Monica, sort de chez elle pour aller accoucher à la clinique. Alors qu'elle croit voir arriver son taxi, c'est Andrea, vingt ans, qui déboule en voiture, ivre, fauchant une passante, et fonçant dans l'immeuble qu'elle vient de quitter. Andrea effondre ainsi la verrière du rez-de-chaussée derrière laquelle se trouve Francesca, la fille de huit ans de Sara et Lucio. Ceux-ci reconnaissent immédiatement Andréa, le fils du couple de magistrats du troisième. Ils vont conduire leur fille chez les voisins âgés, Giovanna et Renato, leurs voisins de palier, qui la gardent souvent afin qu'elle dorme en paix. Pendant ce temps Dora, la mère d'Andrea, est venue rejoindre son fils, emmené en ambulance tandis que Vittorio, son père, vient près de la femme qu'il a fauchée et constate son décès.
Lorsqu’elle rentre de l'hôpital chez elle avec sa fille, Béatrice, Monica découvre un gros paquet cadeau sur le pas de sa porte. Elle explique à Giorgio, son mari, par Skype que c'est son frère, Roberto, avec lequel il est fâché qui l'a offert. Giorgio, constamment à l'étranger pour le travail, lui dit qu’il est impatient de rentrer. Monica va voir sa mère à l'hôpital; celle-ci souffre d'un terrible complexe de persécution qui l'éloigne définitivement du réel. Monica fait part de ses frayeurs au médecin. Elle-même a l'impression de perdre pied comme sa mère dont la folie s'est déclarée avec la maternité.
Un soir, Renato, à qui Francesca a été confiée, disparaît avec l'enfant pendant de nombreuses heures. Lorsque les deux sont enfin retrouvés, Lucio craint que quelque chose de terrible ne soit arrivé à sa fille. Sa peur vire à l'obsession. Il interprète la maturité de sa fille comme une preuve d’un traumatisme, et va jusqu’à agresser Renato à l’hôpital.
Andrea, assigné à résidence en attendant son procès, supplie ses parents de faire jouer leurs relations pour lui éviter la prison. Vittorio, excédé par l’irresponsabilité dont fait preuve son fils, lui jette à la figure qu'il les a toujours déçu. Andrea s’emporte et frappe son père, lui assénant plusieurs coups de pieds alors qu'il est à terre. Quand une nuit la police appelle Vittorio pour lui signifier qu'Andrea est arrêté pour avoir contrevenu à son assignation et s'être bagarré, il signifie à Dora qu’il ne veut plus voir son fils. Elle doit choisir entre son fils ou lui.
Lorsque Charlotte, étudiante à Paris, vient rendre visite à ses grands-parents, Lucio, tout à son obsession, est aveugle à ses tentatives de séduction. Elle le piège en l’amenant chez ses grands-parents absents sous prétexte de lire leur mail et s'offre à lui. Lucio refuse puis, attendri par ses larmes, succombe. Il est cependant consterné de lui avoir pris sa virginité alors qu'elle jouait à la fille libérée.
Giorgio est de retour chez lui. Lorsqu'il découvre le cadeau de son frère, devenu un riche agent immobilier, il s'emporte et oblige sa femme à l'accompagner jusqu’à l'agence de celui-ci pour lui restituer le cadeau.
Lors des obsèques de Renato, Giovanna, déclare publiquement sa haine de Lucio qui a agressé son mari et a couché avec sa petite fille. Sara en est interloquée
Cinq ans plus tard. A sa sortie de prison, Andrea est accueilli par sa mère. Il lui déclare vouloir couper les ponts avec ses parents et décider seul de sa vie à venir.
Charlotte, sa mère et sa grand-mère ont intenté un procès à Lucio pour viol. Celui-ci déclare pour sa défense que le rapport était consenti et un peu maladroit. Il vit désormais séparé de Sara, même si celle-ci le soutient. Le tribunal acquitte Lucio pour insuffisance de preuves. Le soir, au gala de danse où Francesca est en vedette, Sara en larmes annonce à Lucio que Charlotte a fait appel du jugement. Lucio, en colère, quitte immédiatement le gala et court jusque chez Charlotte qui est avec sa mère et sa grand-mère et lui demande de dire la vérité et de renoncer aux poursuites. Giovanna, la grand-mère, lui claque la porte au nez.
