De Sienne à Florence... Les Primitifs Italiens.
Collection d'Altenbourg Tlj de 10H00 à 18H00 |
Constituée entre 1840 et 1850, la collection des primitifs italiens du baron Lindenau, aujourdhui conservée au Musée dAltenbourg propose un ensemble unique de panneaux peints entre la fin du XIIIe siècle et le début du XVe siècle.
Cette collection de primitifs italiens fut constituée au début
du XIXe siècle par le baron allemand Bernard von Lindenau (1779-1854).
Homme politique, amateur dart et philanthrope, Bernard von Lindenau
ouvra en 1848, dans sa ville natale dAltenbourg, au sud de Dresde, une
vaste demeure de style classique afin dy exposer ses collections duvres
dart et de favoriser laccès du plus grand nombre à
la culture « pour léducation de la jeunesse et le plaisir
des anciens ».
Avec la réunification allemande et la fin du régime communiste,
les chercheurs occidentaux ont pu accéder de nouveau à cet ensemble
unique tombé dans loubli. La valeur exceptionnelle de cette collection
a été, alors, confortée par lorganisation de deux
grandes expositions en Italie.
Une cinquantaine de ces uvres, toutes réalisées par les plus grands maîtres de la pré-Renaissance et de la première Renaissance italienne sont réunies à loccasion de cette exposition.
Parmi les uvres venues dAltenbourg, certaines proviennent de polyptyques aujourdhui dispersés. Lexposition sera loccasion de reconstituer, en grande partie, certains dentre eux, grâce aux prêts de grands musées français, allemands, anglais et italiens. Parmi ces ensembles, on remarquera, en particulier, une série duvres de Fra Angelico sur la vie de Saint François.
Lexposition scénographiée par Hubert Le Gall met en
lumière la succession des grands courants esthétiques qui transforment
en profondeur lart italien entre la seconde moitié du XIIIe siècle
et la fin du XVe siècle. Le style grec et linfluence byzantine
dun côté et lapparition du style moderne à
la suite de Giotto et lépanouissement du style gothique international
de lautre, laisse progressivement place au style renaissant.
LÉcole siennoise
Si les premières salles sont consacrées à lécole
siennoise, cest en raison de leur ancienneté et du nombre de
panneaux de la collection dAltenbourg qui lui reviennent.
Salle 1 : fin du XIIIème et première moitié du 14eme
Le parcours commence avec une série de compositions représentant différents épisodes de la Vie du Christ, formant le décor dun grand retable dautel. Ces peintures sont aujourdhui attribuées à Guido da Siena, et relèvent de ce style «byzantin » qui caractérise cette époque (vers 1280).
Les uvres de Guido da Siena sont encore marquée par l'influence greco-byzantine mais, au début du XIV, Sienne se met à l'heure gothique. Sont regroupées diverses partie de la prédelle d'un retable de Montalcino représentant les grandes scènes de la vie du Christ. Dans le Christ mis en croix apparaît un début de narration, le christ monte volontairement vers la croix.
L'adoration
des mages Guido da Siena, Vers 1270-1280 Tempera sur panneau de bois, 33,9 x 46 cm |
Elles sont suivies par un ensemble reconstitué, formant à lorigine un polyptyque, aujourdhui donné à Lippo Memmi, lalter ego de Simone Martini, et tous deux figures de proue de cette école au cours des années 1320. Sont présentés une scène avec deux saint moines et saint Jean-Baptiste et le panneau d'Avignon avec la figure de Marie Madelaine
Sainte
Marie Madeleine Lippo Memmi Musée du Petit Palais, Avignon |
La vierge a l'enfant est pleinement gothique. Il s'agit du volet gauche d'un diptyque regard de la vierge pointe vers le panneau manquant. uvre signée. Abondance des étoffes précieuses pour marquer la majesté et douceur.
Vierge
à l'enfant Lipo Memmi, Vers 1320-1322 Tempera sur panneau de bois, 51 x 34,3 cm |
En regard, lexceptionnel Christ de douleur de Pietro Lorenzetti propose une vision privée de la dévotion religieuse et par lillusionnisme de sa représentation, il offre également une alternative à la vision gothique de ses contemporains.
