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Cécile, une cheffe parisienne, gagnante de l’émission Top Chef, s’apprête à ouvrir un restaurant gastronomique avec Sofiane, son compagnon. Elle apprend que son père est hospitalisé après un infarctus et après avoir hésité décide de rejoindre le Grand Est, où ses parents, restaurateurs, sont patrons d’un « routier ». Surprise de voir son père debout dans sa cuisine, elle décide néanmoins de l'aider tout en s'alliant avec sa mère, Fanfan, pour tenter de le convaincre de prendre sa retraite. Fanfan, qui sert en salle, redoute néanmoins une cohabitation de tous les jours avec son mari, peu porté sur les voyages. Entre deux macédoine ou entrecôtes-frites, Cécile retombe sur son amoureux du lycée, Raphaël, aussi jovial que passionné de moto..
Partir un jour a d’abord été un court-métrage (du même nom) remarqué en festival, lauréat du César du court-métrage en 2023. Les rôles étaient alors inversés : Bastien Bouillon incarnait le Parisien, écrivain prometteur mais fragile. Le temps d’une soirée, dans sa ville natale, il retrouvait un amour de jeunesse au supermarché. Dans la version longue de Partir un jour, c’est la femme, et non plus l’homme, qui a réussi socialement.
Trois thématiques identiques
Les deux films jouent des trois mêmes ressorts dramatiques : "le parfum des regrets" pour une histoire qui aurait pu avoir lieu; un accord au sein de chacun des deux couples des deux protagonistes qui empêche que cette histoire ait lieu; le transfuge de classes plus ou bien moins vécu par celui ou celle qui est partie.
Le thème principal est traité de manière à peu près identique; la séquence de la patinoire remplace celle de la piscine avec un baiser échangé mais une fin brutale du fait de la peur, fort à propos, d'une fausse couche. La scène entre copains annonçait pourtant, par le chagrin évoqué de Raphaël au départ de Cécile, un possible embrasement qui n'a donc pas lieu. Le final enfantin de "la roue arrière" en moto remplace les seins montrés qui clôturait le court.
Ce sont ainsi les deux thèmes secondaires qui sont gonflés dans le long et qui étouffent le sujet central. L'évocation de la femme enceinte de Julien est développée par le personnage de Sofiane, compagnon parfait, compréhensif mais pas trop, et l'interrogation sur l'enfant à naître. Présent au début, au milieu et à la fin par le coup de fil qu'il reçoit sur sa messagerie, c'est Sofiane qui triomphe.
Le thème du transfuge de classe est actualisé : le prestige n'est plus dû à l'écriture d'un premier roman mais à la réussite à Top chef (triste époque). Les remarques du père, qui note toutes les remarques désobligeantes sur le milieu d'origine, sont toujours drolatiques et le personnage de la mère est étoffé. Pour preuve, les deux chansons les plus émouvantes sont interprétées par les parents. François Rollin avec Cécile, ma fille (Claude Nougaro, 1963) et Dominique Blanc, irrésistible de douceur et de fantaisie, dans une version remaniée de Paroles, Paroles (Dalida, 1973).
Les autres tubes peinent à relancer le récit des retrouvailles de la Parisienne et du provincial (en boîte de nuit, à la patinoire) alors que l'ancrage dans le monde des routiers est si superficiel qu'aucune chanson ne leur est consacrée.
Jean-Luc Lacuve, le 15 mai 2025