Monica est de nouveau seule avec sa fille, Béatrice. Giorgio est à l'étranger pour le travail. Elle lit dans le journal que Roberto, le frère de Giorgio est en fuite après un scandale financier qui a ruiné ses investissements et beaucoup de petits épargnants. Le soir même, alors qu'elle raconte une histoire à Béatrice afin de l'endormir, elle entend du bruit dans la maison. C'est Renato qui vient la supplier de lui accorder refuge pour la nuit. Elle accepte. Le matin, elle a la surprise de le voir faire réviser ses devoirs à Béatrice qui est heureuse de la présence de son oncle et espère qu’il va se réconcilier avec son père. Roberto lui fait pourtant promettre de garder le secret de sa visite. Le soir, Roberto est toujours là, allongé près d'elle. Il lui dit regretter que son frère l'abandonne à elle-même bien trop souvent. Il lui révèle qu'il se souvient de l'avoir vu nue allongée dans son lit lors d'une de ses premières visites et s'être approché d'elle. Giorgio l'avait alors brutalement jeté hors de la maison et, brouillé à mort, lui avait interdit de revenir. Beatrice dit avoir ignoré cette raison de leur brouille et se laisse séduire par les paroles de Roberto. Au matin, il est parti et Béatrice vient l'alerter sur le fait qu'il est grand temps de partir à l'école. Elle va dans la cuisine où elle constate que Roberto est toujours là, qui boit son café. A l’école, Monica et Béatrice ont la surprise de voir Giorgio qui est rentré plus tôt que prévu. Monica révèle Giorgio que son frère est venu deux jours trouver refuge chez eux et s'y trouve toujours. Pourtant à leur arrivée, nulle trace de Roberto. Quand Monica explique à Giorgio ce que lui a appris son frère au sujet de leur brouille, Giorgio lui dit qu'elle l'a toujours su car il la lui a racontée. Monica pleure sachant qu'elle a rêvé cette visite.
Dora pleure dans les bras de Vittorio, frustrée de devoir renoncer à son fils. Vittorio veut refaire marcher un vieux répondeur et enregistre un message d'absence sur celui-ci.
Cinq ans plus tard : Vittorio est mort. Dora ne peut s’empêcher de toujours lui parler sur le répondeur plutôt que sur sa tombe. Elle n’a plus de nouvelles de son fils.
Monica a un deuxième enfant. Elle craint de basculer dans la folie mais Giorgio la rassure.
Dora va porter les vêtements de son mari à une association pour l’accueil des migrants. Le local est attaqué et incendié par des manifestants d’extrême droite qui veulent renvoyer les étrangers chez eux. Le responsable de l'association, Luigi, qui semblait à la vue des étiquettes sur les vêtements connaître le mari de Dora aide celle-ci quand elle s'évanouit en fuyant l’incendie. Il la conduit chez lui, lui fait prendre un bain bien chaud et l'invite à déjeuner avec la famille de migrants qu'il héberge avec une grande convivialité. Lorsqu’il la raccompagne à la porte, elle est interloquée qu'il lui dise que les circonstances de leur rencontre sont étranges.
Monica allaite son dernier né. Elle voit un corbeau qui crie silencieusement, perché sur le lit d'enfant. Béatrice aide son père à faire des valises pour un nouveau voyage. Ils entendent le bébé pleurer. Monica a disparu et Giorgio ne la retrouve pas dans les rues avoisinantes.
Dora décide de vivre plus en accord avec elle-même. Elle achète une robe colorée assez chère et décide de vendre son appartement qu'elle trouve trop triste. Alors qu'elle reçoit la visite d'acheteurs potentiels, Luigi vient lui dire qu'il voudrait qu’il lui rende service en l'accompagnant en voiture pour un lieu situé à deux heures de route. Dora accepte et Luigi lui apprend qu’il va rendre visite à sa fille qui vit retirée à la campagne où elle vient d'accoucher. Le père du bébé est Andréa. La visite est toutefois un échec : Andréa renouvelle sa volonté de ne pas voir sa mère interférer avec la vie en autarcie qu'il a choisie.
