Le duc Frederic de Montefeltre qui s'agenouille au pied du trône de la vierge est peint dans son armure de soldat mais sans les insignes attribués que le pape Sixte IV lui attribuera en 1475. L'absence de ces emblèmes, que Piero aurait certainement inclus dans un portrait officiel comme celui-ci, laisse à penser que le tableau date d'environ 1472-74.
Le fond architectural complexe et majestueux, dans laquelle à lieu la « conversation sacrée » est inspiré des conceptions d'Alberti mises en oeuvre dans l'église saint André dans Mantoue et de certains éléments classiques du jeune Bramante, autre artiste extraordinaire d'Urbino.
Ce tableau fait aussi la preuve de la maîtrise de l'artiste dans l'utilisation des proportions. Elle est symbolisée par le grand oeuf d'autruche pendant de la coquille de l'abside. L'ovale parfait de cet élément symbolique fait écho à celui, proche, de la tête de la Vierge, placée au centre de la composition. Il pourrait symboliser la fécondité car le duc venait d'avoir un fils et rendrait ainsi un hommage indirect à sa femme qui tient l'enfant. L'oeuf d'autruche est aussi l'un des symboles de la résurrection et peut-être le duc a commandé ce tableau sachant qu'il serait transféré dans son mausolée.
Le point de fuite du tableau est exceptionnellement élevé, au niveau des visages ce qui a pour résultat de rendre moins monumentaux les personnages placés en demi-cercle.
Jean-Luc Lacuve, le 18 août 2018