De Staël aimait la musique, les titres de ses tableaux le rappellent. Les Musiciens, souvenir de Sydney Bechet, 1953, est un hommage au célèbre compositeur de jazz. Deux grandes toiles, intitulées Les Indes galantes, 1953, sinspirent de lopéra ballet les Indes Galantes de Rameau qui, après deux cents ans, était repris au palais Garnier le 18 juin 1952.
Inspirée par des uvres de Webern et de Schoenberg, entendues à Paris le 5 mars 1955, cette toile immense, où seules figurent, sur un fond rouge, la masse sombre dun piano et celle ocre délavée dune contrebasse entre une multitude de pupitres et de partitions dun blanc-gris diaphane, fait retentir la dimension du silence.
Dans La Peinture cubiste, Jean Paulhan remarque quen anglais les natures mortes sappellent silences. Ce temps suspendu et irrévocablement mort, ce temps darrêt et de silence si propre à ce genre pictural, Staël le fait étrangement sentir dans cette uvre qui sappelle Concert. Un concert qui nest quune présentation dinstruments silencieux dans un espace doù toute présence humaine est bannie, où le temps sest arrêté, et où seule vibre la couleur, avec ses coulures, lépanchement de locre jaune de la contrebasse sur le blanc qui lentoure, les réserves de blanc autour de la silhouette noire du piano : la peinture dans sa dimension de silence.