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L'événement

2021

Genre : Biopic

D’après le roman d’Annie Ernaux. Avec : Anamaria Vartolomei (Anne), Kacey Mottet Klein (Jean), Luàna Bajrami (Hélène), Louise Orry-Diquéro (Brigitte), Louise Chevillotte (Olivia), Pio Marmaï Pio (Le professeur Bornec), Sandrine Bonnaire (Gabrielle Duchesne), Leonor Oberson (Claire), Anna Mouglalis (Mme Rivière), Cyril Metzger (Gaspard). 1h40.

France, 1963. Anne, étudiante prometteuse, tombe enceinte. Elle décide d’avorter, prête à tout pour disposer de son corps et de son avenir. Elle s’engage seule dans une course contre la montre, bravant la loi. Les examens approchent, son ventre s’arrondit.

Solitude de Anne face à ses amies, aux médecins, sa famille, son petit ami. Donc plutot bonne utilisation de la courte focale avec flou autour et caméra à l'épaule comme l'avait utilisé sur le même sujet 4 mois, 3 semaines, 2 jours ( Cristian Mungiu, 2007).

En sortant de la projection de L’évenement, Annie Arnaux très émue, a écrit cette lettre à Audrey Diwan : « Vous avez réalisé un film juste. » Juste, c’est à dire au plus près de ce que signifiait pour une fille de se découvrir enceinte dans les années soixante quand la loi interdisait et punissait l’avortement. Le film ne démontre pas, ne juge pas, ne dramatise pas non plus. Il suit Anne dans sa vie et son environnement d’étudiante entre le moment où elle attend en vain ses règles et celui où sa grossesse est derrière elle, que « l’Événement » a eu lieu. Simplement – façon de parler – c’est par le regard d’Anne, ses gestes, sa façon de se comporter avec les autres, de marcher, ses silences, qu’il nous fait ressentir le basculement soudain produit dans son existence, dans son corps qui s’alourdit, réclame de la nourriture et s’écœure. Qu’il nous fait entrer dans l’horreur indicible du temps qui avance et s’affiche en semaines à l’écran, le désarroi et le découragement de solutions qui s’effondrent mais aussi – c’est très clair – la détermination d’aller jusqu’au bout. Et, quand tout est accompli, sur le visage paisible et lumineux d’Anne, au milieu des autres étudiants, se lit la certitude d’un avenir redevenu ouvert. Je ne peux pas imaginer quelqu’un d’autre qu’Anamaria Vartolomei pour incarner Anne et, d’une certaine manière, m’incarner moi-même à 23 ans, elle est bouleversante de vérité, de justesse par rapport à ma mémoire. Mais juste, le film ne l’aurait pas été totalement à mes yeux s’il avait occulté les pratiques auxquelles les femmes ont recouru avant la loi Veil. Audrey Diwan a le courage de les montrer dans leur réalité brutale, l’aiguille à tricoter, la sonde introduite dans l’utérus par une « faiseuse d’anges ». Parce que c’est seulement ainsi, dans le dérangement suscité par ces images, qu’on peut prendre conscience de ce qui a été infligé au corps des femmes et de ce que signifierait un retour en arrière. Il y a vingt ans, j’écrivais à la fin de mon livre que ce qui m’était arrivé durant ces trois mois de 1964 m’apparaissait « comme une expérience totale », du temps, de la morale et de l’interdit, de la loi, « une expérience vécue d’un bout à l’autre au travers du corps ». C’est cela, en somme, qu’Audrey Diwan donne à voir et ressentir dans son film.

 

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