L'homme atlantique

1981

Avec : Yann Andréa et la voix de Marguerite Duras. 42'.

 "Vous oublierez que c'est vous, vous. Vous oublierez la caméra. Vous regarderez quelque chose mais vous le regarderez absolument. Vous essaierez de regarder jusqu’à l'extinction de votre regard. Vous regarderez la mer, le mur devant vous. Je crois aussi que, si vous ne regardiez pas ce qui se présente à vous, cela se verrait à l’écran.

Vous penserez que ce que vous voyez n'est pas une répétition, que ceci est inaugural. Comme l'est votre propre vie à chaque seconde de son déroulement. Vous penserez que vous êtes le tout auprès de moi qui vous ai choisi, moi, vous. (...) Cette mouette tragique, si seule face au vent face à l'objet atlantique.

Tout viendra de votre déplacement de long de la mer après les piliers du hall. Vous et la mer vous ne faites qu'un pour mo,i qu'un seul objet, celui de mon rôle dans cette aventure.

(...) Je la regarde moi aussi de toutes mes forces. Rien n'arrive plus que cette absence noyée dans le regret.(...) Hier soir après votre départ définitif, je suis descendu dans la chambre du rez-de-chaussée qui donne sur le parc, là où je me tiens toujours dans ce mois tragique de juin. Ce mois qui ouvre l'hiver.

Et puis je me suis dit, je vais commencer à écrire pour me guérir du mensonge d'un amour finissant. C'est à votre incompréhension que je m'adresse toujours. Sans cela, vous voyez, ce ne serait pas la peine. Et, sans émotion, j'ai dit la date du jour : il était le lundi 15 juin 1981 ; que vous étiez parti dans la chaleur terrible pour toujours. E je croyais cette fois, oui, que c'était pour toujours. Je crois que je ne soufrais pas de votre départ.

Et c’est pourquoi je me suis dis pourquoi ne pas faire un film. Ecrire serait trop dorénavant. Pourquoi pas un film ? Vous êtes resté dans l'état d'être parti et j'ai fait ce film de votre absence (dernière image du voilier sur la mer 22').

Vous aller de nouveau passer devant la caméra, cette fois vous allez la regarder. Regardez la caméra ! La caméra va maintenant capter votre réapparition dans la glace parallèle à celle dans laquelle elle se voit. Ne bougez pas ! Ne soyez pas surpris, je vais vous dire ceci : vous allez réapparaitre dans l'image. Non, je ne vous avais pas prévenu.

Oui, cela va recommencer. Déjà vous avez derrière vous un passé, un plan. Déjà vous avez vieilli, vous êtes en danger. Le plus grand danger que vous encourez maintenant, c’est celui de vous ressembler, de ressembler à celui du premier plan, tourné il y a une heure.

Oubliez encore, oubliez encore davantage. Vous allez regardez tous les spectateurs dans la salle, un par un et chacun pour soi. Rappelez vous bien ceci : la salle elle est, à elle seule, le monde entier de même que vous vous l'êtes, vous et vous seul. N'oubliez jamais, n'ayez pas peur. Personne, personne d'autre au monde que vous, ne pourra faire ce que vous allez faire maintenant : passez ici pour la deuxième fois aujourd’hui par moi seul ordonné devant dieu. Ne cherchez pas à comprendre ce monde photographique, la vie. Cette fois-ci vous allez mourir à votre propre vue...

  Marguerite Duras est desormais seule chez elle sur la Côte Normande. Quittée par l'homme qu'elle aime. Elle évoque sa douleur à vivre cette situation et comment, pour la surmonter, elle a decidé de faire un film: "Ecrire serait trop dorénavant". Néanmoins, le film une fois réalisé donnera lieu à la publication du livre, en avril 1982 aux éditions de Minuit. Ainsi alors que Agatha et les Lectures illimitées est est une adaptation de la pièce de Marguerite Duras, sortie en 1981. Il s'agit de l'adaptation de sa pièce de théâtre Agatha publiée la même année aux éditions de Minuit.

La voix envoutante de Marguerite Duras mime une direction d'acteur, celle de Yan Andrea, son amant enfui qu'elel dirigea l'année même dans Agatha et les lectures illimitées. et dont elle monte ici quelques rushes éparts. Ddurant la première moitié u film ces chutes dufilm precedntsont entrecoupés de plans noirs du'n durée inférieure à 30 secondes. Mais apres 22 minutes et pour le retsantdu film ne reste que la voix de Marguerite Duras sur l'écran noir. Comme un sompteux tombeau à son amour finissant qu'elle assume tragiquement, qu'elle sublime.

Jean-Luc Lacuve, le 12 juin 2021