Editeur : Carlotta-Films, octobre 2008. Nouveaux masters restaurés, versions originales, sous-titres français. 35 euros. Suppléments :
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Le Malin et Au-dessous du volcan sont tous deux des adaptations de romans importants de la littérature américaine. Le Malin est une adaptation de La sagesse dans le sang (Wise Blood) de la romancière catholique Flannery O’Connor. Au-dessous du volcan est l'adaptation du célèbre roman de Malcolm Lowry. Les très nombreux bonus (souvent passionnants avec une mention spéciale à Serge Chauvin pour sa brillante analyse de Au-dessous du Volcan) vont s'attacher à démontrer qu'il s'agit pourtant là d'oeuvres très personnelles de la part d'un cinéaste qui, de son premier à son dernier film, aura toujours été trés influencé par la littérature contemporaine.
Préfaces de Patrick Brion
Dans les fauteuils du Latina, Patrick Brion replace les deux oeuvres dans la carrière de John Huston et rappelle les 66 scénarios des 66 scénaristes qui se sont succédés avant que John Huston ne réalise Au-dessous du volcan.
Ciné Regards : Le Malin de John Huston (11 mn)
Extrait de l’émission Ciné Regards du 21 octobre 1979, un entretien entre John Huston et Michel Ciment, critique, animateur au sein de la revue Positif et producteur à France Culture. John Huston rappelle l'enjeu dramatique du Malin : un personnage en rébellion contre ce qui l'a attaqué pendant son enfance. Envoûté par l'idée du Christ en étant enfant, il en a souffert. Il essaie de se soigner, n'y arrive pas mais sombre pavillon haut.
Hazel, le révolté (19 mn) Christian Viviani
critique à Positif et Maître de conférences à l’Université Paris I - Sorbonne, Christian Viviani rappelle le goût de John Huston pour les personnages obstinés et hors normes dont fait partie Hazel Motes. Ce sont des aventuriers blasés, des Don Quichotte arqueboutés sur un principe bon ou mauvais, qui se conforment à une morale jusqu'au bout. Les adaptations de Huston sont fidèles aux romans. Dans le roman, Hazel revient probablement de la seconde guerre et retrouve l'Amérique profonde du sud. Huston place l'histoire dans l'Amérique contemporaine. Huston évoque pourtant l'Amérique des peintres régionalistes tel Grant Wood ou des photographes de la crise de 29 comme Dorothea Lange mais les personnages semblent collés dans une époque dans laquelle ils n'entrent pas.
Conversation avec John Huston (18 mn) Un entretien
audio d’époque
Un entretien audio d’époque - mis en images - entre le réalisateur John Huston et Michel Ciment, critique, animateur au sein de la revue Positif et producteur à France Culture.
Au-dessous du volcan : l’ivresse lucide (21 mn)
Serge Chauvin
John Huston a adapté de nombreux romans au cinéma. Son
premier film, Le faucon
maltais est tiré de Dashiell Hammet alors que son derniers
Gens de Dublin
est une adpatation de James Joyce. Il a également porté
à l'écran Stephen Crane pour La charge victorieuse,
Kipling pour L'homme
qui voulu être roi et des écrivains sudistes : Tennessee
Williams dans La nuit de l'iguane, Carson McCullers dans Reflet
dans un il d'or ou Flannery O'Connor dans Le
malin. Il a adapté ces deux monuments que sont Moby dick
de Herman Melville et La bible. Il a aussi collaboré avec
Truman Capote pour Plus fort que le diable et Arthur Miller pour Les
désaxés. John Huston avait même commandé
un scénario à Sartre pour Freud passion secrète.
