Lorange, ce fruit confondu avec la couleur si vive et si dense qui lui donne son nom, apparaît fréquemment dans la peinture de Matisse, à tel point quon put y voir lemblème de son art.
Cest précisément la Coupe doranges, peinte à Paris au printemps 1916, qui inspira à Apollinaire la célèbre formule : « Si lon devait comparer luvre dHenri Matisse à quelque chose, il faudrait choisir lorange. Comme elle, luvre dHenri Matisse est un fruit de lumière éclatante. »
Réduite à lessentiel, quelques lignes et des taches de couleurs, cette coupe devient ici une icône, un symbole sacré. Lorange peut être rendue par un aplat de couleur alors que la pomme, souvent préférée par Cézanne ou par Picasso, serait à ranger du côté du modelé, du tactile.
Il faut cependant résister à la tentation dopposer lorange de Matisse et les pommes exagérément palpables de Picasso, car dune uvre à lautre les valeurs de labstraction et de la figuration permutent. Et le traitement pictural des oranges (composées de plusieurs couches de couleur) est en fait moins abstrait que les pommes lissées et sphériques de Picasso.
(voir : confrontation avec Nature morte au pichet et aux pommes de Picasso).