La femme est l'avenir de l'homme

Les premières neiges sont tombées sur Séoul. Munho, jeune professeur d'art plastique, retrouve son ami Hunjoon, cinéaste sans le sou qui revient des Etats-Unis. Ils partent sur les traces d'un souvenir : Sunhwa, une jeune fille dont ils étaient amoureux quelques années auparavant...

L'un est apprenti cinéaste, l'autre apprenti professeur, mais ils sont tous deux des laissés-pour-compte du développement économique coréens. Ils sont tous les deux entrés dans l'âge adulte mais ont gardé leur rêves d'adolescent. De ces écarts entre prétention et réalité naissent les plus pitoyables aventures amoureuses mais aussi les plus beaux instants de conscience de vivre. Dans ce film aux nombreux flash-back, une constante chez Sang-soo, le temps semble s'évanouir et laisser les personnages dans un rêve perpétuel que la réalité se charge de ramasser avec une douce cruauté.

Ainsi, au rang des aventures pitoyables, la drague de la serveuse dans le restaurant, le fantasme surgit à la vue de la jeune femme attendant dans la rue derrière la vitre de ce même restaurant, l'histoire du " viol " par son ancien amant de Sunhwa, la minable stratégie de Hunjoon pour se débarrasser de Munho lorsqu'il a obtenu un rendez-vous avec Sunhwa, l'hôtel minable qui accueille l'aventure de Munho avec une de ses étudiantes.

Si leurs aventures sont minables, "bas de gamme " dira l'un des étudiants, elles n'en demeurent pas moins des aventures somme toutes plus passionnantes que leur rêve "haut de gamme " (sert-il cinéaste ? Sera-t-il titularisé dans l'université ?). Les pas dans la neige, le départ pour Puchon, les multiples soûleries, les séquences sexuelles, les conversations toujours sincères sont autant d'instants certes un peu ridicules mais toujours filmé avec une rapidité abrupte dans le montage, comme des parenthèses qui sont autant d'instants qui échappent à la grisaille environnante.

Jean-Luc Lacuve le 26/05/2003