Carton initial : "Dans les années Soixante, la Guerre Froide entre l'Occident et le Bloc Communiste, a été menée à travers des actes d'espionnage, de déstabilisation et de terrorisme. Les pays neutres s'exposaient à une intervention militaire, les obligeant à s'aligner, comme ce fut le cas pour la Grèce avec le coup d'état de 1967 ou l'invasion de la Tchécoslovaquie par l'URSS en 1968. L'équilibre de l'Italie était menacé du fait de sa position stratégique entre l'Est et l'Ouest, au cur de la Méditerranée. C'était le membre de l'OTAN ayant le parti communiste le plus important. La Guerre froide est devenue particulièrement sournoise et violente durant l'année 1969."
Padoue, 1969. Dans une quincaillerie un homme commande 50 minuteurs pour machine à laver.
1. Un automne chaud
Manifestation à Milan pour le logement. Le commissaire Calabresi et sa femme enceinte décorent leur appartement. Calabresi, appelé sur les lieux de la manifestation, vient en aide au journaliste Nozza, pris à partie par la police puis constate la mort d'Antonio Annarumma, jeune agent de la sécurité publique, peut-être tué par les manifestants.
Le couple Calabresi, regarde le journal télévisé du soir où Guiseppe Saragat, président de l'Italie, en appelle au sursaut après le lâche assassinat d'Antonio Annarumma par les manifestants.
Aldo Moro, ministre des affaires étrangères, est reçu par le président Giuseppe Saragat qui déplore que même les journaux de droite rapportent qu'Antonio Annarumma est probablement mort suite à un accident entre deux jeeps. Moro avait portant prêché la prudence au président prêt à suivre la position d'extrême fermeté vis à vis de la gauche que lui conseille Nixon. Moro est plus conciliant et surtout pragmatique face au dogmatisme du président. Il lui rappelle l'aphorisme de Goethe : "L'incendie d'une usine c'est une tragédie. La ruine de la patrie, c'est seulement une phrase." il lui parait nécessaire de dialoguer avec les communistes qui rassemblent beaucoup d'électeurs
Cercle Ponte della Ghisolfa, Pinelli, cheminot anarcho-communsite exclut Pietro Valpreda qui a revendiqué des attentats qui mettent en danger des civils, des bombes dans les trains
Le commissaire Calabresi reçoit le jeune Rovelli ayant besoin d'une licence pour l'ouverture d'un bar et appartenant aux milieux anarchistes. Il lui demande d'infiltrer le cercle Ponte della Ghisolfa.
Le prince Junio Valerio Borghese, leader du front national néo-fasciste est acclamé par ses partisans de Venise. Au ministère de l'intérieur, bureau des affaires confidentielles, Federico Umberto d'Amato, chef des services secrets civils est informé que Pietro Valpreda, mis sous surveillance par le commissaire Calabresi, vient d'arriver à Rome.
Rome. Pietro Valpreda est devenu le chef du cercle anarchiste du 22 mars.
Calabresi rend visite à Pinelli pour savoir pourquoi il a exclu Valpreda et si Feltrinelli les finance.
Federico Umberto D'Amato envoie, Giannettini, journaliste d'extrême-droite, espionner le prince Borghese et les fascistes vénitiens dont Giovanni Ventura, éditeur néo-fasciste et l'avocat Franco Freda, membres d'Ordine Nuovo qui est à l'origine des attentats dans les trains dont les rouges sont accusés.
Milan université nationale. Giangiacomo Feltrinelli, éditeur communiste prêche la vigilance face au cout d'état de droite qu'il pressent. "La démocratie, c'est le fusil à l'épaule des ouvriers" dit-il citant Lénine. Pinelli n'approuve pas cet appel à la violence et sort de l'université où il est rejoint par Calabresi qui l'accompagne dans une librairie de Feltrinelli. Les deux hommes sympathisent : Pinelli offre à Calabresi l'Antologia di Spoon River et reçoit en retour un livre sur les exactions commises par les communistes.
Moro et un colonel de l'armée en qui il a confiance parlent de Giannettini qui prêche le coup d'état. Des cadres des carabiniers fréquentent régulièrement des réunions d'Ordine Nuovo et du Fronte Nazionale du prince Borghese.
Ippolito, un agent infiltré, annonce au téléphone que Valpreda part en voiture pour Milan avec un sac en cuir marron mou.
2. Les innocents.
Vendredi 12 décembre 1969 (jour de l'attentat), Paris, Moro, président tournant de la commission du Conseil de l'Europe, demande l'expulsion de la Grèce du Conseil de l'Europe pour être dirigée par une junte militaire qui ne respecte pas la démocratie.
