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Une femme coquette

1956

D'après Le signe de Guy de Maupassant. Avec : Maria Lysandre (Agnès, La coquette) Roland Tolmatchof (le séducteur), Carmen Mirando, Jean-Luc Godard. 9'.

La coquette écrit une lettre : "Tu me demandes si je suis heureuse depuis mon mariage. Oui très. Mais là, je suis très malheureuse : je viens de tromper mon mari, sans le faire exprès, avec un amant de passage. Je ne sais pas si je dois lui avouer. Je t'écris pour te demander ton avis. Je suis cruellement punie de mon inconséquence. Dois-je rire ou pleurer, je ne sais plus. Voilà exactement ce qui s'est passé..."

Un midi en rentrant chez elle pour le déjeuner, elle surprend le signe qu'adresse une prostituée du haut d'une fenêtre à un client, depuis sa fenêtre.  Elle dit  respecter la façon gracieuse dont la femme  exerce cet ignoble métier et se sent prise de l'irrépressible envie de sourire comme elle pour voir l'effet du signe qu'elle fera sur un homme.  Sur l'ile Rousseau, elle aguiche ainsi un homme lisant un journal sur un banc. A peine le signe émis, l'homme la suit, la poursuit en voiture jusqu'à son domicile. Devant sa porte il insiste, la coquette tente de le dissuader, mais ne trouve pour s'en débarrasser, pas d'autre moyen que lui céder.

La coquette termine sa lettre : Je t'écris pour te convaincre de mon innocence. Elle signe de son prénom, Agnès

Godard part d'une nouvelle de Maupassant, Le signe, qu'il adapte à la ville contemporaine. L'argument  est rohmérien. Agnès décide de son projet (émettre un signe pour provoquer un homme) sans en mesurer les conséquences... qu'elle constatera la chose une fois faite. Reste à décider si elle a été morale ou pas.

Le thème de la prostitution  est en revanche très  godardien.  Godard, lunettes noires sur le nez et cigarette au bec,  joue le premier client hésitant devant la vraie prostituée draguant depuis sa fenêtre. La coquette dit avoir du respect par la façon gracieuse dont celle-ci exerçait cet ignoble métier.  Elle se dédouane en citant son mari :  "Les femmes croient innocent tout ce qu'elles osent". Elle juge son sort cruel : "Le destin d'une coquette est fort cruel; le monde la condamne à une liberté que sa morale reprouve".  Enfin, comme sa longue course troublée long des quais de Seine l'indique sans doute, elle cède au désir de l'homme... aussi bien que du sien.

Une femme coquette n'est jamais sorti officiellement en salle. Longtemps, on l'a cru perdu avant qu'un cinéphile le mette en ligne sur YouTube.

Jean-Luc Lacuve le 01/03/2017

. Source : Antoine de Baecque : Godard. (P. 73-74).

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