(1477-1510)
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Renaissance |
Giorgione n'a vécu que 32 ans. Il était cependant l'un des peintres les plus célèbres à Venise, de son vivant. La plupart de ses tableaux ont été commandés par les premiers collectionneurs Il produit les premiers tableaux conçus et réalisés pour des commanditaires privés, qui sont aussi les premiers collectionneurs de peinture contemporaine. Leur contexte intellectuel est cependant aujourd'hui mal connu, ce qui rend ses tableaux souvent mystérieux.
Giorgione a innové dans sa pratique de peintre, modifiant son tableau au moment même où il peignait. Le dessin y était donc moins contraignant. Cette pratique s'est, rapidement, communiquée à tous les peintres vénitiens, les libérant de la contrainte du dessin qui assurait la gloire de Florence, et ouvrant la création à une plus grande spontanéité et à une plus grande recherche en matière de peinture. Giorgione introduit en effet de nouvelles possibilités avec une peinture opaque, très riche en pigments, et fondue insensiblement, comme un sfumato modulé dans la matière et par taches ou frottis du pinceau, sur une préparation sombre. Les dessins sous-jacents, qui apparaissent dans les radiographies des peintures, (ainsi dans La tempête) témoignent d'une première disposition des éléments du tableau. Ces dessins n'ont pas été systématiquement suivis par une mise en couleurs comme l'auraient fait ses contemporains. Bien au contraire, la peinture opaque lui permet de recomposer son projet initial, de suivre une évolution plus naturelle du tableau, de dessiner en peignant.
Les œuvres qui lui sont attribuées le sont bien rarement avec un consensus général et le catalogue raisonné établi en 1996 par Jaynie Anderson se limite à 24 tableaux à l'huile sur bois ou sur toile et deux dessins, l'un à l'encre brune et au lavis, l'autre à la sanguine.
Frise des arts libéraux et mécaniques | 1503 | Castelfranco Veneto |
Adoration des bergers | 1505 | Washington, National Gallery of Art |
Le Coucher du soleil (Il Tramonto) | 1506 | Londres, National Gallery |
La tempête | 1506 | Venise, Gallerie dell'Accademia |
La vieille | 1506 | Venise, Gallerie dell'Accademia |
Le concert | 1507 | Venise, Gallerie dell'Accademia |
Trois philosophes dans un paysage | 1509 | Vienne, musée d'histoire de l'art |
Vénus endormie | 1510 | Dresde, Gemäldegalerie |
Autoportrait | 1510 | Budapest, Musée des beaux-arts |
Autoportrait en David | 1510 | Brunswick, Herzog A. Ulrich Museum |
Ses dates de naissance et de mort ont été fournies par Giorgio Vasari dans Les Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes. La date de naissance, corrigée dans la seconde édition des Vies, serait 1478. Les peintres vénitiens parvenaient à maturité et s'établissaient à leur compte à l'âge de 18 ans. Vers 1495 ou 96, après avoir parfait son apprentissage dans l'atelier de Giovanni Bellini, il aurait donc réalisé ses premières peintures en toute autonomie. Il semble à Alessandro Ballarin, au regard des œuvres qu'il considère comme étant les premières de l'artiste, que celui-ci avait connaissance de la peinture du Pérugin, des gravures sur bois et sur cuivre de Dürer et des peintures « néogothiques » de Jérôme Bosch, car tous étaient à Venise en 1494-96. Le passage de Léonard de Vinci dans les premiers mois de 1500 aurait été tout aussi déterminant.
Au dire de Vasari, Giorgione était un homme courtois, épris de conversations élégantes et de musique. Il jouait des madrigaux sur son luth. Vasari le surnome Giorgione, grand Georges « pour son allure et sa grandeur d’âme ». Giorgione fréquentait en vénitie les milieux raffinés et cultivés, mais assez fermés, des Vendramin, Marcello, Venier, Contarini. Il est reconnu comme un artiste « engagé » dans le milieu de la philosophie néo-aristotélicienne professée à Venise et à Padoue.Sa maison natale de Castelfranco Veneto, transformée en musée depuis 1996, contient l'une des rares œuvres qui lui est attribuée avec certitude, La Frise des arts libéraux et mécaniques (1503)
Son accès aux plus célèbres commanditaires pourrait avoir été assuré par un protecteur comme Pietro Bembo, ou des Vénitiens très riches comme Taddeo Contarini ou Gabriele Vendramin. Fin octobre 1510, Isabelle d'Este, la plus ardente collectionneuse de l'Italie du Nord, écrivit à son agent vénitien pour lui demander d'acheter une Nativité de Giorgione, après le décès du peintre. Mais sa recherche ne put aboutir : le tableau, en deux versions, avait été commandé par deux autres collectionneurs vénitiens et ils ne souhaitaient pas s'en séparer.
À sa mort soudaine de la peste, il a probablement laissé quelques travaux non finis, qui ont pu avoir été terminés par ses élèves, Titien ou Sebastiano del Piombo.