Charlotte vient rendre visite à Lucio sur son lieu de travail. Il s'étonne de sa démarche. Elle tient à lui dire que c'est elle qui a renoncé à l'appel et qu'elle a insisté pour mettre ainsi fin à l'acharnement de sa mère et sa grand-mère. Luigi lui dit que tout est de sa faute, que cela est loin maintenant et qu'ils doivent oublier. Charlotte se réjouit qu'il n’ait rien dit de cette affaire à Francesca avec qui elle est amie. Francesca révèle à son père que Renato n'a jamais rien fait de répréhensible la nuit où il fut seule avec elle. Lucio l'embrasse, en larmes
Giorgio fait les courses au supermarché avec Beatrice quand il reçoit un appel de Monica. Celle-ci veut faire un voyage en train avec sa mère comme elle le lui a promis. Giorgio ne parvient pas à la raisonner sur cette folie douce et à la convaincre de revinir avec eux.
Dora va voir le mari de la femme qu'Andrea a fauchée dix ans plus tôt pour s'excuser à la place de son fils. L’homme lui révèle alors avoir reçu depuis quelques mois du miel fabriqué par Andréa mais qu’il n'est pas en mesure de le recevoir comme celui-ci le lui demande. Dora est stupéfaite de la contrition de son fils.
Beatrice donne les clés de l'appartement à Sara dans l'espoir que Monica revienne pendant leur semaine de vacances. Ils sont attirés par la musique venant de la rue. Sara, Lucio et Francesca, Giorgio, Beatrice et le bébé ainsi que Dora regardent le groupe de danseurs mené par un char qui s'éloignent joyeusement dans la rue. Giorgio démarre sa voiture tandis qu'à l'arrière, Beatrice fantasme le retour de Monica à la maison.
Sara et Lucio accompagnent Francesca à l'aéroport, les laissant désormais ensemble pendant qu'elle va poursuivre ses études en Espagne.
Dora, qui a vu dans la contrition d'Andréa un espoir qu'il puisse adoucir sa position à son égard, va le retrouver dans sa ferme isolée. Andréa lui sourit.
Tre piani, raconte le destin croisé de quatre familles qui habitent les trois niveaux (tre piani en italien) d'un même immeuble : Sara et Lucio et et leur fille de sept ans, Francesca, habitent le rez de chaussé avec pour voisin un couple âgé, Giovanna et Renato, qui reçoit parfois la visite de leur petite-fille, Charlotte. Au premier étage, habitent Giorgio, qui déteste son frère, Roberto, et Monica, qui accouche avec angoisse de Béatrice. Au deuxième et dernier étage habitent Dora et Vittorio, un magistrat rigide, qui ont un fils à problème, Andréa. L'histoire entrelacée de ces 13 personnages, auxquels s'ajoutent, in fine, Luigi et sa fille, interroge la difficulté d'être parents au sein de couples pourtant unis et aimants. Tandis que face aux difficultés, les hommes sont prisonniers de leurs entêtements, les femmes tentent, chacune à leur manière, de raccommoder ces vies désunies et de transmettre enfin sereinement un amour que l’on aurait pu croire à jamais disparu.
Le film est en effet porté par ce message que l'amour de ses enfants ne doit pas aller jusqu'à les étouffer de ses angoisses. Vittorio juge trop son fils ;Lucio a trop peur d'une agression sexuelle sur sa fille. Monica a les angoisses d'une névrose qui la fait fuir la réalité dans un état de constante inquiétude, que son mari, Giorgio, trop souvent absent, ne peut contrôler. Elle tente désespérément d'y échapper. Cette folie incontrôlable rend d'autant plus dérisoires les obsessions masculines qui les conduisent à gâcher leur vie et celle de leur entourage.
Le sourire final d'Andrea, accueillant enfin sa mère, résout la fable proposée par Moretti sur l’importance de l’indulgence vis-à-vis des autres. Message certes apaisant mais on a connu Moretti moins consensuel. Dans Mia madre (2015) encore, il montrait la grandeur, certes douloureuse, à vouloir ne pas lâcher prise face à ses décisions et ses engagements. Message répété dans Santiago Italia (2018). Les métiers et engagements politiques sont ici absents, si ce n’est la figure esquissée de Luigi, le beau-père d’Andrea. Sans doute l’idéal rabattu sur les seules valeurs familiales appelle-t-il en effet à plus de souplesse et à l'espoir, un rien artificiel ici quand même (ce n'est d'ailleurs pas dans le roman), quand tout se termine par une danse collective. Pour cela au moins, Moretti reste fidèle à lui-même.
Jean-Luc Lacuve, le 12 novembre 2021