Raging bull

1980

Genre : Biopic

D'après la biographie du boxeur Jack La Motta. Avec : Robert de Niro (Jake La Motta), Cathy Moriarty (Vickie La Motta), Joe Pesci (Joey La Motta). 2h09.

1964, New York. Jack La Motta prépare son entrée sur la scène d'un cabaret.

Il a bien changé depuis cette année 1941 où, à Cleveland, il mettait K. O. Jimmy Reeves... mais trop tard, car son adversaire, sauvé par le gong, était déclaré vainqueur aux points. La foule ne l'avait pas entendu ainsi et avait acclamé celui que l'on surnommait déjà, à 19 ans, le taureau du Bronx. Une bagarre générale autour du ring s'en était suivie.

Le lendemain, de retour dans le Bronx, Salvy, membre du milieu, tente de convaincre Joey, le frère et manager de Jack, d'amener celui-ci à collaborer avec Tommy Como, figure importante du milieu.... Jack a d'autres soucis: il se dispute sans cesse avec sa femme et se trouve des mains trop petites pour affronter le poids lourd, Joe Louis. Joey lui fait remarquer qu'il n'est que poids moyen.

Quelques jours plus tard, Jack rencontre Vickie, 15 ans, une jeune fille blonde autour de la piscine fréquentée par Salvy et ses amis. Il en tombe amoureux et cherche à la revoir. Vickie devient Mme La Motta.

Les combats se succèdent. Jack se place en candidat pour le titre, ce qui le conduit à se compromettre avec Tommy Como, figure importante du milieu.

Après une sombre affaire de combat truqué, qui entraîne sa suspension momentanée, Jake prend une éclatante revanche en battant Marcel Cerdan. Le Taureau du Bronx est le nouveau Champion du Monde.

Mais le déclin s'amorce; Jack devient de plus en plus jaloux et soupçonneux à l'égard de Vickie. Sur le ring, il perd son titre devant son adversaire de toujours : Sugar Ray Robinson.

1954, La Motta arrête la boxe, et ouvre une boîte de nuit, sans pour autant connaître la réussite. Vickie le quitte, il est emprisonné pour détournement de mineur. Puis, il monte sur scène... comme vedette de music hall, pour un show intitulé " A Night with Jake La Motta".

Hostile à la boxe, Scorsese a vu dans la vie de Jack La Motta l'une des histoires de rédemption qu'il affectionne.

Les combats sont magnifiquement filmés, non pas frontalement à l'extérieur des cordes mais selon différents axes pris à l'intérieur du ring. Ces filmages ont pris la moitié du temps de tournage. Le plus remarquable est probablement le plan séquence virtuose montrant l'entrée dans la salle de Jack La Motta pour son combat avec Marcel Cerdan qui lui permettra d'atteindre le titre mondial. Ces matchs de boxe sont souvent filmés en focalisation interne faisant ressortir le point de vu de Jack la Motta (axe de la caméra, déformation du son, lumière des flashes, point levé de Sugar Ray Robinson dans le dernier match contre lui). Scorsese s'autorise toutefois beaucoup de commentaires personnels (sang dégoulinant des cordes après ce même match).

Ainsi, même si Robert de Niro rend attachant le personnage, il n'est pas souhaitable de voir dans ce film l'apologie d'un champion que contrebalanceraient plus ou moins ses qualités et défauts d'homme. La structure répétitive du film (match, scène de dispute conjugale, scène de dispute avec le frère) et surtout la citation finale "Je ne sais pas si cet homme est un pêcheur. Ce que je sais, c'est que j'étais aveugle et que maintenant je vois", tirée de l'évangile selon saint Jean, suggèrent la dimension christique du parcours de La Motta. Celle-ci est redoublée par l'élégiaque intermezzo du Cavalleria rusticana de Pietro Mascagni, entendu des le générique et qui sera repris pour souligner la solitude de ce parcours de champion trop enfermé en lui-même pour être heureux.

Le film débute par un prologue situé en 1964, où La Motta fait son numéro de showbiz. Il nous renvoie ensuite par un flash-back en 1941 où La Motta perd un combat pour avoir été trop sûr de lui comme il est trop sûr de lui ensuite avec sa femme (scène du steak) et son frère (scène du coup de poing). Il n'écoute personne et croit à la seule justesse de ses combats. A l'exception de la très belle scène de séduction (piscine, voiture, mini-golf, appartement du père), le film renouvelle cette structure pendant sa longue première partie. En s'enfermant sur lui-même, La Motta devient proprement hystérique. Cette vie sur le fil du rasoir est insupportable et il finira meurtri sur les cordes d'un ring, meurtri dans son corps en prenant trente kilos, et meurtri dans sa vie de famille. Il lui faudra attendre d'être enfermé au fond d'un cachot avant de remonter vers une nouvelle vie où il accepte le rapport aux autres qui passe par le spectacle, une vie amoureuse apaisée et un pardon lucide pour son frère.