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Lors d'une fête en son honneur, le peintre Rembrandt reçoit la commande de Frans Banning Cocq de peindre la guilde des fusiliers d'Amsterdam. Mais la guilde ne veut être peinte qu'en groupe et non individuellement ; Rembrandt ne se sent pas à la hauteur de la tâche et veut rendre la commande jusqu'à ce qu'il ait l'idée lumineuse de peindre la guilde comme une troupe en mouvement. Il se met à travailler avec obsession jusqu'à négliger Saskia qui est malade. Entre-temps, celle-ci décide, par l'intermédiaire de son notaire, qu'à sa mort, toute sa fortune sera versée à Rembrandt. Une fois le tableau achevé, Rembrandt, enthousiaste, retourne chez Saskia avec des cadeaux. Lorsqu'elle s'endort après une détresse respiratoire, il quitte la maison pour demander l'avis des clients sur le tableau. Ceux-ci réagissent avec indignation car aucun ne se sent convenablement représenté. La réaction furieuse de Rembrandt face à l'étroitesse d'esprit de la guilde est interrompue par la nouvelle qu'il doit se rendre immédiatement au domicile de Saskia mourante ; même son médecin, immédiatement prévenu, ne peut plus rien faire pour la sauver.
La famille de Saskia se montrant indignée par le testament de Saskia, Rembrandt se retire temporairement dans le moulin de son frère. Entre temps, sa gouvernante Geertje Dircx engage la jeune Hendrickje Stoffels pour l'aider ; le mécène Jan Six achète des reconnaissances de dette à Ujlenburgh en soutien à Rembrandt. Mais, au lieu de payer ses dettes, Rembrandt achète les tableaux de l'artiste incompris Hercules Seghers. Geertje parvient à convaincre Rembrandt de la peindre nue. Quand Rembrandt veut aussi peindre Hendrickje, Geertje la met d'abord à la porte, mais elle reste ; au lieu de cela, Rembrandt fait sortir Geertje, furieuse de la maison. Celle-ci, bientôt, se présente à la porte de Rembrandt avec son frère Piet pour faire chanter Rembrandt avec le portrait nu. Mais ils sont chassés par Hendrickje, qui annonce à Rembrandt, surpris, qu'elle attend un enfant de lui. Geertje et son frère ne s'avouent pas vaincus et dénoncent Rembrandt et Hendrickje à l'église qu'ils vivent ensemble dans le péché ; Hendrickje doit répondre de ses actes devant le conseil de l'église et est mis au ban de la population d'Amsterdam.
Lorsque les biens de Rembrandt sont saisis, Hendrickje prétend que les bijoux de Saskia sont les siens, afin au moins de les sauver de la saisie. Le produit de la saisie n'étant pas suffisant pour couvrir les dettes de Rembrandt, celui-ci implore la clémence d'Ujlenburgh qui est sur le point de vendre les tableaux de Rembrandt avec bénéfice. Hendrickje a l'idée salutaire de créer un commerce d'art et d'embaucher Rembrandt comme employé. Alors qu'Ujlenburgh harcèle Hendrickje, enceinte, pour lui faire admettre que le commerce de l'art n'est qu'une escroquerie, elle s'effondre et décède peu après. Le docteur Tulp réconforte Rembrandt, désespéré, en lui expliquant que le destin lui a imposé ces épreuves parce que sa vie n'est pas faite de splendeur mais de profondeur.
Dans sa vieillesse, Rembrandt et son ami Seeghers se moquent de l'attitude matérialiste des gens et ne veut rien d'autre que peindre. Lorsqu'il retrouve son tableau poussiéreux La Ronde de nuit dans un grenier, il se rend compte qu'il n'a pas vécu en vain.
François
Genton : "Le Rembrandt de Steinhoff est bien plus sombre et
violent que Le Rembrandt
de Korda réalisé six ans plus tôt. C'est un caractère
en formation dans une certaine tradition goethéenne, peu compatible
avec la constance de l'affirmation de soi propre au mythe. Le film installe
une forte portion d'antisémitisme et d'antiféminisme.
La manière dont Rembrandt justifie sa composition de La ronde de nuit diverge dans les films anglais et allemand : Charles Laughton dit qu'il voulait juste peindre une compagnie en branle ; plus ambitieux, Ewald Balser proclame la prééminence du tout sur la partie, conformément à une tradition holiste bien allemande : "Ce n'étaient pas les individus qui comptaient pour moi, c'était la totalité !". Il est évident que le film de Steinhoff repose sur une analogie entre le destin de Rembrandt et celui du peuple allemand : tenir malgré tout et faire confiance à la volonté qui nous gouverne. Rembrandt est aussi ce que les Allemands ont appelé un Durchhaltefilm, un film pour tenir.
Le mythe résiste au discours totalitaire. Bien loin de la sauvagerie agressive de la race des seigneurs, l'artiste maudit manifeste une attitude sacrificielle qui est ancrée dans la tradition judéo-chrétienne, par laquelle il s'oppose aux bourgeois satisfaits d'eux-mêmes et dénués du moindre talent. Structurellement l'artiste maudit ne parle que pour lui-même : on peut l'ériger, comme le fit Julius Langbehn, en potentiel éducateur des masses, en "empereur caché" mais il est bien peu susceptible de mobiliser la masse à l'instar du führer. Le 8 juin 1942, Goebbels confiait sa déception à son journal. Loin de montrer un peintre "démoniaque et génial", le film ne parvient pas à "percer les mystères de la puissance créatrice" et parlera aussi peu à la masse qu'aux gens cultivés."
Source :
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François Genton. La biographie de peintre, un genre politique ? Les films Rembrandt dAlexander Korda (1936) et de Hans Steinhoff (1942) p. 41 à 56 dans Biographies de peintres à l’écran. Patricia-Laure Thivat (dir.). Presses Universitaires de Rennes (novembre 2011). Collection : Le Spectaculaire Cinéma. |