"Comment est-il mort ?" "Dévoré par un requin dans une cabine téléphonique." C'est en ces termes que le chef des Services Secrets apprend la mort d'un de ses agents. Pour débrouiller cette stupéfiante affaire, un nom s'impose, celui de Bob Saint-Clair que la rumeur publique a baptisé "le plus célèbre agent secret du monde". Alors, Bob saute dans un avion vers l'Amérique du Sud où l'attend, à l'aéroport, sa ravissante collègue Tatiana. Mais Karpof, l'ignoble chef du contre espionnage albanais a découvert leur trace et, machiavélique, les attire dans son repaire.
Là, enchaînés, à la merci de leur tortionnaire, Bob et Tatiana vont subir les pires sévices... dont François Merlin, le jeune écrivain qui raconte cette incroyable histoire, ne connaît pas encore tous les détails. Certes, François ressemble physiquement au héros de ses romans qu'il écrit à la chaîne dans son modeste appartement de célibataire. Mais il est loin d'en avoir le panache ! D'abord, il n'a rien d'un aventurier.
Quant aux protagonistes de sa vie quotidienne, ils ne sont ni espions ni femmes fatales. À commencer par Mme Berger, sa bonne, gentille mais bavarde intarissable. Ou encore un plombier farfelu autant que fatigué; ou son éditeur, Charon, qui lui refuse une avance sur son prochain livre alors qu'il gagne des fortunes avec les livres de Merlin.
Christine c'est autre chose. Elle ressemble à Tatiana, bien qu'elle ne soit qu'étudiante. Elle lui emprunte ses livres, les lit, les aime, l'admire et François en est tout transformé. Et c'est pourquoi son imagination en fait la compagne du héros qu'il n'est pas en réalité. Et c'est pourquoi Tatiana et Bob Saint-Clair sortiront vainqueurs de leurs combats avec l'ignoble Karpof, qui n'est autre que Charon. De retour à la réalité, François découvrira que Christine l'aime vraiment, tel qu'il est.
Le parallèle entre vie réelle et fantasmes d'écrivain n'intervient qu'au bout de vingt minutes ce qui est beaucoup trop long vu l'ineptie des aventures de Bob Saint-Clair. Michel Hazanavicius pastichera avec génie la séquence de la piscine dans OSS 117: Rio ne répond plus (2009). Ici le burlesque ne fonctionne que sur le principe du "trop" mais sans grande surprise ni invention.
Laborieux sont les séquences de combat ou le sketch des traducteurs successifs (albanais, russe, ukrainien, tchèque et français) pour recueillir les paroles du mourant. Trop systématiques enfin cette façon de vaguement corriger dans la fiction les gêneurs de la vie quotidienne (plombier, électricien, gendarme, ou éditeur). Le seul gag un peu vif est l'assemblée des lecteurs du métro lisant un polar de Merlin "le pigeon maltais". Les jeux de mots à résonance littéraire sont ainsi un tantinet plus drôles que les petits malheurs de François Merlin qui n'intéressent guère. Il ne va pas de soi que Christine tombe amoureuse de lui pour un happy-end improbable... à l'image de cette poussive comédie.
Jean-Luc Lacuve le 29/08/2012