Joyland

2022

Genre : Drame social

Cannes 2022 Avec : Ali Junejo (Haider), Alina Khan (Biba), Rasti Farooq (Mumtaz), Sarwat Gilani (Nucchi), Salmaan Peerzada (Le père), Sameer Sohail (Saleem), Sania Saeed (Fayyaz), Salmaan Peerzada (Rana Amanullah). 2h06.

A Lahore, cohabitent dans une maison familiale, un vieil homme de bientôt 70 ans en fauteuil roulant avec ses deux fils, Haider et Saleem, et leurs épouses respectives, Mumtaz et Nucchi. Celle-ci a déjà deux filles et se rend à l'hopital pour accoucher d'un troisieme enfant. Heider subit le mépris de son père et de son frère pour être sans travail et sans enfant. Au moment d'égorger la chèvre dont la viande sera distribuée aux voisin pour de fêter 'arrivée d'un nouvel enfant, il ne peut s'y résoudre et c'est sa femme qui tue l'animal.

Poussé par un ami, Haider accepte un entretien d’embauche dans un théâtre. Il se révèle qu'il doit être le sixième danseur d’une troupe qui se monte. Introverti et mal dans sa peau, il refuse mais tombe sous le charme de Biba, danseuse trans, sensuelle et magnétique, ambitieuse, qui a engagé cette troupe pour accompagner son numéro.
A la famille, Haider dit occuper un poste de gérant, révélant seulement à sa femme qu’il est danseur ce qu’elle accepte avec bienveillance et l'encourage à continuer. Pourtant Mumtaz s'est sacrifiée en renonçant à travailler pour s’occuper de la maison avec Nucchi, maintenant que Haider a un travail. Biba, sensible à la gentillesse de Haider et à son admiration, lui enseigne les pas de danse pour lesquels, à force de persévérance, il finit par se révéler assez bon. Elle lui confie aussi un soir la garde de on effigie publicitaire géante ce qui en manque pas de scandaliser els voisins aux alentours

Biba parvient péniblement à s’imposer auprès du directeur pour améliore le spectacle quelle propose d'ailleurs seulement lors de l'entracte. Au moment de la première avec les six danseurs une panne d'électricité met fin au spectacle de la vedette du théâtre. Haider se souvenant de ce que lui a raconté Mumtaz suite à la même panne dans son salon de coiffure, fait éclairer la scène par les téléphones des spectateurs. Avec des spectateurs aussi impliqués, le spectacle est un triomphe et Haider s'y donne à fond.

Haider délaisse de plus en plus la maison familiale au fur et à mesure que sa passion pour Biba grandit. Mais alors qu'ils s'étreignent et se déshabillent, Haider se comporte avec Biba comme si elle était un homme ce qui la scandalise et lui fait renvoyer Haider, effondré.

Mumtaz est enceinte et voit le piège se refermer sur elle, surtout qu'elle attend un garçon après les trois filles de Saleem et Nucchi. Elle tente de fuir pour se ressourcer à Karachi mais y renonce finalement. Constatant que Haider devenu la fierté de son père se comporte comme un fils soumis, elle se conduit dangereusement en espérant une fausse couche puis se suicide.

Nucchi accuse à juste titre la famille d'être responsable de la mort de sa belle-sœur. Haider se souvient de sa demande en mariage à Mumtaz qui l'aima immédiatement sans rien demander d'autre que de pouvoir continuer à travailler. Perclus de remords, Haider va tenter de s'en laver dans l'océan en se baignant sur une plage de Karachi.

Les trois quarts du film sont consacrés à la relation entre Heider et Biba mais le dernier quart voit la souffrance de plus en plus oppressante que subit Numtaz face aux forces patriarcales qui réduisent sa vie et vont l'enfermer entre les quatre murs de la maison familiale. Le flash-back de Haider se souvenant de sa demande en mariage révèle la tragédie qui a emporté sa femme. Ensemble, ils avaient nouée un pacte tacite d'indépendance mutuelle, leur permettant d'inverser les rôles, elle voulait pouvoir travailler, il lui convenait de rester à la maison. Ce n'est ainsi pas le manque de relations amoureuses sexuelles qui pèsent sur Mumtaz et pas non plus l'infidélité de son mari que de le voir, investi de son nouveau rôle de père d'un fils, prendre le chemin d’un patriarcat aussi normatif que son père. L'empressement de Haider envers son père, les échanges dorénavant complices qu'elle surprend entre eux la conduise au terrible projet du suicide.

Le film tient ainsi ces deux lignes narratives qui vont se révéler aussi tragiques l'une que l'autre. Heider entretient une relation amoureuse sans issue avec Biba car il la voudrait sexuellement masculine alors qu'elle veut être aimée comme une femme. Numtaz voit se refermer progressivement son territoire : la voisine veuve qui aurait pu s’occuper de la famille est lâchement renvoyée par le père mais laisse aussi le reste de la famille sans réaction.

Le film alterne scènes courtes aux fins abruptes pour décrire le climat social avec des scènes plus longues lorsque la sensibilité demande à se développer :   le sang évacué de la chèvre, les danses ou même la séquence de masturbation ou de bain dans l’océan.

La société pakistanaise  s’y révèle archaïque par bien des points : femmes assignées aux taches domestiques, l’injonction faite aux garçons de se montrer virils. La place octroyée aux personnes transgenres est  acceptées car, dès 2018, une loi leur accorde le droit de déterminer elles-mêmes leur sexe sur les documents officiels, mais constamment méprisée.