Jean-Louis Comolli |
||
(1941-2022) |
||
30 films | ||
3 | ||
Né à Skikda, en 1941, Jean-Louis Comolli fut d'abord animateur du ciné-club d'Alger avant d'écrire aux Cahiers du cinéma de 1962 à 1978.
Jean-Louis Comolli découvre le cinéma dans les ciné-clubs d’Alger, puis à Paris. Au début des années 1960, il fréquente, avec son ami Jean Narboni, les cercles de la cinéphilie parisienne la plus exigeante. Il commence à écrire aux Cahiers du cinéma en 1962. Il y exalte les grands artistes du cinéma américain désormais en fin de carrière, tels John Ford ou Howard Hawks. En 1966, il défend, dans un superbe texte, le film Ligne rouge 7000, de Hawks, qui ne fait pas, loin de là, l’objet d’une unanimité critique.
Cette admiration des grands auteurs hollywoodiens se nourrissait des nouveaux concepts que les sciences humaines, en pleine effervescence, engendraient alors. Comolli, fidèle à une exigence que s’est imposée la revue, se passionne pour ce que l’on appelle les « jeunes cinémas », l’émergence, dans le monde, de cinématographies nouvelles, d’une génération naissante de metteurs en scène, loin des grands centres industriels de la production cinématographique.
Parallèlement à son activité de critique cinématographique, il collabore à la revue Jazz magazine, s’intéressant aux évolutions de ce que l’on a appelé le free-jazz, une musique qui devenait plus libertaire, plus radicale, en phase, peut-être, du moins est-ce comme ça qu’elle était fantasmée, avec les mouvements sociaux et raciaux d’une époque qui s’embrasait.
Comolli devient rédacteur en chef des Cahiers du cinéma en 1966. Il accompagne un virage de la revue de plus en plus théorique. C’est une époque de profonde remise en question d’un médium dont on interroge la nature intrinsèquement politique. Dans une série de textes regroupés sous le titre Technique et Idéologie, Comolli tente de dévoiler l’historicité des mécanismes et des figures de rhétorique dans la mise en scène cinématographique, démentant toute idée d’une illusoire neutralité de la technique.
Il suit et accompagne l’évolution des Cahiers du cinéma vers une ligne maoïste. C’est le temps des querelles, des répudiations, des amitiés brisées aussi. En 1971, il coécrit avec Philippe Carles Free-Jazz Black Power (réédité en 2000 chez Gallimard, « Folio »), affirmation de la nature révolutionnaire des nouvelles formes de la musique noire opposée à une présumée dimension conservatrice du jazz dit « classique » et de ses structures (les grands orchestres des années 1930 et 1940). L’ouvrage provoqua de nombreuses discussions dans le milieu des amateurs.
Avec le reflux idéologique du milieu des années 1970, Jean-Louis Comolli passe à la réalisation de films. Il avait déjà cosigné avec André S. Labarthe, en 1968, Les Deux Marseillaises, chronique de la campagne des législatives de 1968 à Asnières, formidable documentaire qui prenait, peut-être sans le savoir vraiment, acte d’un retour à l’ordre profond de la société française. La Cecilia, en 1975, raconte l’échec d’une communauté anarchiste au Brésil au XIXe siècle. L’Ombre rouge, en 1981, évoque la guerre d’Espagne, vue du côté des agents du Komintern et des anarchistes. Balles perdues, en 1983, est une comédie policière, échec commercial qui l’éloigne de la fiction.
Comolli se tourne dès lors vers le documentaire politique. A partir de 1989, il entreprend notamment une série de films sur la vie politique à Marseille : Marseille de père en fils, Marseille en mars, Marseille contre Marseille, etc. Modèles de documentaires, sachant mêler la captation et le didactisme, les films de Comolli s’interrogent sans cesse sur la nature manipulatrice des images et tentent de donner au spectateur les armes pour en prendre conscience.
Comolli n’avait, par ailleurs, jamais cessé une activité d’essayiste et de théoricien avec des ouvrages comme Cinéma contre spectacle (2009), Voir et Pouvoir (2004) et Daech, le cinéma et la mort (2016), tous parus aux éditions Verdier. Il faisait partie de cette génération qui se sera peut-être nourrie de ses années de formation purement cinéphilique pour s’interroger, en fin de carrière, sur la nature des images contemporaines, au risque de se défier, désormais, de la notion même de spectacle.
Il décéde le 19 mai 2022, à l’âge de 80 ans.
Source : Jean-François Rauger, Le Monde du 20 mai 2022
Filmographie :
1968 | Les deux marseillaises |
Avec : René Andrieu, Albin Chalandon, Claude Denis, Roger Hanin, Jean-François Revel (eux-mêmes). 1h50.