Le
Christ de douleur Pietro Lorenzetti, Vers 1330 Tempera sur panneau de bois 32 x 52 cm |
Salle deux :
Cette orientation nest cependant pas suivie par les artistes de cette génération, et dAndrea Vanni à Paolo di Giovanni Fei, on assiste au triomphe de cette expression, souvent qualifiée de style gothique international. Andréa Vanni possédait un atelier important. Peintre recherché, il est présenté ici le Ssaint François d'Assise et le Saint Jacques le majeur conservé à Naples comandé par la reine Jeanne d'Anjou.
St
Jacques le majeur Andrea Vanni, Vers 1355 Tempera sur panneau de bois Musée national de Capodimonte, Naples |
Vierge majesté Angello Puccinnelli associe les images d'Eve et de la vierge qui participe à la Rédemption.
Salle trois
La première moitié du XVe siècle est représentée par un groupe dartistes, de Giovanni di Paolo à Sano di Pietro dont les oeuvres, toujours issues de cette production religieuse, exaltent et la richesse chromatique et la qualité expressive, puis on découvre vers 1450, une nouvelle aspiration à un réalisme plus formel ou à une ampleur également décorative qui trouvent sa meilleure illustration dans la production dun Pietro di Giovanni di Ambrogio dont on reconstitue ici lun des polyptyques.
Mateo di Giovanni : saint Nicolas avec trois boules dans la main droites selon la tradition méridionale et non avec les trois enfants au saloir tels qu'ils ont été connus par la tradition des pays du Nord. Aspect novateur, c'est un portrait, celui du pape Nicolas V
Salle 4 : Giovani di Paolo
enlumineur comme peintre a fresque. Crucifixion et deux autres panneaux prêtés par la pinacothèque du Vatican. Le christ a jardin des oliviers et la lamentation. Maître de l'expression, la vierge est terrassée par la douleur. Teintes vives et palette acidulée. peintre de la passion mais exprime aussi des sentiments de douceur
Vierge à l'enfant encadrement floral : les deux illets rouges de l'amour divin et les deux lys bleus du Christ et du paradis
Salle cinq: Sienne, seconde moitié du XVeme
les oeuvres de Sano di Pietro présentée ici proviennent d'une prédelle narrant la vie de la vierge et sont associéesà des scènes provenat du musée du Vatican. L'Assomption est peinte sur fond d'or alors que les autres panneaux intègrent un fond de paysage
Joseph retourne à Bethlem pour veiller aux préparatifs du mariage, la vierge se retire un temps auprès de ses parents. Sainte Anne et saint Joachim l'accueillent à l'entrée de la maison natale. Les membres de la maisonnée sont massés sous le porche. Marie est accompagnée d'un cortège de six vierges. Derrière elle, une foule se presse dans la ruelle.
Marie
revenant du temple Sano di Pietro 1448-1452 Tempera sur panneau de bois, 31,7 x 47,4 cm |
|
L'assomption
de la vierge Sano di Pietro, 1448-1452 Tempera sur panneau de bois, 31,6 x 47,2 cm |
De Pietro di Giovani di Ambrogio sont présentés une bannière de procession prevenant du musée Jacqmard André et un saint Augustin.
La bannière représente sainte Catherine d'Alexandrie en gloire entourée des allégories de ses vertus. A gauche, la prudence tient un serpent. La foi soulève un calice et la tempérance est munie d'une épée. A droite, la charité brandit des flammes, l'espérance lève les bras au ciel et la force d'âme soulève une colonne.
Saint Augustin, apparition du modelé. La lumière le dessine avec des couleurs allant du ton crème clair au marron foncé.
St
Augustin Pietro di Giovanni di Ambrogio, Vers 1435-1440 Tempera sur panneau de bois, 96 x 36,9 cm |
salle 6 : fin du XV
En parallèle à ces derniers feux, une Vierge à lenfant de Liberale da Verone, exquise de délicatesse, ou lAdoration des mages de Michele di Michele Ciampanti (vers 1470) montrent quà la fin du XVe siècle, la vitalité de lécole siennoise a tendance à sépuiser dans des formules, certes brillantes (recherche du raffinement pour une clientèle privée peu attirée par l'avant-gardisme) mais néanmoins archaïques au regard des innovations qui apparaissent à Florence à la même époque.
