Ivo Salvini le rêveur aime la campagne, la nuit éclairée par la Lune qui, d'ailleurs, lui parle : il entend sa voix féminine et enjôleuse chaque fois qu'il se penche sur un puits.
Un soir, après avoir retrouvé le préfet Gonnella, curieux bonhomme qui en veut à l'humanité depuis sa destitution, il assiste au strip-tease d'une solide paysanne et rejoint au cimetière quelques originaux dont un joueur de hautbois installé dans un caveau et victime d'une malédiction : il connaissait un air qui déplaçait les meubles de son appartement ! Ivo voudrait passer "de l'autre côté, se souvenir au lieu de vivre". Il se revoit auprès de sa grand-mère qui se moquait de son air ahuri.
Plus tard. Ivo observe pendant son sommeil la belle Aldina, qu'il prend pour la Lune incarnée. Mais elle se réveille et le chasse. Il va alors sur les toits, dans une forêt d'antennes de télévision, auprès du doux Nestore, son ami, qui évoque son amour mouvementé pour Marisa, quelque peu nymphomane, qui se transformait en... locomotive au moment crucial.
Puis c'est la fête de Gnocchis et l'élection de Miss Farine. Aldina est favorite. Mais, accidentellement enfermé sous l'estrade. Ivo verra mal triompher son idole.
Gonnella et lui arrivent dans une boîte de nuit géante. Le préfet s'insurge contre la violence de la musique, obtient le calme et valse sur "Le beau Danube bleu " avec une amie. Ivo retrouve là sa soeur, qui le ramène dans l'appartement où ses neveux font grand tapage devant la télévision.
Mais le jeune homme repart pour le pays des rêves. Sur la place, beaucoup de monde : trois paysans, les frères Micheluzzi, viennent de capturer la Lune et la télévision couvre bruyamment l'événement. " La Lune ne peut rien nous apprendre : tout est déjà révélé ", dit un évêque. " Au contraire, elle peut nous dire ce que nous faisons sur la Terre ", dit un homme dans la foule. La cérémonie se termine dans la pagaille. Ivo et le préfet fuient vers la campagne et se laissent aller aux délices du silence.
La Voce della Luna est le dernier film de Federico Fellini, réalisé en 1990 : la dernière des grandes fantasmagories felliniennes, poème enchanté qui témoigne du désarroi du cinéaste face au monde contemporain,
Librement inspiré du Poème des lunatiques, d’Ermanno Cavazzoni (1987), La Voce della Luna est un poème nostalgique sur un monde déglingué par la société de consommation. Au début du film, la naissance de la Voie Lactée nous est contée par Salvini: à la fin du film, la lune, capturée et enchaînée sur terre par les frères Micheluzzi, est la star d’un fascinant show télévisé où paradent politiciens et hommes d’église devant une foule crédule avide de nouvelles religions. Une nouvelle mythologie a remplacé l’ancienne, avec son dieu Consommation, ses rites initiatiques (le film culmine dans la scène, fantastique, de la boîte de nuit en plein champ, sorte de rave-party avant l’heure), ses manifestations (la fête du gnocchi, grotesque, vulgaire, splendide), ses images (les gigantesques affiches publicitaires). La musique, au cœur du film, révèle le vice de forme du monde contemporain : les jeunes ont les écouteurs scotchés aux oreilles, ou dansent, solitaires dans la foule, au son d’une musique assourdissante. La nouvelle religion brise le lien