À l’occasion de la campagne électorale pour les élections législatives de juin 1968 à Asnières, ce documentaire filme au jour le jour les élections marquées par les événements de Mai 68. |
|
1969 | Comme je te veux |
1975 | La Cécilia |
Avec : Massimo Foschi (Giovanni Rossi), Maria Carta (Olimpia), Vittorio Mezzogiorno (Luigi),
Mario Bussolino (Ernesto Lorenzini), Bruno Cattaneo (Longhi), Piero di Jori (Alfredo), Beppe Loparco (Enzo). 1h53.
A la fin du XIXe siècle, des anarchistes italiens, dix hommes, une femme, libertaires, collectivistes, émigrent au Brésil pour y fonder une communauté sans chef, sans hiérarchie, sans patron, sans police, mais pas sans conflit, ni passion. |
|
1978 | Toto, Antonio de Curtis |
Ce long-métrage est composé principalement de larges extraits des films dans lesquels a joué le grand acteur comique italien de 1937 à 1967. | |
1981 | On ne va pas se quitter comme ça |
L’un des derniers bals musettes de Paris, la Boule Rouge. Là, tous les après-midi, tous les soirs, des femmes et des hommes se retrouvent pour danser. Ils sont à la retraite, ils dansent. | |
1981 | L'ombre rouge |
Avec : Claude Brasseur (Anton Kovetz), Jacques Dutronc (Léo), Nathalie Baye (Anna), Andréa Ferréol (Magda), Alexandre Arbatt , Lev Belsky (Soudrov), Jean-Jacques Biraud , Facundo Bo (Müller). 1h50. Avril 1937. Les troupes franquistes marchent sur Madrid. Dans le camp républicain, le manque d'armes se fait sentir. Un vaste réseau orchestré par les services secrets soviétiques se met alors en place dans toute l'Europe. Anton, agent de Staline, contrôle le secteur parisien. Une nuit, il est arrêté et tombe aux mains de la Gestapo. Léo, le chef du réseau européen, obtient, avec l'appui et l'accord du " Centre ", la libération de son vieil ami qu'il transfère à Marseille. Placé à la tête d'un entrepôt de commerce, couverture idéale pour un trafic d'armes, Anton comble la curiosité de sa jeune secrétaire, Anna, en lui révélant ses activités. À Moscou, Staline ordonne de nouvelles directives; les armes sont désormais réservées aux seuls communistes. Anton se résigne à appliquer ces consignes. Le " Centre " charge Léo de rapatrier tous les agents en poste à l'Ouest... les purges viennent de commencer, mais Léo l'ignore encore. Soupçonneux, Anton refuse de retourner à Moscou malgré la demande de Léo. Désabusé, traqué, Anton se suicide. Léo comprend alors et décide de fuir avec Anna. À leur tour, ils sont menacés par les hommes du " Centre". |
|
1983 | Balles perdues |
Avec : Andréa Ferréol (Maryvonne), Maria Schneider (Vera), Serge Valletti (Sam Witchner), Capucine Capucine (Madam Teufminn), Charles Millot (Mister Teufminn), André Dupon (Éric), Micky Sébastian (Natacha). 1h31.
Lorsque son patron, Teufrninn, un riche diamantaire, est assassiné dans son bureau après avoir été dépouillé de ses trésors, la bonne, Maryvonne, férue de romans noirs, s'en remet à Sani Witchner, qu'elle prend pour un détective privé parce qu'elle a vu son nom sur une pochette d'allumettes, imprimée autrefois, en pure fantaisie par ce dernier. Croyant à une plaisanterie, Sam recommande à Maryvonne de lui amener le cadavre dans une malle en osier. Ce qu'elle fait ! Piqué au vif, voilà bientôt Sam à la poursuite du meurtrier, malgré son mariage prévu dans quelques jours avec Véra, très inquiète des mystères de son compagnon. La disparition du corps et des diamants affecte en réalité deux équipes adverses qui croient s'être fait doubler par une troisième. Il s'agit, pour la première, de la femme du diamantaire, complice d'Eric, le chauffeur, et pour la seconde, de Natacha, maîtresse de la victime, alliée à Ludovic, un musicien, et à Johnny, un peintre sourd-muet; tous également