Licia Pinelli reproche à son mari de défrayer Sottosanti de son déplacement depuis la Sicile afin de témoigner pour innocenter un communiste et son groupe. Pinelli va retirer de l'argent à la banque, son treizième mois, avec Sottosanti.
Un taxi dépose un homme qui porte un sac en cuir noir rigide sur la place Fontana. Il est 16h33 et l'homme entre dans La banque nationale de l'agriculture avec une sacoche noire qu'il abandonne sous une table. Le journaliste Nozza est dans un tramway. L'homme ressort de la banque et repart en taxi. Il est 16h37. La bombe explose.
Calabresi est appelé place Fontana. On pense alors qu'une chaudière a explosé faisant des morts. Nozza et Cerri voient immédiatement qu'il s'agit d'un attentat d'une rare sauvagerie. Le colonel informe Aldo Moro à Paris que l'attentat a fait quatorze morts immédiats, qu'une autre bombe n'a pas explosé à La banque commerciale, place de la scala alors que trois engins ont explosé à Rome dans une banque et à l'autel de la patrie sans faire de victimes. Le procureur Ugo Paolillo est sur place. Cerri explique l'odeur par un détonateur glycol dans la dynamite gélatine
Marianao Rumor, président du conseil italien réunit un cabinet restreint. Restivo, ministre de l'intérieur et le président de la république prêchent pour l'état d'exception, jamais mis en uvre depuis 45. Le ministre de La défense et le colonel sont plus prudents et réclament la présence d'Aldo Moro. Inquiétude car deux jours plus tard doit avoir lieu une grande manifestation de droite à Rome. Intervention télévisée de Rumor
Place Fontana, le commissaire a trouvé une affiche "Automne 69 que la lutte continue" qui pourrait signer un attentat anarchiste arrestations dans ces milieux. Pinelli, qui n'a pas de place dans le fourgon les accompagne en mobylette, et appelle sa femme pour la tenir informée.
Stefano delle Chiaie, chef d'avant garde nationale, va chez le prince Borghèse qui est furieux que le président du conseil n'ait pas déclaré l'état d'urgence. Borghese s'en prend à Delle Chiaie pour une boucherie à laquelle il 'adhère pas
Dans le bureau de Marcello Guida, préfet de police de Milan, Cerri explique des détails techniques de l'explosion dont une boite en métal de marque Juwel trouvée dans les deux banques de Milan. Est présent l'homme du Ministère de l'Intérieur qui parlait à D'Amato et qui demande de délocaliser l'enquête à Rome. Le préfet demande à Calabresi de faire parler les anarchistes. Rovelli ne sait rien et ne peut que nommer Pinelli. Calabresi est écarté et envoyé à Bâle faire parler un témoin.
3. L'enquête parallèle
Le colonel interroge divers acteurs. Le premier est Merlino, du groupe anarchiste
22 mars de Valpreda. Il dénonce Valpreda comme le spécialiste
des explosifs. Il était autrefois allé en Grèce et était
lié à des hommes de l'extrême droite dont Stefano delle
Chiaie. Puis témoignage de Ippolito Salvatore infiltré sous
le nom d'Andrea le génois. Interrogatoire de Delle Chiaie qui reconnait
des liens avec Merlino. Le colonel soupçonne le premier d'avoir poussé
le second à la violence favorable aux deux camps extrêmes.
Au commissariat de Milan, devant un panneau de photos, Pinelli explique
à un camarade que la section politique fait exprès de mélanger
les photos pour brouiller les cartes. Des hommes d'Ordine Nuovo figurent à
côté des anarchistes. Pinelli s'arrête sur celle d'un membre
d'Ordine Nuovo, Di Luia, ami de Delle Chiaie. L'autre lui signale qu'il a
vu cet homme avec Sottosanti à la gare à qui il a remis un paquet.
Pinelli est interrogé.
Ventura et Lorenzon discutent dans un bar. Le discours extrémiste de Ventura effraie Lorenzon.
4. la piste rouge
Calabresi, de retour de Suisse, apprend que le chauffeur de taxi, Rolandi,
a reconnu Valpreda, qui a été arrêté. Le témoignage
de Rolandi est fragile. le préfet lui fait miroiter la prime qu'il
va toucher si on arrête le coupable et il hésite à reconnaitre
Rolandi Valpreda sur la photographie. Calabresi demande pourquoi Valpreda
aurait pris un taxi pour un déplacement aussi court.
Les funérailles nationales des dix sept victimes sont retransmises à la télévision, Gemma Calabresi, enceinte, en est bouleversée tout comme Lorenzon.
