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Hokusai

Hajime Hashimoto
2020

Genre : Biopic

Avec : Yûya Yagira (Hokusai jeune), Min Tanaka (Hokusa âgé), Hiroshi Abe (Juzaburo Tsutaya), Hiroshi Tamaki (Utamaro Kitagawa), Eita Nagayama (Tanehiko Ryutei), Miori Takimoto (Koto), Haruka Imô (Asayuki), Seishû Uragami (Sharaku Toshusai), Kanji Tsuda (Goemon Nagai), Munetaka Aoki (Kozan Takai). 1h30.

Edo 1775. Descente de la police shogunale dans la librairie de Juzaburo Tsutaya. La boutique est mise à sac et les estampes sont alors brûlées. Les samouraïs lui reprochent d'illustrer des manuscrits censurés ou des livres subversifs qui corrompent la morale publique. Juzaburo Tsutaya voit dans cette descente la confirmation qu'il est "le plus grand des éditeurs d’estampes" et va dans le quartier rouge de Yoshiwara rejoindre l'un de ses dessinateur, Utamaro Kitagawa, artiste particulièrement connu pour ses représentations de jolies femmes qui lui signale une geisha aux yeux magnifiques. Quand Juzaburo Tsutaya propose à celle-ci de poser pour ses dessinateurs, elle refuse, dégoûtée de son expérience avec les peintres sans savoir-vivre. Ainsi de "singe sauvage" qui l'a violée après une interminable séance de pose sans résultat.

Chez un libraire, Juzaburo Tsutaya obtient l'adresse de "singe sauvage" qui ne s'appelle encore que Shunrō Katsukawa et vit dans un quartier pauvre. Quand celui-ci rentre chez lui, il a la surprise de voir Juzaburo Tsutaya examinant ses dessins et qui veut le prendre sous son aile pour en faire un grand artiste. Banni de son école Katsukawa pour s’être essayé aux styles Yamato ou Kanō et avoir frappé un disciple aîné, "singe sauvage" n’en fait qu’à sa tête et ne peint que ce qu’il veut. Juzaburo Tsutaya n'insiste pas mais, le lendemain, dépose une avance que "singe sauvage" accepte après une journée sans vente de ses dessins.

Juzaburo Tsutaya le conduit dans le quartier rouge de Yoshiwara où Utamaro Kitagawa peint et lui explique que ses dessins sont superficiels et manquent de vie car il se contente de reproduire ce qu’il voit. Son mentor l’interroge sur ses motivations pour qu’il réfléchisse à son style et à l’art en général. De l’artiste Sharaku Toshusai, connu pour ses dessins d’acteurs de kabuki, Hokusai prend à nouveau une leçon de peinture qu’il a du mal à accepter.

Le voyage et les paysages métamorphosent l’artiste et son art qui signe dorénavant avec son fameux nom, Katsushika Hokusai, en hommage à l’étoile Polaire, "la seule qui ne bouge jamais". L'inspire surtout le mont Fuji et la mer avec ses représentations des vagues (l'une d'elle semble préfigurer La grande vague de Kanagawa qui sera publiée en 1831). Le mariage avec Koto puis la naissance de sa fille, O-Ei, semble apaiser Hokusai.

En 1804, la répression se fait de plus en plus forte et Utamaru est arrêté. Plus tragique encore est la fin de Tanehiko Ryutei, le samouraï à la littérature interdite, dont l'exécution en 1842 est camouflée en suicide. O-Ei supplie son père de quitter Edo.

1845. Épris de liberté, Katsushika Hokusai, désormais un vieil homme, vit éloigné de Edo, protégé par sa fille et vénéré par ses élèves. Il prend la route à travers tout le Japon malgré sa santé et sa condition physique. "Si le ciel m'avait accordé encore dix ans de vie, ou même cinq, j'aurais pu devenir un véritable peintre". A sa mort, à l’âge de 89 ans, Hokusai laisse derrière lui plus de 30 000 dessins et estampes.

Biopic tournant autour de la quête mystique envers la nature qui guide la peinture de Hokusai, maître des Images du monde flottant (ukiyo-e). D'abord "singe sauvage" refusant toute censure et tout conseil, celui qui ne s'appelle pas encore Hokusai résiste au conseil d'Utamaro qui cherche à représenter "au-delà de ce qu'il voit" ou de Sharaku Toshusai qui peint par plaisir. Il lui faut un seau d'eau sur la tête et un parcours épuisant en forêt pour, qu'au petit matin, Hokusai découvre la mer et dessine une vague : ce qu'il ressent face à la nature. L'artiste, toujours en quête d'inspiration, parcourra le japon en 1845 à 85 ans et demandera quelques années de plus pour devenir un véritable artiste.

L'art de Hokusai est illustré par cette vague primordiale, non identifiée, marquant ses débuts en artiste peignant "ce qu'il ressent" et que Juzaburo Tsutaya, le libraire définit comme "l'essence de la vague". Plus tard est bien évidemment montrée, mal cadrée, La grande vague de Kanagawa, la première des Trente-six vues du mont Fuji (1831-1833), alors qu'un plan fixe tente d'approcher Le Fuji rouge dans une embellie. Une courte séquence vient illustrer le processus technique de la réalisation d'une estampe : à partir du dessin original de l’artiste (eshi), interviennent le graveur (horishi), l’imprimeur (surishi) et l’éditeur (hanmoto). Pour que les scènes de peinture soient les plus réalistes, le réalisateur s’est entouré de Daisuke Mukai de l’Université des Arts de Tokyo pour montrer aux acteurs comment tenir leur pinceau.

La censure de l'époque est aussi l'un des thèmes du film avec la destruction de la librairie, l'annonce de l'arrestation d'Utamaro et l'assassinat de Tanehiko Ryutei, le samouraï à la littérature interdite.

Jean-Luc Lacuve, le 30 avril 2023.

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