Le Caire, début janvier 2011. Noredin, commandant de police, regarde sur sa télé vétuste l'un des interminable discours du président Hosni Moubarak. L'image est mauvaise car son antenne parabolique est défaillante. Il s'en plaint à son ami qui devait convoquer le réparateur. Noredin rejoint son collègue, Momo, dans leur voiture banalisée où, sillonnant les avenues commerçantes, ils alpaguent les commerçants qu'ils sont sensés protéger pour qu'ils leur remettent des enveloppes de billets. Certains s’excusent de ne pas pouvoir en donner, prétextant l'entrée des Chinois sur leur marché. Plus tard dans une salle de téléphonie, Momo explique à Noredin le fonctionnement de Facebook. Ce qui laisse celui-ci dubitatif sur la capacité de son jeune collègue à draguer des étrangères plus ou moins frivoles.
Noredin se plaint à son oncle, le général Kamal Mostafa, qui a la haute main sur le système de corruption généralisée à l’œuvre dans le quartier. Pourquoi a-t-il laissé les Chinois concurrencer les marchands qu'il protège ? Bonhomme, Kamal explique qu'il va en tirer de nouveaux profits et exhorte Noredin à se débrouiller avec sa part de territoire sans quoi il verra celui-ci réduit encore.
Le 15 janvier 2011, dix jours avant le début de la révolution égyptienne, Salwa, une immigrée soudanaise fait le ménage dans L'hôtel Hilton du Nil, place Tahrir. Elle entend les cris d'une dispute dans la chambre d'une jeune femme puis en sortir un homme d'affaires. Un peu plus tard après de nouveaux cris, elle en voit sortir un homme étrange aux yeux verts. Comprenant qu'elle risque sa vie pour avoir été là au mauvais moment, elle s'enferme dans une buanderie, juste à temps pour échapper aux recherches de l'homme mystérieux.
Noredin est appelé pour enquêter sur le meurtre qui vient d'avoir lieu dans cet hôtel. La victime est une très belle jeune femme dont le visage ne semble pas étranger à Momo. Noredin s'empresse de soutirer du sac de la victime un rouleau de billets et un reçu pour des photographies.
Lorsque Kamal arrive, celui-ci s'empresse de commander un repas sur la note de la victime. Il exhorte Noredin à la plus grande prudence sur cette enquête qui implique visiblement des gens hauts placés. Noredin accepte ainsi le peu d'informations que lui livre le gérant de l'hôtel qui lui remet aussi une belle somme d'argent pour son manque de curiosité. Il saura seulement que la femme de chambre qui a découvert le corps était une immigrée soudanaise payée à la journée.
Noredin et Momo s'en vont donc dans le quartier des immigrés soudanais et exige du chef de quartier, Clinton, qu'il retrouve la femme de ménage employée à l'Hôtel Hilton sans quoi ils ne lui redonneront pas ses papiers identités qu'ils confisquent.
Sur le chemin du retour, Noredin, remarque un panneau publicitaire géant sur lequel s'affiche le visage de la jeune femme morte de l'hôtel. Il s'agit du mannequin et chanteuse, Lallena. Noredin passe chez un marchand de disques à la sauvette et le rançonne du disque la chanteuse : L'amour ne suffit pas.
Dans la soirée, il passe chez le photographe et récupère les photos de Lallena. Il s'agit de photos intimes où elle y est en compagnie d'un homme d'affaires. Le lendemain sur le chemin du bureau il découvre son identité en voyant une affiche publicitaire géante ; c'est Hatem Shafiq, le grand entrepreneur immobilier qui a pour slogan "Nous bâtissons l’avenir du Caire".
Au bureau, une surprise l'attend : la célèbre chanteuse tunisienne, Gina, vient lui demander s'il a des nouvelles de son amie, Lallena. Il lui apprend qu'elle est morte.
Bientôt Noredin met à jour un chantage organisé par Nagy le tunisien qui employait Lallena et Gina. Clinton et une amie de Salwa sont tués. On tire sur Noredin qui se croit visé par Hatem Shafiq même s'il sait par Salwa que ce n'est pas l'assassin. L'homme aux yeux verts tente d’assassiner celle-ci mais c'est Salwa qui l'abat. Noredin interroge Kamal qui lui révèle que le chantage exercé par Nagy et ses deux prostituées a fini par gêner la sureté nationale qui s'est soudainement entiché de faire chanter le prometteur immobilier pour son propre compte. L'homme aux yeux verts, membre de la sureté nationale, normalement garde rapprochée de Moubarak, agissait ainsi pour son propre compte et a éliminé ceux qui veulent leur part du gâteau (Nagy, Clinton, Gilda). Hatem Shafiq a pu fuir avec son patrimoine et sa famille à l'étranger après avoir donné une rançon à la sureté et à la police.
Noredin voudrait tuer Kamal pour avoir laissé tuer Gina mais il n'y parvient pas. Armé d'un revolver, il manque de se ferait lyncher par la foule en colère qui s'avance en masse vers le palais présidentiel en clamant : "Liberté-Liberté."
Le film joue sur trois tableaux : son intrigue policière, l'inscription de celle-ci dans le cadre des derniers jours précédent la révolution égyptienne, le 25 janvier 2011, et la transformation du personnage du policier corrompu en chercheur obstiné de la vérité.
L'intrigue policière est suffisamment tortueuse pour que l'on en comprenne qu'à la fin que le chantage exercé par Nagy et ses deux prostitués a fini par gêner la sureté nationale qui s'est soudainement entichée de faire chanter le prometteur immobilier pour son propre compte. L'homme aux yeux verts, membre de la sureté nationale, normalement garde rapproché de Moubarak, agit ainsi pour son propre compte élimina ceux qui veulent leur part du gâteau (Nagy, Clinton, Gilda). Néanmoins, une fois que l'on sait cela, revoir le film perd beaucoup de son intérêt
L'inscription de l'intrigue dans le cadre des derniers jours de la révolution égyptienne est l'occasion de montrer l'arrivée d’internet et de Facebook, la corruption généralisée de la police et la soumission des hauts gradés aux ordres du pouvoir. Ce sont les officier de police qui tirent dans la foule le 25 janvier sous le regard consterné des policiers de base, le jour même du "Police Day" où, chaque année jusque là, l’Egypte célébrait ses forces de police. Le dossier de presse révèle que, pour cause de censure, les scènes de rue ont été tournées à Casablanca. Mais cela n'a que peu d'importance. La fin se veut délibérément positive : la foule refuse de lyncher Noredin, pourtant armé d’un pistolet, car les citoyens ne sont pas comme les officiers assassins. Cette même foule s’avance aux cris de liberté vers le siège d’un pouvoir quelle va renverser.
Le marécage idéologique qui précède la révolution explique en grande partie le basculement du personnage, hanté par le passé plus glorieux de son père qui lui reproche son manque de dignité. Le souvenir de sa femme, dont on apprend tardivement qu'elle est morte dans un accident de voiture, mais dont il regarde souvent la photo, est aussi celle d'un passé idéal révolu. L'affiche géante du visage de Lallena puis la réinterprétation a capella de L'amour ne suffit pas par Gina, suffisent alors à Noredin pour refuser de se soumettre comme d’habitude. Une simple visite Hatem Shafiq sur l’un de ses chantiers suffit à enrayer le système de la corruption à bout de souffle.
Jean-Luc Lacuve le 14/07/2017