi-juillet à la fin juillet, et plus tôt cet été-là, van Gogh avait peint un champ de blé mûr sur le point d'être récolté, dans son célèbre Champ de blé aux corbeaux. Ce tableau semble avoir été réalisé dans le cadre d'une séquence de toiles détaillant la récolte de blé, commençant par Champ de blé sous un ciel nuageux progressant vers Champ de blé aux corbeaux, ces Gerbes de blé et concluant avec Champ avec des meules de foin .

Ce tableau, qui se rattache par son sujet aux champs de blé éclatants d'Arles et de Saint-Rémy, est ici traité d'une façon entièrement nouvelle par son cadrage resserré un peu en surplomb, à la façon d'une nature morte. Dans cet espace bouché, étiré, sans horizon, Van Gogh anime rythmiquement sa composition par la répétition du motif, le jeu des diagonales croisées et l'opposition entre couleurs complémentaires: le jaune de la paille et le violet des ombres (devenu bleu par sa dégradation).

Le tableau concentre l'attentivement sur huit gerbes de blé vues de près. Plutôt que de regarder un champ lointain, comme c'est habituellement le cas dans les paysages de récolte, le spectateur est immergé dans le champ, se rapprochant du point de vue d'un ouvrier. Les gerbes elles-mêmes sont fraîchement coupées et dégagent probablement un parfum du blé mûr. Comme pour souligner cet élément de fécondité sensuelle, Van Gogh baigne l’œuvre d'une lumière jaune de fin de journée. Cet densité de jaune est soulignée par l'utilisation de la couleur opposée, une lavande intense pour les ombres et pour la terre du champ.

Les gerbes de Van Gogh donne l'impression d'un portrait de groupe ou de famille. Chaque botte de blé se plie differemment, répartissant son poids de manière individuelle ; chacune semble hocher la tête ou poser pour le peintre. Cette individualité contraste clairement avec la collectivité du champ de blé dont ils sont issus, et avec l'unité domestique qu'est la botte de foin (presque comme une miche de pain de campagne) qui les remplace.

Pissarro, qui avait vécu à Pontoise une décennie plus tôt et avait aidé à organiser le séjour de Van Gogh chez le Dr Gachet, avait peint ces champs pendant la récolte des céréales près de vingt ans auparavant. Daubigny, dont Van Gogh a peint deux fois la maison, en même temps et dans le même format que les « Gerbes de blé », avait travaillé dans ces champs avant sa mort en 1878. Le symbole universel de la récolte des céréales a séduit les peintres paysagistes du monde entier mais aucun artiste n'a jamais réalisé un « portrait de groupe » de gerbes de blé qui puisse égaler le dernier chef-d'œuvre de Van Gogh en intensité et en qualité.

Comme toutes les autres toiles double-carré, elle reste non signée. Aucune signature n'était nécessaire. Il est tentant de conclure que ces derniers tableaux ont été conçus comme un ensemble décoratif. Van Gogh aurait pu les destiner - ou certains d'entre eux - au salon ou à la salle à manger de son mécène et médecin, le Dr Gachet, comme la série de récoltes similaires de Pissarro datant de 1873-1874 avait décoré la salle à manger du grand collectionneur Achille Arosa. Malheureusement, Van Gogh est décédé avant de préciser leur objectif collectif et les toiles de cet ensemble ont été dispersées à travers le monde.

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