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La vie dure

1946

La vie dure
Nicolas de Staël, 1946
Huile sur toile 142 x 161 cm
MNAM, Paris

Au début des années 1940, Nicolas de Staël, installé à Nice, forge peu à peu son style. Il délaisse la peinture figurative et, selon l’expression de Jeannine Guillou, sa compagne peintre, « choisit l’abstraction » au contact de Magnelli et de Domela. De retour à Paris en 1943, il construit ses œuvres en superposant des formes flottant sur un fond neutre, et rythme la toile par la multiplication des obliques et l’usage de l’arabesque.

À partir de 1945, Staël se jette dans une peinture sombre et lourde, déchirée par des éclairs de lumière surgis des profondeurs de la toile. Illustrant significativement cette période de misère – mort de sa femme, pas de vrai atelier –, La Vie dure (cat. rais. 2, n o 90), terminée en octobre 1946, en est l’un des exemples les plus significatifs, ainsi que l’écrit alors le critique Pierre Courthion qui « ne sai[t] meilleur autoportrait de l’artiste à ce moment que cette peinture faite d’une accumulation de difficultés » pour un « équilibre sans cesse à reprendre » (cat. rais. 2, p. 849). Roger van Gindertael souligne également, dans la première monographie de 1951, l’inquiétude violente qui paraît mettre en mouvement les toiles de cette époque : « Les éclats, les brisures, les cassures, les coulées, les méandres tracent la nerveuse écriture d’un grand poème symphonique dont la règle composante est toujours désaccords, désharmonie, et le thème, la vie mouvante, la vie dure » ( Nicolas de Staël , Paris, Gindertael, 1951). Le principe unificateur de l’échelle est ici utilisé pour équilibrer l’asymétrie des deux espaces parcourus par des lignes transversales, qui nous entraînent dans les profondeurs de la toile et posent le problème du rapport de la figure au fond : « Un tableau, explique Staël à Gindertael, c’est organiquement désorganisé et inorganiquement organisé » (lettre à Gindertael, 27 juillet 1950, à propos de l’article « Nicolas de Staël », Art d’aujourd’hui , n o 10-11, mai-juin 1950). L’œuvre, acquise dès 1946 par la galerie Louis Carré, entre dans les collections du Musée juste avant la première rétrospective de 1981.


Bénédicte Ajac; Extrait du catalogue Collection art moderne - La collection du Centre Pompidou, Musée national d’art moderne , sous la direction de Brigitte Leal, Paris, Centre Pompidou, 2007