2006. Goran Duric est arrêté alors qu'il passait des vacances en famille aux Açores sous une fausse identité.
Trois ans plus tard, il comparaît devant le Tribunal Pénal International de La Haye pour crimes contre l'humanité car soupçonné d'avoir supervisé des opérations de nettoyage ethnique pendant la guerre civile yougoslave.
En charge de l'accusation, la procureure Hannah Maynard est sous haute pression : Goran Duric, ex-Général est en effet très populaire dans son pays et pourrait accéder à la présidence serbe. De plus on vient de lui refuser une promotion, accordée à son collègue masculin qui est désormais son chef. La première audience du procès est une catastrophe : Alen Hajdarevic, son unique témoin est convaincu de mensonge. Il n'a en effet pu assister au drame de purification ethnique depuis chez lui, caché qu'il était par un car. Jeune homme fébrile et hanté qui cherchait par tous les moyens à faire condamner Duric, Alen se suicide peu après la découverte de son mensonge.
La procureure Hannah Maynard part alors à la recherche de nouvelles preuves. Elle réalise alors que Mira, la sur d'Alen, en sait beaucoup plus sur l'accusé qu'elle ne veut bien l'avouer. Malgré les risques encourus pour sa vie rangée en Allemagne, Mira cède aux pressions d'Hannah et décide de témoigner.
Mais c'est là sans compter sur les rouages juridiques du Tribunal et autres collusions politiques auxquels elles se retrouvent bientôt toutes deux confrontées. Jusqu'à mettre à l'épreuve leur complicité.
Pur film de scénario, La révélation est un thriller politico judiciaire comme Costa Gavras en réalisait dans les années quatre-vingt. Goran Duric fait penser à Radovan Karadzic, l'ancien leader nationaliste accusé de génocide, caché pendant treize ans avant d'être finalement arrêté en juillet 2008... et dont le procès est sans cesse repoussé.
Sans valeur documentaire, bien loin des enjeux qu'il est sensé dénoncer, le film se contente d'enfoncer les portes ouvertes du poujadisme anti-institutions européennes et du consensuel devoir de mémoire. Le film se suit par ailleurs sans déplaisir grâce à d'excellents acteurs et à une mise en scène aussi bien huilée qu'impersonnelle.
Un film de scénario...
Le président de la Cour Pénale Internationale est présenté comme un esthète, préférant la peinture de Vermeer au triomphe de la justice. Il reçoit moins d'attention de la part de Hans Christian Schmid que le criminel contre l'humanité qu'est Goran Duric.
Dans un prologue, parfaitement convenu depuis les écrits d'Hannah Arendt sur le quotidien parfaitement banal que vivaient par ailleurs les criminels nazis, Goran Duric est présenté comme un bon père de famille, profitant de ses vacances avec ses enfants.
En revanche, le président est défini d'emblée comme borné. Son refus d'écouter le témoin sur un nouveau sujet est pourtant parfaitement admissible à la vue du fiasco de la première audition. Le tribunal se discrédite à allonger un procès indéfiniment. Ce qui aurait pu être dit simplement est sur-dramatisé par Schmid qui n'accorde aucune chance institutionnelle ou humaine au personnage pour en faire une caricature servant les intérêts de son scénario.
Il ne s'agit toutefois là que d'un nouveau ressort dramatique de ce film qui en use abondamment ainsi cette idée de scénario de discréditer le témoin au dernier moment, qui plus est, par une idée en chambre d'un car à l'axe de braquage insuffisant pour entrer dans la cour. Le film perd ainsi de longues minutes à cadrer de beaux plans, de belles cartes montrant axe de vision et rayon de braquage puis d'aussi longues et inutiles minutes à se déplacer pour voir le car faire la même chose que ce que le plan avait prévu. Belle métaphore du film qui ne fait qu'illustrer ce que le scénario avait prévu.
On est bien loin, avec ces petites idées rusées et fabriquées, des crimes contre l'humanité pour nettoyage ethnique pendant la guerre civile yougoslave. Pire même, on ne met en quête non pas d'un crime contre l'humanité mais d'un crime de guerre aussi tristement universel que bien trash, des femmes kidnappées pour servir de femmes à soldats dans un hôtel. Et, là aussi, le film n'affronte pas son sujet. La scène de la cave, où se sont commis des crimes atroces consiste... à nettoyer les murs à l'eau.
Heureusement Anamaria Marinca sauve cette partie par son témoignage face caméra. On regrette que le film ne se contente pas de l'écouter.
...réalisé en vase clos bien loin de la Serbie
Le film passe finalement le plus clair de son temps à dénoncer l'amertume et le carriérisme des fonctionnaires internationaux, la rigidité et de la pesanteur des procédures les tractations secrètes liées à des calculs géopolitiques complexes.
Et l'on n'apprend rien de la situation passée ou présente de la Serbie. Comment croire à cette dénonciation ahurissante, ex nihilo, que la Serbie est actuellement au mains de cinq hommes qui se sont enrichis dans les années de guerre et qui contrôlent toute l'économie et la politique du pays. Affirmation énoncée sans la moindre trace de preuve et qui sert, en fait, à ne pas montrer les coupables autrement que comme des apparitions fantomatiques..
Un film inutile et peut-être même nuisible dans l'opposition facile qu'il met en place entre devoir de mémoire porté seulement par les individus et l'incompétence des institutions européennes.
Jean-Luc Lacuve le 28/10/2010