La Vierge à l'enfant Liberale da Verone, ressemble aux icônes mais forte émotion : la mère presse sa joue contre celle de son enfant. Attention aux matières : dentelle et voile transparent.
Vierge
à l'enfant Liberale da Verona, Vers 1470 Tempera sur panneau de bois, 47 x 38 cm |
LÉcole florentine
La seconde partie de lexposition est consacrée à lécole
florentine. Elle présente des oeuvres dune très grande
qualité, même si elle nest peut-être pas aussi riche
que la précédente.
Bernardo Daddi en est le premier représentant. Entre 1320 et 1348, Bernardo Daddi est à la tête du plus important atelier de Florence. Il s'inspire de Giotto pour l' expression et la couleur.
Il est ici présent avec un groupe exceptionnel de trois oeuvres, un Couronnement de la vierge, une Crucifixion et surtout un tryptyque portatif dont le panneau central montre une Vierge à lenfant sur un trône entourée danges et de saints. Ensemble, elles forment un résumé du grand atelier florentin, travaillant dans la suite de Giotto, avant que le passage de la grande peste ne décime ces artistes.
les animaux entourant Saint jean l'évangéliste ont tous uen signification : le canard symbolise le mécréant car il se nourrit seulement de choses mortes; le lièvre, l'homme faible qui fuit...
Triptyque
avec la Vierge en majesté Bernardo Daddi, 1340-1345 Tempera sur panneau de bois 58,9 x 26,8 |
La seconde moitié du siècle est illustrée par des peintres comme Nardo di Cione et surtout Agnolo Gaddi, marquant une nette inflexion du goût et du style vers la sensibilité gothique. La Cène de ce dernier (vers 1395) résume cette multiplicité dinfluences, le sens de lespace mais également le goût pour le détail narratif et lélégance descriptive.
La
cène Agnolo Gaddi, Vers 1395 Tempera sur panneau de bois, 61 x 41,5 cm |
Le passage du nouveau siècle marque lapothéose de ce courant avec son plus éminent représentant : Dom Lorenzo Monaco. Cet artiste exprime à son plus haut degré les raffinements de ce « gothique international ». Sa Fuite en Egypte (vers 1405-1410), dans un cadre quadrilobé et non rectangulaire, sinspire du modèle de Ghiberti au baptistère de Florence tandis que son coloris délicatement outrepassé résume le caractère de cet idéal courtois, bien loin du réalisme de lécole flamande.
La
fuite en Egypte Lorenzo Monaco, Vers 1405-1410 Tempera sur panneau de bois 39,4 x 24 cm |
|
Christ
en croix entouré de Saint Benoit, Saint François et Saint
Romuald Lorenzo Monaco, Vers 1405-1407 Tempera sur panneau de bois, 56,5 x 42 cm |
La place si particulière du peintre dominicain Fra Angelico trouve dans la collection dAltenbourg une résonance particulière puisquil est représenté par un ensemble de quatre panneaux démembrés, issus de deux grands polyptyques différents, celui du retable de la confrérie de Saint-François dans léglise Santa Croce (vers 1429) et celui de lancien autel principal de la basilique San Marco, daté autour de 1437-1440. Ces deux ensembles feront lobjet de reconstitutions partielles. Loeuvre de Fra Angelico, proche à ses débuts de Lorenzo Monaco, intègre peu à peu les apports novateurs dun Alberti et sil ne propose pas une vision rude et sculpturale de la réalité à limage dun Masaccio, ne perd rien de sa vision poétique en adaptant les règles nouvelles de la perception spatiale.
La
preuve par le feu de Saint François Fra Angelico, 1429 Tempera sur panneau de bois, 27,7 x 31,4 cm |
A ses côtés, Fra Filippo Lippi, élève et continuateur du précédent, est présent avec un Saint Jérôme en prière (vers 1435) qui a appartenu aux collections du grand duc Cosme de Médicis.