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L'ombre de Staline

Agnieszka Holland
2019

(Mr. Jones). Avec: James Norton (Gareth Jones), Vanessa Kirby (Ada Brooks), Peter Sarsgaard (Walter Duranty), Joseph Mawle (George Orwell), Kenneth Cranham (Lloyd George), Marcin Czarnik (Paul Kleb), Celyn Jones (Matthew), Krzysztof Pieczynski (Maxim Litvinov). 1h59.

1933 Gareth Jones est un conseiller de Lloyd George, alors premier ministre de l'Angleterre. Fougueux, il a obtenu une interview d’Hitler juste après l'incendie du Reichstag qui lui avoué être une manœuvre pour arriver au pouvoir. Pressentant le désir de guerre du futur dictateur, Jones en avertit le cabinet du premier ministre qui se rit de lui. Ne doutant de rien, Jones ambitionne de réaliser un entretien avec Staline afin que ce dernier s’explique sur la relative opulence que l’on constate à Moscou alors que le cours du rouble s'effondre. Il a l’intuition que quelque chose cloche dans ce tableau d’une Russie prospère. Mais la crise le rattrape en l'Angleterre où, faute de crédits, Lloyd Gorge doit le licencier non sans regrets et lui avoir remis une lettre de recommandation

Après beaucoup d'obstination pour obtenir un passeport pour la Russie, dès son arrivée à Moscou, Jones est assigné à résidence à l'hôtel Métropole. Il y rencontre Walter Duranty, correspondant du New York Times, qui passe ses nuits dans les lieux de plaisir de la capitale spécialement aménagés pour les "journalistes" étrangers confinés là et dont l'étalage des vices est l'occasion de les obliger à faire la propagande du régime.

Gareth Jones apprend le décès suspect d’un de ses contacts et ami, Paul Kleb que la même interrogation sur l'état de la Russie guidait dans son travail. Au lieu de l’inciter à se taire, cette nouvelle tragique conduit Jones à se cacher des autorités pour prolonger son séjour au-delà des deux nuits réglementaires. Il reçoit l'aide d'Ada Brooks, qui connaissait Paul Kleb, et l'aide à maquiller la lettre de recommandation du premier ministre anglais en lettre de mission diplomatique. Ainsi, muni d’un visa trafiqué, Jones se rend vers l’Ukraine, où Staline a planifié l’« Holodomor », ou l’extermination par la faim de la population. Gareth Jones s’enfonce dans l’horreur. De journaliste enquêtant sur la famine, il devient lui-même un affamé, un miséreux, un cannibale. En Ukraine, on se bat pour un quignon de pain noir. On mange de l’écorce d’arbre. De la chair humaine. On grelotte. On meurt.

Gareth Jones revient vivant de son périple. Passant outre le chantage du pouvoir russe, le journaliste, de retour en Angleterre, raconte la vérité dans des conférences. Elle est aussitôt contredite par Walter Duranty qui, naviguant au plus près des intérêts russes et américains, protège les uns comme les autres. Le reporter gallois finit par publier ses articles dans un quotidien appartenant à Randolph Hearst, magnat de la presse américaine, inspirant l’écrivain George Orwell. Le fermier de La ferme des animaux (1945), satire du totalitarisme stalinien, ne s’appelle-t-il pas Mr. Jones ?

En 1935, alors qu’il est en reportage en Mongolie, Gareth Jones est enlevé par des brigands et assassiné avec, sans doute, la complicité des services russes.

Lanceur d’alerte avant la lettre, Gareth Jones n’eut que le temps de dire la vérité avant d'être assassiné, sans que personne ne le croie. L’« Holodomor », ou l’extermination par la faim de la population, fit entre 2,6 millions et 5 millions de victimes au début des années 1930 en Ukraine.

La forme du thriller n'est pas vraiment à la hauteur des crimes commis.