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Editeur
: MK2. Juin 2009. Durée du film : 103’ - Durée du DVD : 155’ - Format
image : 1.66 Format vidéo : 16/9 - Format audio : Français stéréo &
5.1 20€
suppléments :
- Préface, par Philippe Azoury 7’
- Scènes commentées, par Philippe Azoury 20’
- Rue Fontaine
: court métrage de Philippe Garrel ,17'
- Bande-annonce
Une star vit seule chez elle, son mari est à Hollywood et la délaisse.
Débarque chez elle un photographe qui doit la prendre en photo pour
un journal, faire un reportage sur elle. Ils deviennent amants. Ils
vont habiter deux semaines à l'hôtel pour faire ce reportage et repassent
de temps en temps à l'appartement de la star...
La
frontière de l'aube fut pour nous le plus beau film de l'année
2008 avec Un conte de Noël d'Arnaud
Desplechin. Tous deux, par l'ampleur de leur propos et l'émotion
mystérieuse qu'ils distillent, font partie des 100
meilleurs films de l'histoire du cinéma. Le noir et blanc,
les fermetures à l'iris et la dimension fantastique du film convoquent
ici les fantômes du cinéma muet pour une ode à l'amour
fou d'une intensité et d'un radicalité révolutionnaire
et romanesque que l'on avait sans doute pas connu depuis Frank Borzage
ou Carl T. Dreyer (voir : critique
complète)
La sortie du DVD permet d'affirmer cette certitude d'être
en présence d'un chef-d'oeuvre. Les scènes commentées par Philippe
Azoury reviennent sur un certain nombre de motifs du cinéma de
Garrel. Le suicide ou, plus exactement, le double suicide des amants
est ainsi présent dans La frontière de l'aube comme
dans Rue Fontaine,
le court métrage extrait de Paris vu par… 20 ans après
présenté aussi en bonus.
Scènes commentées, par Philippe Azoury (20’)
1-La star, l'actrice, l'amoureuse
La frontière de l'aube rappelle Les hautes solitudes
(1974) tourné avec Jean Seberg. Comme celle-ci, Laura Smet est
une star, une actrice très différente du milieu underground
habituel du cinéaste.
La question du modèle va souvent de paire chez Garrel avec le
goût du film en costume qui retrace le souvenir d'une expérience
vécue. Garrel ne cherche pas à capter la souffrance du
jour même mais celle du passé. Il ne donne pas d'indication
à son actrice. Il espère retrouver à travers son
regard, un souvenir, une intuition de ce qui a été avec
Jean Seberg.
Sans doute a t-il été aussi de plus en plus captivé
par ce que Laura Smet a à lui donner, en témoigne un filmage
de son visage beaucoup plus proche que d'habitude.
Carole refuse qu'on lui fasse une photo dans le dos : elle n'est plus
actrice, elle est une femme (dans son bain). Elle pourrait reprendre
la phrase de Nico : "Tu as une caméra à la place
du cur (un appareil photo à la place du cur)."
Scène représentative à la fois de l'impossibilité
à saisir les avertissements de ce qui arrivera, du fait qu'il
n'y a pas d'amour sans bêtise, ne plus être amoureux de
façon synchrone que résume la loi des essuies glaces :
"L'amour c'est comme ça. Quand il y en a un qui se rapproche,
l'autre s'éloigne. Quand l'autre se retourne pour se rapprocher,
c'est celui qui poursuivait qui s'éloigne". "Des essuies
glaces, il y en a aussi qui font comme ça (se rapprochent ensemble,
s'éloignent ensemble) : ça c'est l'amitié."
2-Si j'étais folle (l'amour à terre)
Carole à terre, c'est comme une sculpture de Rodin, un tableau
symbolique, ou ce qu'une actrice a à donner au cinéma
et que celui-ci recueille dans un plan long. Le plan du manque amoureux
et de la prophétie du suicide. Le suicide sera une répétition
de cette scène.
Le suicide est un thème récurrent de Garrel. Léaud
se coupe les veines avec de la pellicule dans La concentration
(1968). Nico simule un suicide dans un musée du cinéma
dans Le berceau de cristal (1975) et Jean Seberg se suicide dans
Les hautes solitudes (1974). Dans les années quatre-vingt
dix sans contourner le sujet, Garrel a évité de le représenter.
Il revient là à la représentation littérale,
frontale. La porte du couloir ouvre sur le hors champ de l'au-delà.
3-Tu sais ce qu'on dit dans les chansons
Le film est une sorte de diptyque avec Carole comme personnage principal
de la première partie et François celui de la seconde.
Dans la scène de séparation, extraordinaire zoom qui vient
récupérer dans la glace le visage de François.
Le film passe d'une sorte de film de chambre intimiste au film fantastique
où Carole est devenue un fantôme qui a décidé
de se suicider : "tu sais ce qu'on dit dans les chansons, bien
c'est vrai (les histoires d'amour finissent mal en général)."
4-Electrochocs
Les électrochocs sont un souvenir d'un évenement autobiographique.
En 1969 à Rome, Garrel sous LSD fracture les portes de la villa
Médicis. Les carabiniers l'emmènent en hôpital psychiatrique
où il subit des électrochocs. On les voit dans L'enfant
secret mais ici c'est la fille qui les subit par manque amoureux. Il
y a beaucoup de Garrel dans le personnage de Carole. Cet épisode,
daté de 2007 (tombe :1982 2007) renvoie aux années 70.
5-Apparitions
Dans Les enfants désaccordés (1964) un couple d'adolescents
allant faire l'amour dans une maison de campagne. Peut-être aussi
souvenir d'un plan de L'Avventura lorsque, dans le plan long, Carole
les regarde dormir. La première des quatre apparitions est filmée
de façon réaliste. Elle n'est pas morte, elle se cache
dans ses rêves. Succederont trois apparitions dans le miroir :
"ne faire qu'un pour se glisser dans le corps de l'autre".
Episode du film collectif Paris vu par… 20 ans après avec
: Christine Boisson (Génie), Jean-Pierre Léaud (René),
Philippe Garrel (Louis).René, la trentaine, sans le sou et déprimé,
sort d'une histoire d'amour qui a mal tourné. Il discute à la
terrasse d'un café avec son ami Louis qui lui propose de diner
avec lui chez l'amie qui l'a invité, Génie. René
accepte et semble fasciné par la jeune femme.....
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