Godland

À la fin du XIXème siècle, Lucas, un jeune prêtre danois idéaliste est envoyé pour fonder une église dans le sud-est de L'Islande île alors sous domination du puissant Danemark. Passionné de photographie, Lucas décide d'aborder l'île par l'ouest afin de photographier les habitants et les paysages. Le traducteur qui l'accompagne est bienveillant mais beaucoup moins le guide local, Ragnar, qui refuse tout échange en danois alors que Lucas est incapable d'apprendre un peu d'islandais. Très vite ridiculisé par son manque d'aptitude au voyage dans cette contrée reculée aussi magnifique que difficile, Lucas a néanmoins quelques moments de grâce en photographiant des vallées somptueuses et se baignant dans des cascades qui s'effilochent sur des centaines de mètres. Déçu néanmoins de ne rencontrer personne, il insiste pour franchir une rivière anormalement haute. Le traducteur dont le cheval transportait la lourde croix, s'y noie. Lucas se retrouve face à Ragnar et aux locaux qu'il a recruté pour transporter son lourd matériaux. De plus en plus malade, il tombe d cheval et est laissé sur place enveloppé d'une couverture alors que la petite troupe conduite par Ragnar va chercher du secours.

C'est ainsi que, quelques jours plus tard, Lucas se retrouve dans la maison de Carl, le chef du village des colons danois qui avait sollicité l'envoi d’un prêtre pour construire l'église et rassembler la communauté protestante. Anne, la fille aînée de Carl en tombe amoureuse, alors que sa jeune sœur, Ida, fait preuve dune espièglerie qui irrite Lucas. Ragnar se démène à la construction de l'église mais se heurte à la haine de Lucas quand il lui demande comment devenir un homme d'église. Alors qu’il doit partir, Ragnar lui demande e une photographie ce que lui refuse Lucas prétextant le manque de sels d'argent et l'insultant en Danois. Ragnar lui révèle alors qu'il comprend parfaitement cette langue, qu'il a tué le cheval de Lucas après avoir subi autant de mépris et si peu de reconnaissance. En colère Lucas le tue et abandonne son corps à la mer.

Le jour de la consécration de l'église, le chien fidele de Ragnar aboie devant les portes. Rendu muet par cette accusation, Lucas, sort et glisse sur la boue maculant son visage et sa collerette blanche. Lucas quia compris se lance à sa poursuite et le tue après quelques heures  de chevauchée. Le corps de Lucas est retrouvé, décomposé, quelques années après, par Ida qui lui souhaite de reposer enfin en paix dans la nature.

Un carton au début de Godland indique que le film s'inspire d’une série de sept négatifs sur des plaques de verre trempées de collodion humide et recouverts de sels d'argent. Ce serait, en Islande, les plus anciennes photographies connues à ce jour. Sauf que ce sont des images fictives qui ont servi de stimuli au réalisateur par le fait de devoir imaginer le contexte et les conditions de leurs prises de vue. Au-delà du plaisir de l’écriture avec un matériau qui formule une sorte de texte à trous que le film tente, avec toute la poésie du monde, de compléter, il emprunte son format carré (1.33) aux bords arrondis.

La nature se révèle si magnifique (La robe d’un cheval, une immense cascade qui s’effiloche jusqu’à l’abstraction, un glacier, les coulées de lave d’un volcan) que la volonté de puissance du prêtre confite dans les règles étroites qu'on lui a enseigné, se trouve anéantie. Lucas va alors développer une haine grandissante pour celui qui incarne cette nature, le fier Ragnar. Celui-ci, constamment humilié par Lucas,  se venge en tuant son cheval. Sa lente décomposition au fil des saisons anticipe celle de Lucas. Dans ce pays sauvage et magnifique, les hommes ne peuvent y survivre qu'en unissant leurs forces.