L’étrave d'un bateau brise les vagues pour conduire deux gardiens de phare sur une île mystérieuse et reculée de Nouvelle Angleterre dans les années 1890. Ils croisent sans un mot les deux gardiens qu'ils relèvent. Comme eux, ils vont rester quatre semaines à veiller sur le phare et la maison que surmontent deux immenses cornes de brume qui se déclenchent à un rythme régulier. Les mouettes s'y révèlent ricanantes devant la solitude des deux marins dont le principal sujet de discorde devient l’accès à la lanterne du phare, cette lumière située au sommet de l’île, se muant en un trésor jalousement gardé d’un côté, et ardemment convoité de l’autre.
Robert Eggers voudrait plonger ses spectateurs dans une "histoire hypnotique et hallucinatoire ". Il s'en donne les moyens techniques en produisant un noir et blanc splendide obtenu sur pellicule 35mm avec des jeux de lentilles et de filtres datant des années 30. Il utilise aussi le format 1.20 du début du cinéma sonore avant qu'il ne se standardise au 1.33
On peut être plus circonspect quant à la direction d'acteurs qui a surtout pour projet de faire briller Willem Dafoe et Robert Pattinson en leur demandant de cabotiner à qui mieux mieux sur des dialogues d'humiliations et de disputes assez convenus. Ils ne sont en effet pas aidés par un scénario accumulant des imageries disparates (mythologie grecque, histoires de pirates et vieux loups de mers solitaires) sur deux pénibles histoire de mauvaise conscience : Ephraim Winslow a laissé mourir son contremaitre dans les grandes forêts canadiennes et Thomas Wake, pour se venger de n'avoir jamais navigué, rend fou ceux qui tenteraient de percer à jour son secret. Les mouettes auront le dernier mot; c'est dire si tout cela est assez vain.
Jean-Luc Lacuve, le 15 septembre 2019