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Le peseur d'or et sa femme

1514

The Moneylender and his Wife
Quentin Metsys, 1514
Huile sur bois, 70 x 67 cm
Paris, Musée du Louvre

Les deux personnages sont présentés à mi-corps, assis derrière une table, dans un cadrage serré qui leur donne une grande présence. Leur position les place en parfaite symétrie. L'homme devant lequel s'étalent des perles, des bijoux et des pièces d'or est occupé à peser ces richesses, activité qui distrait son épouse de la lecture d'un livre saint, où l'on reconnaît une représentation de la Vierge et l'Enfant.

Dans le miroir placé au premier plan, procédé courant dans la peinture flamande et qui permet de créer un lien avec l'espace extérieur de la toile, se reflète un personnage devant une fenêtre. Sur la droite, une porte entrouverte laisse voir un jeune homme et un vieillard qui discutent.

Le tableau est aujourd'hui plus volontiers nommé le peseur d'or et sa femme mais aussi prêteur et sa femme ou même Le changeur d'argent et sa femme. La ville d'Anvers connaît à cette époque une activité commerciale considérable et devient rapidement le principal lieu d'échange entre le Nord et le Sud. On y croise des marchands portugais et espagnols ainsi que les puissants banquiers italiens. Cette activité frénétique fait de la ville le centre financier le plus important d'Europe. La conséquence de la présence d'une communauté internationale de marchands utilisant diverses monnaies est l'ouverture de nombreuses boutiques de changeurs et de prêteurs dans les lieux les plus fréquentés par les étrangers, comme Bruges et surtout Anvers.

Le changeur d'argent et sa femme est un exemple précoce de la peinture de genre qui épanouir en Flandre et le nord des Pays-Bas au cours du 16ème siècle : paysage, portrait et scènes de la vie quotidienne. Les artistes dénoncent, par des représentations moralisatrices de la vie quotidienne, les vices de l'humanité et l'aspect éphémère de la vie. C'est précisément ces aspects qui sont mis en valeur dans le tableau de Metsys considéré comme l'un des initiateurs du genre. Ici, l'attrait de l'or, des perles (symbole de la luxure) et des bijoux disposés devant son époux détourne la femme de ses occupations spirituelles : la lecture des textes saints. Les objets disposés à l'arrière-plan sont soigneusement choisis et renforcent l'aspect moral de la composition. Sur l'étagère, la petite boîte en bois représente un écrin dans lequel la divinité se serait cachée. Le fruit est une allusion au péché originel et, voué à la pourriture, renvoient à la mort, symbolisé par la bougie éteinte. La carafe d'eau et le chapelet suspendu à l'étagère symbolisent la pureté de la Vierge. 

En insérant ce qui est vraisemblablement son autoportrait dans le miroir convexe Massys rappelle l'utilisation de cet objet par Jan van Eyck dans Le Mariage Arnolfini de 1434. Tout pareillement, l'habit de l'épouse Arnolfini est très proche de celle du peseur d'or. Peut-être Metsys contemple-t-il depuis son miroir le basculement entre une époque encore pétrie de valeurs morales vers celle beaucoup plu rude et sanglante qui va suivre et que préfigurent peut-être, au loin, les deux personnages qui se disputent.