Un carton nous informe que le film a été "tourné en Croatie durant l’Université du bonheur du Mouvement raëlien". C'est en effet la semaine la plus intense de leur vie que promet Raël à ses adeptes. Après une collation de pastèques plus ou moins fraiches, chacun des nouveaux membres se présente : un amateur d'échecs et de massages, Dominique, très décontractée, Lily, qui vient là pour faire la fête, et Arnaud, le chanteur à la petite célébrité, immédiatement populaire parmi les participants, les femmes surtout..
Raël intervient par écran vidéo interposé pour promettre à ses adeptes la meilleure semaine de leur vie. Trois choses comptent dans la vie : le rire, l'orgasme et la méditation. Il faut vider son cerveau qui nous empêche de vivre au présent. Il convient de rejeter la pensée qui nous éloigne de l'immédiat. la formule "Je pense donc je suis" est la catastrophe pour l'humanité
Atelier de la plus grande peur, discours sur la musique des étoiles, sur le jardin créatif où l'on commente positivement le selfi de chacun. Conférence : chaque homme doit augmenter sa part féminine et chaque femme sa part masculine. Pour cela, la soirée cabaret propose aux hommes de s'habiller en femme et inversement et d'échanger pareillement les codes de séduction.
Lily tente de séduire Arnaud mais se heurte à la concurrence de Dominique. Lors de la soirée danse en forêt, c'est avec elle qu'il repart la laissant désespérée. Bruno tente de la draguer mais elle persiste à vouloir draguer Arnaud notamment avec la séance de méditation avec contacts des mains.
Pour filmer sans censure de la part des raëliens, Alain Della Negra et Kaori Kinoshita ont pris le parti de leur déclarer qu'ils allaient tourner une fiction au sein de leur séminaire d'été. Respectant la partie créative de ce travail, Raël et les raëliens ont laissé filmer avec bienveillance. Cette bienveillance est aussi dans le regard des réalisateurs. Les quatre acteurs et même un membre de l'equipe technique, ravi d'avoir joué à jouer à la femme, ne font que mimer avec un peu plus d'entrain des comportements que les réalisateurs avaient observé durant les deux stages d'été (2011 et 2014) qu'ils avaient pratiqué avant celui du tournage.
Tout comme Second life, qui a fait l'objet du premier film des réalisateurs, les raëliens sont une secte sur le déclin. Difficile de donner 10 % de ses revenus, voire sa virginité quand on est femme, pour cet homme qui prétend construire une ambassade pour accueillir les extra-terrestres qui lui ont communiqué la bonne nouvelle de leur présence mais sont maintenant trop peureux pour revenir sur terre. Cet optimisme envers un hédonisme sectaire a bien du mal à survivre à l'heure des réseaux sociaux et des sites de rencontre. La principale activité des adeptes est de croire en une renaissance par le baptême, non montré ici, ou par l'amour (déclarations de fiançailles et mariages ritualisés par décalque sur les rites chrétiens) au sein d'une nature grandiose et idyllique.
Ce qu'ont saisi les réalisateurs, c'est le pathétique de la situation, vouloir le bonheur à tout prix alors que, comme dans la vie réelle, il dépend d'un marché de la séduction bien codifié, une extension du domaine de la lutte, que ces hommes et femmes plein d'espoirs, les bronzés chez les raëliens, tentent d'oublier dans les fadaises débitées par leur gourou.
Jean-Luc Lacuve le 28/06/2017