persuadés que Maryvonne et Sam sont responsables du vol et donc déterminés à les combattre. Errant de piste en piste, sans rien comprendre à l'affaire, Sam, sur la foi d'un recoupement, assiste avec Véra à un spectacle de Ludovic pendant lequel Johnny est tué et a tout juste le temps d'esquisser à son endroit quelques gestes énigmatiques pour désigner son meurtrier. Maryvonne élucide le mystère au vu d'une émission de télévision pour malentendants et en saisit la signification : "La femme à l'avion ", titre d'un tableau peint par Johnny pour Teufminn, pour lequel elle découvre avec stupeur que Véra a posé... Sur ce, elle manque être tuée par celle-ci mais retrouve Sam à temps pour se tirer de ce mauvais pas. |
|
1986 | Le bal d'Irène |
|
Avec : Bofi Banengola (Paul), Francine Bergé (Mme De Sarcey), Liza Braconnier (Mme Cigot), Anne Brochet (Irène), Cendrine Chatrefou (Chantal), Clovis (Charles), Marianne Denicourt , Bernard Freyd (M De Sarcey), |
1987 | Pétition |
(TV) | |
1988 | Kataev, la classe du maître |
Le chef d’orchestre russe Vitali Kataev, professeur au conservatoire de Moscou, est venu au conservatoire de Paris offrir le fruit de son expérience. Jean-Louis Comolli a suivi ces quelques jours de travail. | |
1989 | Marseille de père en fils - Coup de mistral |
La campagne des élections municipales de 1989 à Marseille. Premier film de la Série « Marseille fait son cinéma » (1989- 2001) de Jean Louis Comolli et Michel Samson. | |
1989 | Marseille de père en fils - Ombres sur la ville |
« Comme la ville égare le promeneur, explique Jean-Louis Comolli, elle fuit le regard du cinéaste qui a la naïveté de croire qu’elle s’offre à lui, qu’elle l’attend, qu’elle se fige au moment où il dit « moteur ». Deuxième film de la Série « Marseille contre Marseille » (1989- 2001) de Jean Louis Comolli et Michel Samson | |
1991 | Naissance d’un hôpital |
Télfilm produit par l’INA et Arte France. 0h67.
L’hôpital Robert Debré, cet immense vaisseau ancré dans un méandre du périphérique parisien, est l’œuvre de Pierre Riboulet. Ce documentaire reprend le journal intime tenu par l’architecte alors qu’il concourait sur le projet. De la première esquisse à la maquette, nous suivons cette gestation qui est aussi l’occasion pour le créateur de méditer sur la beauté face à la maladie, l’art face à la mort. Pendant 5 mois, de mai à octobre 1980, l’architecte tient le journal de son travail. On y assiste à la naissance sur le papier d’un hôpital d’un type nouveau. À sa manière, un tel témoignage évoque un récit d’aventures : pour son auteur, il s’agit de se livrer à une course d’obstacles (fonctionnels, économiques, techniques, esthétiques), avec, à l’horizon, la création d’un lieu de vie, ouvert à la ville et à la lumière, capable de surmonter l’angoisse. C’est la première fois qu’un architecte communique ainsi le cheminement de son travail, en décrivant, à partir d’un projet précis, son processus de création. Jean-Louis Comolli a adapté cinématographiquement le journal de l’architecte. On y voit Pierre Riboulet au travail : dessins, esquisses, plans… Le texte du journal est dit par l’architecte. |
|
1992 | La campagne de Provence |
De juin 1991 à mars 1992, neuf mois d’une bataille politique violente et angoissante, en Provence, à l’occasion des élections régionales. Troisième film de la Série « Marseille contre Marseille » (1989- 2001) de Jean Louis Comolli et Michel Samson. | |
1993 | Marseille en mars |
Mars 1993, Marseille, les élections législatives, quatrième film de la Série « Marseille contre Marseille » (1989- 2001) de Jean Louis Comolli et Michel Samson. | |
1993 | La vraie vie (dans les bureaux) |
Téléfilm produit
par 13 Production et Arte France. 1h17.
