(Co-réalisé avec Gilles Perret). Avec : François Ruffin, Bruno Bonnell, Sébastien Jumel, Delphine, Sabrina, Assia, Hayat, Sandy. 1h25..
Le 8 mars 2018, François Ruffin fait un discours à l'Assemblée Nationale rendant hommages aux femmes de ménage levées à 4 heures du matin et qui, dès six heures, ont nettoyé son studio à l'assemblée. Il demande à ce que la société de services dont on se gargarise ne soit pas une société de servitude pour ces femmes. Le lien est sous estimé, mal payé en grande partie car pratiqué par des femmes. François Ruffin, depuis son élection en 2017, se battait sans réussite face à Florian Bachelier, Premier Questeur de l’Assemblée Nationale, pour que soit amélioré le sort des femmes de ménage de l’Assemblée.
Après bien des efforts, François Ruffin obtient enfin, en novembre 2019, une mission parlementaire chargée d’examiner les "métiers du lien". Il déchante pourtant. Il aura comme co-rapporteur, Bruno Bonnell, le député LREM chef d’entreprise élu Manager de l’année par Le Nouvel Économiste en 1995. C'est surtout celui que M6 avait choisi pour interpréter le même rôle que Donald Trump dans la version française de "The Apprentice : Qui décrochera le job ?" ; un homme très éloigné de la France Insoumise, la tête de con pour Ruffin. Et pourtant « En une minute, c’était plié, les barrières s’effondrent », Ruffin et Bonnell arrivent à très bien s’entendre. Ils auditionnent à l'assemblée des sociétés de service d'aides à domiciles dont seul l'activité de leurs auxiliaires de vie sociale (AVS), en présence des personnes aidées est prise en compte, sans tenir compte de leurs déplacements.
Ils se rendent à Dieppe, où le maire, prolongeant l'action de son prédécesseur devenu député, Sébastien Jumel, emploie en CDI les AVS. Celles-ci expriment la foi en leur métier et leurs difficultés d'autrefois : un salaire en dessous de 900 euros par mois, sauf à faire 186 heures par mois.
Ruffin et Bonnell se rendent aussi à Amiens auprès d’accompagnantes d’élèves en situation de handicap (AESH). Elles ont été briefées par le rectorat afin de ne pas parler de leurs difficultés. Elles en ont pourtant : aucune préparation pour l'accompagnement d'autistes, aucune formation, aucune perspective de progression de carrière ou de reconnaissance de leur activité.
Le 16 mars 2020, dans une allocution télévisée, Emmanuel Macron déclare le pays en guerre contre le covid 19. Il assure que lorsque "les jours heureux reviendront ...Il faudra se rappeler que notre pays tient aujourd’hui tout entier sur ces femmes et ces hommes que nos économies reconnaissent et rémunèrent si mal..La Nation soutiendra ses enfants … Nous leur devons évidemment les moyens, la protection. Nous serons là. Nous leur devons des masques, du gel, tout le matériel nécessaire et nous y veillons et veillerons."
Or François Ruffin reçoit des appels d’auxiliaires de vie sociale qui l’alertent : "On est obligées de travailler, mais on n’a pas de masque, pas de gel, pas de blouse… ". Avec Gilles Perret, il se dit : "Si elles continuent, nous aussi !" et ils partent en voyage dans le Nord sans rencontrer grande circulation : même les pompes à essence ordonnent « restez chez vous ! . Ruffin rencontre une infirmière qui fabrique des surblouses dans la cuisine ."Qu’un soldat fasse son armure, ce n’est pas très logique", s'indigne-t-elle.
Lors de ses réunions avec les AVS, Ruffin apprend que le secteur dénombre plus d’accidents du travail que dans le BTP.
Rentré à Paris, une femme de ménage vient l'encourager à continuer son combat concernant les hausses des salaires des agents d’entretien de l’Assemblée nationale. C'est Jeannette, Congolaise d’origine, qui depuis 2008, se lève à 4h00 tous les matins pour nettoyer les bureaux des députés et sénateurs vers 6h20 à Gare de Lyon, puis direction l’Assemblée nationale.
François Ruffin est contraint de voter contre son propre texte lors de son passage en commission des Affaires sociales de l’Assemblée. En effet ce texte visant à « faire cesser la maltraitance » des femmes de ménage a été complètement vidé de sa substance par les modifications apportées par la majorité LREM.
Six mois après l’adresse aux français du 16 mars 2020 d’Emmanuel Macron, sa majorité a déjà complètement oublié ses promesses et rejette les amendements pour les métiers du lien lors du vote du budget 2020. Bruno Bonnell, malade du Covid, était absent de l’hémicycle et n’a pu défendre les propositions de la commission parlementaire auprès des autres membres de son parti.
Découragé mais ragaillardi par une recette de quenelles de Bonnell, arrosées de Châteauneuf du pape, Ruffin imagine une assemblée constituée de femmes appartenant aux métiers du lien.
L’Assemblée Nationale est devenue une assemblée des femmes, AESH AVS et femmes de ménage. François Ruffin et Bruno Bonnell apparaissent en tenue d’huissiers. Les discours et les votes deviennent différents. Fofana-Salimata entraîne toutes les femmes à chanter "l’hymne des femmes".
Lors du générique, des cartons indiquent que les AVS ont obtenu un salaire national, que l'amende gruyère a été retirée à l'une d'entre elles, que les femmes de ménage de l'hôpital d'Amiens ont obtenu une prime Covid et une prime carburant de 30 euros ; que les AESH ont obtenu un peu plus de salaire.
François Ruffin réalise un film plein de ferveur militante qui se teinte de lucidité face à l’appareil politique verrouillé de toutes parts et ainsi de joie à partager le combat avec d’autres. Il privilégie ainsi les déplacements dans la région qu’il connaît le mieux, le Nord de la Normandie et la Picardie avec le plaisir de retrouver Dieppe et Amiens dont il fait partager la beauté à Bonnell. Il ne masque pas les maladresses dues à son écoute des autres au détriment du remplissage de carburant qui déborde.
Face à des parlementaires ou un ministre de l’éducation nationale robotisés, il met en scène les femmes qui montent à Paris et viennent défendre leur cause devant les médias et à l’assemblée.
Au bord du découragement, c’est une idée surgit des brumes de l’alcool lors d’un repas chez Bonnell qui redonne foi dans le combat. Aux chansons nostalgiques interprétées par Bourvil répond alors Fofana-Salimata et son "l’hymne des femmes" dont la musique reprend celle du chant allemand "Moorsoldaten Liedes", composé en 1933 par Rudi Goguel et d’autres prisonniers communistes du camp de concentration pour détenus politiques de Börgermoor en Basse-Saxe.