Dès 1899, avec la série des Nymphéas, Monet oriente son œuvre vers une recherche inédite en s'attachant à un motif qui deviendra comme une signature. Ayant achevé en 1900 la série du pont japonais, l'artiste entreprend de se consacrer à l'étang fleuri de nénuphars. D'abord par intermittence, quand il ne travaille pas à sa série consacrée au Waterloo Bridge, puis de façon continue à partir de 1904, il se lance dans une grande série consacrée à ce thème. Du printemps à l'automne, l'artiste, installé au bord de l'étang, traduit simultanément sur plusieurs toiles des sensations qu'il reprendra ensuite à l'atelier. Les Nymphéas du MuMa, peints en 1904, font partie d'un ensemble de quarante-huit tableaux intitulés « Les Nymphéas, séries de paysages d'eau », exposés à la galerie Durand-Ruel à Paris en 1909.
De format carré, cette peinture met l'accent sur les possibilités décoratives de la couleur. Le cadrage élimine quasiment toute référence topographique pour évoquer un infini en perpétuel mouvement. Après avoir façonné la nature, inventé un lieu, un espace propre à sa peinture, Monet va inlassablement, pendant vingt-sept années, décliner ce motif. Le jardin de Giverny devient un laboratoire qui aboutit à une véritable transformation du paysage, où la couleur prend le pas sur la forme. L'œuvre annonce ainsi les prémices de l'abstraction qui sera développée par les artistes de l'école de New York après la Seconde Guerre mondiale.