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Editeur : Carlotta-Films, novembre 2008. Nouveau master restauré, version originale, sous-titres français. 20 €. Suppléments :
Espagne, 1940 ; peu après la fin de la guerre civile. Un cinéma itinérant projette Frankenstein dans un petit village perdu du plateau castillan. Les enfants sont fascinés par le monstre et parmi eux, la petite Ana, 8 ans, se pose mille et une questions sur ce personnage terrifiant. Partageant leur solitude dans une grande maison, les deux surs sinventent un univers parallèle, partent explorer les alentours du village et découvrent une vieille maison abandonnée au pied dune colline, avoisinant un puits mystérieux |
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Réalisé en 1973 pendant les dernières années du régime de Franco mais situé à la fin de la guerre dEspagne, LEsprit de la ruche se déroule dans un pays marqué, vidé par la guerre civile, vampirisé par la dictature. Contre la tristesse du quotidien, deux petites filles partent à la recherche dun monstre imaginaire, partageant en secret un monde de chuchotements. Au sein dune maison fermée, dun temps figé qui sétire de façon interminable, Ana et Isabel souvrent en cachette à une exploration des mystères et des angoisses de lenfance. LEsprit de la ruche est le film qui fit connaître Víctor Erice, cinéaste rare et précieux, et surtout qui révéla Ana Torrent, petite fille inoubliable du cinéma espagnol, immortalisée en 1976 par Cria Cuervos de Carlos Saura. Ses grands yeux noirs et son regard inquiet ont marqué toute une génération de spectateurs qui, ayant découvert ces films au même âge que lhéroïne, ont grandi avec, gardant toujours un pied dans le monde de lenfance. Pour Víctor Erice : «Tout jaillit de cette scène primordiale : celle de la rencontre dune petite fille avec un monstre [la célèbre scène de Frankenstein], contemplée à son tour par un regard qui observe le monde pour la première fois. » Ce que Alain Bergala commente ainsi : « Erice met en scène la « première » spectatrice, le « premier » film, sous le signe de la peur, de la sidération. C'est par l'enfant qu'on voit le film et le monde. » LEsprit de la ruche souvre comme un conte de fées (« Il était une fois ») et se place dans une réalisme merveilleux. Il est aussi bien un film pour enfants, exploration sensible et magique du monde, quun symbole caché des ravages laissés par la guerre. Ses multiples niveaux de lecture en font une source inépuisable de fantasmes et de mystères, un chef-duvre envoûtant porté par le jeu de ses actrices et la beauté des images photographiées par le chef-opérateur Luis Cuadrado, lequel était à lépoque en train de perdre la vue.
CONTRECHAMP SUR VICTOR ERICE (31mn)
Victor Erice savait ne pas avoir les moyens financiers de réaliser un Frankenstein hollywoodien ou un Frankenstein expressionniste allemand. Il se satisfait très bien d'avoir mené à bien un Frankenstein espagnol, un Frankenstein des pauvres. Il affirme l'importance de l'ellipse dans son film, se refusant à dire si, oui ou non, le personnage que découvre Anna est un maquisard. De même, on ne sait pas à qui écrivent les filles. Le titre, L'esprit de la ruche, vient du livre de Maurice Maeterlinck, La vie des abeilles qui désigne cet être supérieur, mystérieux et extraordinaire auquel les abeilles semblent obéir. Anna a conscience du monde au travers d'un élément traumatique ayant rapport à la mort. Le cinéma est la révélation que l'on peut tuer, elle voit cela d'abord au cinéma et ensuite dans la réalité. Victor Erice parle aussi de sa rencontre avec Ana Torrent...que l'on retrouve dans le documentaire suivant.. LES EMPREINTES D'UN ESPRIT (1998-Couleurs et N&B-48
mn)
De retour sur les lieux du tournage de L'Esprit de la ruche, à Hoyuelos à l'ouest de la province de Ségovie, Victor Erice, le producteur Elias Querejeta, le scénariste Angel Fernandez-Santos et Ana Torrent racontent la genèse et la construction d'une oeuvre devenue incontournable dans le cinéma contestataire de l'Espagne franquiste.
J.-L. L. le 19/11/2008
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présente
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L'esprit
de la ruche de Victor Erice
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