Durant des mois, Vincent Van Gogh s'efforce de fuir l'asile psychiatrique de Saint-Rémy-de-Provence où il avait été volontairement interné au mois de mai 1889. Il ne parviendra à le quitter qu'en mai 1890 pour trouver refuge auprès du Dr. Gachet, à Auvers-sur-Oise. Il y trouvera la mort deux mois plus tard, le 29 juillet 1890, à l'âge de trente-sept ans.
C'est durant ces longs mois d'attente à Saint-Rémy que Van Gogh peint La Ronde des prisonniers (1890) tirée du dessin de Gustave Doré, Newgate. La Cour d'exercice (1872), qui montre une file de prisonniers dans la cour de la tristement célèbre prison londonienne.
Newgate. La Cour d'exercice Gustave Doré,1872 | La ronde des prisonniers Vincent Van Gogh, 1890 |
La Ronde des prisonniers se réfère à l'enfermement subi par le peintre, et ses personnages évoquent le cercle d'aliénés solitaires qui l'entourent. Privé de ses marches picturales à travers le paysage provençal, en manque de modèles, pauvre en papier, toile et couleurs, Van Gogh se tourne vers la copie de photographies ou de gravures en noir et blanc que lui envoie son frère Théo. Il conçoit d'ailleurs ses copies comme des «interprétations » de l'œuvre originale, au même titre que celle donnée, grâce à la partition, par le chanteur ou l'instrumentiste.
Le peintre introduit de subtiles distorsions du point de vue, du cadrage, de la facture, pour transformer la gravure en un tableau où bleus et jaunes incarnent le noir et le blanc, l'ombre et la lumière. Dans cet aquarium verdâtre on reconnaît l'univers de l'asile d'aliénés de Saint-Rémy. Quant à l'homme aux bras ballants, au centre de la ronde, il s'affirme comme un autoportrait du peintre endossant les traits et le destin du condamné à mort.
La ronde des prisonniers Vincent Van Gogh, 1890 | Irma la douce Billy Wilder, 1963 |