5. L'interrogatoire
Au commissariat de Milan depuis 3 jours avec seulement 4 heures de sommeil, Pinelli est interrogé. Il n'avait pas avoué sa rencontre avec Sottosanti. Calabresi soupçonneux essaie de le déstabiliser. Le préfet et Alelgra son chef lui suggèrent de ruser en lui déclarant que Valpreda a avoué. Pour cette manipulation, Calabresi s'absente du bureau pour lire le faux télégramme de Rome où il est signalé que Valpreda a avoué. Mais un policier perd son sang-froid et Pinelli est retrouvé deux étage plus bas. Pour couvrir les policiers, le préfet affirme aux journalistes que Pinelli était sur le point d'avouer. Il est trois heures du matin.
Lors des funérailles de Pinelli, sa femme et sa mère tentent de faire front.
Le colonel fait son rapport à Moro. Il affirme que Merlino a rencontré Delle Chiaie peu avant et que le groupe anarchiste était totalement infiltré par l'extrême droite et les services secrets (Ippolito). Moro rappelle un coup d'état évité cinq ans plus tôt. Le président était Segni, Saragat et Moro l'ont menacé de l'accuser de haute trahison ce qui a été évité par la crise cardiaque de Segni. La femme de Pinelli va voir Paolillo, honnête procureur à qui on a retiré l'enquête. Moro prie.
6-La raison d'Etat
25 décembre. Moro tente en vain de convaincre Saragat de dire la
vérité pour éviter que se répande l'expression,
"massacre d'Etat ". Moro pense que les services secrets travaillent
à un cout d'Etat en infiltrant les anarchistes avec des extrémistes
de droite. Il tente de convaincre Saragat de ne pas accepter la voie autoritaire
et pour cela ne rendra pas publique sa contre-enquête
7 - La piste vénitienne
Préfecture de Trévise. Lorenzon, professeur conseiller municipal
chrétien démocrate, accuse Ventura, auteur des bombes dans le
train d'avoir voulu aller plus loin. Calogero le force à devenir l'indicateur
de la police. D'Amato, chef des services secrets civils italiens se méfie
du juge Calogero qui s'occupe de l'affaire. Calabresi se plaint d'être
accusé par Lotta Continua d'avoir tué Pinelli mais, très
peu soutenu par le préfet et Allegra, renonce au procès. L'enquête
de Trévise est dépaysée à Rome.
8-Dire la vérité.
'Milan, octobre 70. S'ouvre le procès voulu par la femme de Pinelli
où Calabresi, est accusé mais qui voudrait profiter du procès
pour être lavé des diffamations portées contre lui. Panesse
est désinvolte, le lieutenant Lograno intègre et la femme de
Pinelli n'accable pas Calabresi. Nozza dite à Calabresi que pour lui,
le coupable est Sottosanti. Calabresi lui rappelle qu'il a pourtant déjeuné
avec Pinelli et quitté Milan à 16h30.
Arcade, province de Trévise. Le juge instructeur Stiz n'est pas convaincu par les résultats de l'enquête de Calogero et hésite à refermer le dossier. il questionne Lorenzon qui commentera les enregistrements faits lors de l'enquête.
Dans son bureau Paolillo révèle à Calabresi que l'affiche
retrouvée près de Piazza Fontana, analysée à Paris
est une copie d'une affiche de mai 68, imprimée par une agence d'extrême
droite, Aginter Press, financée par les services secrets pour des états
fascistes. Les services secrets italiens disent pourtant qu'elle provient
des anarchistes italiens alors qu'elle est financée par des agitateurs
d'extrême droite. Guida et Allegra, les supérieurs de Calabresi
à la préfecture (Questura) savaient tout !
Calabresi chez Nozza, lequel lui révèle que les fausses accusations
d'entraînement aux USA fournies par la CIA, donc l'accusation d'être
un agent de la CIA, est une rumeur créée de toutes pièces
par le ministère.
9-Explosif
Stiz perquisitionne chez Ventura, on trouve le nom d'un explosif, Vitezit,
sur un document. Près de chez lui, 25 kg d'explosifs volés. De
plus, il aurait appelé un certain Guido. Ventura s'en prend à
Giannettini qui est le fameux Guido.
Stiz confronte Freda a un enregistrement où il et réclame les
50 minuteries
Stiz remonte à un fasciste qui lui montre des explosifs et avoue que
les attentats dans les trains d'avril et août 1969 n'étaient
pas des attentats d'extrême gauche mais fascistes. Il reconnait aussi
avoir vu les boitiers en métal Juwel qui ont servi aux attentats de
Milan chez Ventura. Freda et Ventura sont arrêtés.