Le roman de Malcolm Lowry est écrit sous forme d'un flux de conscience qui emprunte à la bible, à la tragédie grecque, à Dante et au théâtre élisabéthain. La narration est à la troisième personne mais la narration objective laisse la place à l'intériorité des personnages et en premier lieu au consul en proie à des souvenirs traumatiques et des hallucinations. Le film procède par soustraction avec un récit linéaire qui refuse le flash-back. Si le consul est hanté par le souvenir des prisonniers de guerre qu'il a laissé massacrer, il l'évoque à haute voix pour un tenancier de bar indiffèrent. On ne sait pas grand chose non plus de Yvonne, de sa carrière d'actrice. Le contraste n'en est que plus grand entre la femme que l'on voit à l'écran, prodigue mais amoureuse, et la faute passée que ne cesse de lui reprocher le consul. Le passé n'existe ici que dans la mesure où il hante le présent où les personnages le ressasse. Il n'y a pas non plus de voix off, ni narrative ni subjective. Pas plus qu'il n'y a de visions hallucinatoires dues au delirium tremens. Seuls le gros plan et le grand angle donnent une dimension monstrueuse à un cafard. Le roman de Lowry, divisé en douze chapitres, est entièrement construit sur la figure du cercle. Cette figure n'est pas marquante dans le film autrement que dans la scène initiale de la ronde des squelettes qui indique qu'il n'y a pas d'issue. Le consul louvoie mais avance. Huston éllimine le personnage de Laruelle, cinéaste français et ancien amant d'Yvonne. La touche d'expressionnisme qu'il apportait est remplacée par un extrait des Mains d'Orlac, classique hollywoodien du film d'horreur. Huston retrouve ainsi le classique triangle amoureux avec Hugh. Revalorisation du personange de Yvonne dont Huston recueille les réactions. Hugh et Yvonne sont ainsi des personnages moins périphériques que dans le roman La première version du roman date de 1938 et las seconde de 1944 sans que la guerre ait affecté le livre. Huston repolitise le film en faveur des républicains espagnols et contre le fascisme. D'où l'invention d'un personnage, l'attaché diplomatique allemand. Surtout, le traumatisme de la grande guerre n'est pas une faute indépassable mais le signe d'une catastrophe pire encore. Le jour des morts comme le proxénète nain, la vieille indienne jouant aux dominos avec son poulet, ou la présence d'Emilio Fernandez jouent la carte du folklore ou du pittoresque. C'est pour éviter la joliesse que Huston avait filmé le Mexique en noir et blanc. Ici, s'il y a du pittoresque, c'est parce que le pays ou les personnages eux-mêmes se donnent en spectacle. Les lunettes noires sont le signe de la douleur d'un homme brûlé
par sa lucidité. Il est Oedipe se crevant les yeux pour ne plus
voir sa faute. Le mythe est parodié avec le nom d'Oedipus, dans
le roman comme dans le film, donné à un chat. Le Consul est celui qui a vu l'horreur en face et doit en protéger le monde. L'ivresse est la marque et la condition d'une lucidité supérieure; l'alcoolisme une réaction contre le chaos, le mal, le silence de Dieu. Le consul se bat. Il rappelle le pasteur défroqué et alcoolique de La nuit de l'iguane ou le capitaine Achab de Moby dick, figures héroïquement blasphématoires ren évolte contre la création toute entière. c'est aussi ce que rappellent les allausion à Don Juan, Atlas ou William Blackstone, l'homme qui renia les puritains pour choisir les Indiens. Le jeu de la marelle, ludique ou cosmique, donne la triple dimension de sacrée, de parodie blasphématoire et de jeu enfantin. La fin du roman est naturaliste :" Quelqu'un balança un chien derrière lui au fond du ravin". Le meurtre du livre, perpétré par un seul homme, devient ici une mise à mort non dénuée d'héroïsme, confiée à un peloton d'exécution. Le consul mort finit par envahir l'écran au même titre que le volcan, vaincu mais grand comme un dieu . Notes sur Au-dessous du volcan (1984 – Couleurs
– 59 mn)
Evocation de Fugueroa chef opérateur de Dieu est mort de John Ford, de La nuit de l'iguane ou de Los olvidados de Bunel. Huston livre quelques trucs. Il conseille ainsi de ne pas commencer une scène par la série plan d'ensemble, plan moyen et gros plan mais de bien choisir son plan d'ouverture : tout le reste de la scène en découle naturellement.
J.-L. L. le 8/10/2008
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présente
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Le Malin
et Au-dessous
du volcan de John Huston
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