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Le monde, la chair et le diable

1959

Thème : Dystopie

(The World, the Flesh and the Devil). D'après Le nuage pourpre de Matthew Pipps Shiel. Avec : Harry Belafonte (Ralph Burton), Inger Stevens (Sarah Crandall), Mel Ferrer (Benson Thacker). 1h35.

Après un éboulement au fond d'une mine en Pennsylvanie, Ralph Burton attend des secours qui n'arrivent pas et finit par se libérer seul des décombres. De retour à la surface, il découvre que toute trace de vie humaine semble avoir disparu après le passage d'un nuage radioactif. En route pour New York, il traverse des avenues désertes, s'organise et récupère ce dont il a besoin dans les magasins, tirant derrière lui un chariot au pied des gratte-ciels abandonnés... Est-il vraiment le seul survivant de l'humanité ?

Ce sont surtout ces images d’un New York totalement vide d’habitants qui frappent. Les rues sont silencieuses, désertes et jonchées de papiers. La nuit toute la ville est plongée dans d’inhabituelles ténèbres. Personne n’apparaît jamais aux fenêtres. La mort de l’humanité trouve dans ces images un cachet très réaliste alors qu'aucun trucage n’a été utilisé. Le réalisateur et l’équipe du film ont en effet obtenu l’autorisation de tourner les scènes d’extérieur entre 4 heures et 6 heures du matin : la production a bénéficié du concours des magasins qui ont éteint leurs enseignes et de la municipalité qui a fait interdire la circulation. Enfin, l’usage de pellicule en noir et blanc, plus sensible à la lumière, a permit de travailler en lumière naturelle et sans projecteurs. Ce stratagème a permit de rendre parfaitement crédibles les scènes où l’on voit des sites célèbres comme Time Square, la Cinquième Avenue ou le quartier de Wall Street. 

Le héros noir est interprété par Harry Belafonte, acteur et militant d’origine jamaïcaine, il est également le détenteur des droits du film, ce qui lui permet de s’offrir le premier grand rôle de sa carrière. Si pour Ralph Burton la fin du monde est synonyme de catastrophe, elle signifie également la fin de toute discrimination raciale. Ce sera non sans mal. Lorsque Ralph rencontre une femme blanche, bien que celle-ci se défende d’être raciste, une distance ne tarde pas à s’installer entre les personnages. Même alors que toute la société est irrémédiablement détruite, les conventions sociales subsistent entre les deux personnages. Ils se voient incapables de se défaire des règles qui régissaient toute leur vie auparavant, celels qui agissent au quotidien, sous couvert d’expressions devenues banales ou de normes sociales. La jeune femme furieuse affirme qu’elle est « libre, blanche et majeure » pour affirmer son indépendance. La phrase, d’une terrifiante banalité à l’époque démontre bien que le statut « inférieur » réservé au noirs était perçu comme « allant de soi » par la population. Ou bien lorsque la même jeune femme demande à Ralph pourquoi elle ne pourrait pas venir s’installer dans le même immeuble désert que lui, il répond « les gens pourraient jaser ».

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