10- Haute tension
Segrate, 14 mars 1972 : Feltrinelli retrouvé mort près de Milan,
brûlé après une explosion. Il avait fui mais était revenu
clandestinement en Italie. On a conclu qu'il était en train de préparer
un sabotage sur une ligne à haute tension. Calabresi reçoit
des menaces de mort.
Calabresi à San Michele del Carso (Gorizia) apprend que l'explosif
devait être du dinitrotoluène (TNT), que seuls les militaires
possèdent. Il provient donc d'une caserne, d'un trafic ou même
d'un arsenal secret dans un champ, endroit connu par l'OTAN, carabiniers,
services secrets. Même s'il n'y a pas d'invasion communiste, ces armes
avaient pour objectif de déstabiliser l'ordre établi.
Calabresi seul, a des visions de Pinelli. D'Amato vient le trouver pour lui proposer de venir à Rome. Calabresi lui propose sa propre version de l'attentat : deux bombes, une à la gélatine qui devait exploser après la fermeture de la banque, une autre TNT fasciste, déposée par quelqu'un qui se fait passer pour Valpreda en comptant sur le témoignage du taxi capital. Les responsables sont les amis de Freda. D'Amato propose une autre version, présentée comme une affabulation. Le sosie de Valpreda ne pose pas la deuxième, mais la première bombe. Cette première bombe convient à pas mal de gens même au sein des institutions italiennes où l'on souhaite rétablir l'ordre, en finir avec les grèves... Mais au niveau international certains veulent plus, une dictature. Ce sont ces gens qui commanditent la deuxième bombe.
calabresi est assassiné.
"Le massacre de la Piazza Fontana n'a pas de coupables. / Après 33 ans de procès, tous les inculpés ont été acquittés / En 1992 le parquet de Milan rouvre le dossier et inculpe Delfo Zorzi, Carlo Maria Maggi, Carlo Digilio, et autres néo-fascistes vénitiens / D'abord condamnés, ils sont acquittés en appel et en cassation / Freda et Ventura sont reconnus coupables, mais ne peuvent plus être jugés / Les familles des victimes sont tenues de payer les frais de justice / La préfecture n'a pas été tenue responsable de la mort de Pinelli. / Pour le meurtre de Calabresi, certains membres de Lotta Continua ont été condamnés dont Leonardo Marino. / Aldo Moro a été assassiné le 9 mai 1978 par les Brigades Rouges. / Pour la justice italienne, toutes ces affaires sont classées. "
Le film est dédié aux 17 victimes du massacre. Il est tiré du livre Il segreto di Piazza Fontana (Le Secret de piazza Fontana) du journaliste Paolo Cucchiarelli dont la thèse d'un double attentat est complétée par Tullio Giordana qui l'attribue à l'extrême droite. Mais toutes ces suppositions n'étant étayées par aucun élément de l'enquête, il a appelé son film "Romanzo" di una strage.
Le film se déroule sur 10 épisodes, chacun offrant une version de l'attentat. C'est ainsi l'anarcho-communiste Pietro Valpreda qui, lors du premier segment, semble en être le responsable. Pourtant le sac qu'il porte n'est pas du même modèle que celui que portera l'homme qui sort du taxi Piazza Fontana. Dans l'épisode deux le spectateur est persuadé que c'est Sottosanti qui, il est vrai, ressemble à Valpreda
Tullio Giordana fait intervenir tout le spectre politique de l'Italie et une part importante des ramifications des différents partis à Milan, Rome ou en vénitie. Son travail extrêmement documenté est un réquisitoire contre tous ceux qui jouent de la confusion pour prendre le pouvoir empêchent la justice et la nécessaire instruction de la police de trouver les coupables. Il s'agit dès lors d'un film politique puisque appelant à supprimer toutes les structures de l'appareil d'Etat qui empêchent la transparence.
Editeur : France Télévisions Distribution. Juillet 2013. VF ou VO avec sous-titres français. 15 € |
|
|
(Romanzo di una strage - Piazza Fontana: The Italian Conspiracy). Avec : Valerio Mastandrea (Luigi Calabresi), Pierfrancesco Favino (Giuseppe Pinelli), Michela Cescon (Licia Pinelli), Giorgio Colangeli ('Amato), Laura Chiatti (Gemma Calabresi), Fabrizio Gifuni (Aldo Moro), Omero Antonutti (Giuseppe Saragat), Luigi Lo Cascio (Giudice Paolillo), Thomas Trabacchi (Marco Nozza), Giorgio Marchesi (Franco Freda), Fausto Russo Alesi (Guido Giannettini), Denis Fasolo (Giovanni Ventura), Giulia Lazzarini (Le mère de Pinelli), Andreapietro Anselmi (Guido Lorenzon). 2h00.