Laction se passe à la Caisse dAssurance maladie de lIle-de-France, la CRAMIF ; doctobre à décembre 1992, Jean-Louis Comolli a tourné dans les services « Invalidité » et « Tarifications accidents du travail », ainsi quau courrier, au pool dactylo et aux archives. Cette « vraie vie » nest rien dautre que la vie réelle, bien réelle, huit heures par jour dans les bureaux de celles quon a appelées les « O. S. du tertiaire ». Femmes dabord, embauchées jeunes, sans avoir pour la majorité dentre elles changé de case, sans autre espoir que lillusion de lespoir, sans autre perspective pour les plus agiles que daménager un peu, si peu, le temps et lespace de leur travail. Essentiellement composé dinterviews, que ponctuent de longs travellings dans le dédale des couloirs et des différents services administratifs, ce passionnant reportage « in situ » donne la parole à ces employé(e)s anonymes, qui évoquent, avec enthousiasme, humour ou amertume, leur travail et leur vie quotidienne dans les bureaux. |
|
1994 | Jeune fille au livre |
Spécialement conçu pour l’image, « La Jeune Fille au livre » est un opéra qui raconte la passion destructrice entre un peintre et son modèle. Autour d’une toile, dans les coulisses du marché de l’art, va se jouer un drame philosophico-policier. | |
1995 | Georges Delerue |
(TV) Cet hommage à Georges Delerue est composé de témoignages de réalisateurs qui ont choisi sa musique pour leurs films, et d’extraits du « Mépris », « Tirez sur le pianiste », « Les Deux Anglaises et le continent », « Love »… | |
1995 | Entrée école sortie cinéma |
En quatre parties distinctes, la présentation de quatre écoles renommées de cinéma. | |
1996 | Marseille contre Marseille |
Marseille, élections municipales de 1995. Cinquième episode, en forme de fable politique, d’une saga marseillaise commencée en 1989. | |
1997 | Cinéma de notre temps : Chahine & Co. |
|
Documentaire. 0h53. |
1997 | Le concerto de Mozart |
Michel Portal a fait le projet un peu fou de s’isoler pendant quinze jours dans un château, en compagnie de sept jeunes musiciens, pour prendre le temps et le plaisir de travailler en profondeur le célèbre concerto pour clarinette de Mozart. Jean-Louis Comolli est le témoin de ce défi. | |
1997 | La question des alliances |
La Droite et l’Extrême Droite aux législatives 1997 dans les Bouches-du-Rhône. Sixième film de la Série « Marseille contre Marseille » (1989- 2001) de Jean Louis Comolli et Michel Samson. | |
1998 | Jeux de rôles à Carpentras |
1990 : profanation du cimetière juif de Carpentras. Sans refaire le « procès Carpentras », Jean-Louis Comolli pointe les contradictions, les doutes, et nous donne les clés d’une affaire complexe, à l’enjeu politique national. | |
2000 | Durruti, portrait d'un anarchiste |
|
Une évocation de l’anarchiste espagnol, Buenaventura Durruti et des années 1931-1936 qui précédèrent la guerre civile en Espagne, à travers les répétitions d’un groupe théâtral catalan « El Joglars » dirigé par Albert Boadella. |
2001 | Rêves de France à Marseille |
Avec : Michel Samson (L'interviewer), Salah Bariki, Rebia Benarioua, Samia Ghali, Jean-Noël Guérini, Nordine Haggoug, Zoubida Meguenni. 1h44. Marseille, juin 1999. Jean-Claude Gaudin organise une grande fête populaire, 'la Massalia', pour exalter toutes les communautés qui font Marseille et manifester l'envie de ces milliers de gens venus d'ailleurs de se monter Marseillais. Moins d’un an plus tard, en mars 2000, s'ouvre la campagne des municipales 2001 : cet esprit d'ouverture et de tolérance trouve-t-il sa traduction dans la sphère politique ? Combien d’enfants de l'immigration figureront en position éligible et seront finalement élus parmi les 101 conseillers municipaux ? En suivant les mésaventures de Tahar Rahmani, conseiller municipal sortant et d'autres militants et cadres politiques issus de l’immigration, ce documentaire montre l’écart cruel qui s’est creusé entre l’idéal républicain et les pratiques partisanes. |
|
2001 | L'affaire Sofri |
Ce film est né de la lecture d’un livre, Le Juge et l’Historien, de Carlo Ginzburg à la suite du premier procès du leader d’extrême gauche Adriano Sofri et de ses camarades, en 1991. Avec Carlo Ginzburg, Jean-Louis Comolli, s’appuyant sur le cas Sofri, analyse ici le travail du juge, explore les rapports entre le droit, l’histoire et la raison d’État. | |
2001 | Nos deux marseillaises |
C’est l’histoire de Nadia et Samia, femmes d’origine maghrébine, militantes associatives, qui incarnent une manière nouvelle de faire de la politique aux cantonales 2001. | |
2003 | Jours de grève à Paris Nord |
|
En décembre 95, il y avait des grèves. Sept ans ont passé. Les jours de décembre se sont éloignés à toute vitesse, point brillant au fond de quel tunnel ? Cinq cheminots sont au coeur du film tourné à l’antenne traction de Paris-Nord. Des luttes d’hier aux luttes d’aujourd’hui, le film sera-t-il passeur de la réflexion ?; |
2004 | Les ésprits du Koniambo |
|
(TV) |
2005 | Le peintre, le poète et l'historien |
|
(TV) |
2006 | La dernière Utopie - La Télévision selon Roberto Rossellini |
|
Roberto Rossellini se détourne du grand écran pour se consacrer tout entier à un pharaonique projet pour la télévision. Il s’agit de mettre en image toute l’aventure humaine de la préhistoire à la conquête de l’espace. Extraits de films, conversations et rencontres avec des collaborateurs, des techniciens se répondent pour retracer l’histoire d’une idée humaniste et généreuse. |