Dimanche 26 août : Accompagnée de Sakuko, sa nièce, qui prépare son entrée à l’université, Mikie est de retour dans sa région natale pour mener à bien la traduction d’un roman indonésien. Venue de Tokyo, elle profite de l'appartement au bord de la mer que lui laisse sa sœur, Mizuho. Celle-ci est sur le point de partir en voyage au pays bas et en France mais elle a perdu son passeport qui est heureusement retrouvé par Ukichi qui est venu chez elle pour la conduire à l'aéroport en voiture. Mikie le présente à Sakuko comme l'ex de Mizuho, ce qu'ils réfutent l'un et l'autre.
Une fois Mizuho et Ukichi partis, Mikie et Sakuko vont se promener sur la plage. Sakuko s'étonne que sa tante semble si bien connaitre la Hollande alors qu'elle est spécialiste de l'Indonésie. Celle-ci lui rappelle que les archives des colonies sont souvent détenues par les pays colonisateurs. Mikie lui explique ensuite qu'elle connaît bien la région puisqu’elle y est née. Ses parents ont divorcé alors qu'elle était encore au collège et que Mizuho était au lycée. Sa mère s'est très vite remariée et ses deux filles sont allées vivre à Tokyo pour intégrer leur nouvelle famille. Son beau-père avait une fille qui avait entre l'âge de sa sœur et le sien ; c'était la mère de Sakuko. Celle-ci explique qu'elle a compris que ses deux tantes n'étaient pas du même sang qu'elle au collège seulement. Mikie affirme qu'avoir les mêmes nom et prénom que sa mèreen classe posait seul problème.
Sur la plage, Mikie et Sakuko rencontrent Tatsuko, la jolie fille d’Ukichi, qui travaille dans un bar durant l'été avant de retourner à l'université à la rentrée. Le soir, Sakuko pianote maladroitement alors que Mikie travaille à sa traduction.
Lundi 27 août. Mikie, dérangée par les notes de piano de Sakuko, lui conseille de réviser son programme de rattrapage pour l'entrée à l'université. Sakuko préfère aller se baigner.
Mardi 28 août. Toshie, une amie peintre de Mizuho, est venue voir celle-ci, ignorant qu'elle était déjà partie en voyage. Un peu exubérante, elle raconte à Mikie et Sakuko son voyage à Paris il y a cinq ans et comment elle avait été choquée et peinée de voir tant de monde devant la Joconde et personne devant le tableau d'à côté. Ce voyage, elle l'avait fait avec son groupe de peintres amateurs, puisqu’elle peint toujours, ainsi cette fleur, la Lychnis miqueliana. Mikie se montre alors intéressée puisque c'est cette même fleur que le héros de son roman, un fantôme décédé lors du massacre 30 septembre 1965, porte toujours à son frère avant de la manger. Elle s'enquiert de là où on peut la voir, En se rendant ainsi vers la rivière Seta à 40 minutes à pied, Mikie et Sakuko rencontrent Ukichi et son neveu, Takashi, en balade en vélo et qui les prennent illico sur leur porte-bagage. L'oncle et le neveu choisissent chacun un chemin pour se rendre au bord de la rivière. Une intimité a ainsi le temps de s'établir entre Takashi et Sakuko. Mikie découvre que la fleur, la Lychnis miqueliana a un goût amer.Tout le monde profite des joies de la rivière avant de rentrer en chantant.
Mercredi 29 août. Sakuko se lève tard et se rend en vélo près de la rivière récupérer un vêtement oublié la veille. A côté du sien se trouve le chapeau d'Ukichi. Elle entreprend de le lui rendre. Pour connaître l'adresse de l'hôtel où il travaille, elle se rend au bar où sa fille, Tatsuko, est serveuse. L'amitié naît entre les deux jeunes filles. Tatsuko propose à Sakuko de revenir car elle a un cadeau pour elle. Elle lui fait remarquer que tous les sirops ont le même goût; les différencier est une illusion du cerveau qui cesse quand on ferme les yeux. Elle ne se sent pas débordée car il y a moins de touristes depuis le tsunami de l'an dernier. En revanche, les manifestations anti-nucléaires s'organisent.
Dans l'hôtel où travaille Ukichi et son neveu Takashi, celui-ci se rend soudainement compte qu'il est dans un love hôtel quand son oncle lui demande de passer de la musique de jazz pour un client. C'est un conseiller municipal qui connaît le propriétaire de l'hôtel et qui en profite pour coucher régulièrement avec de jeunes prostituées en ayant besoin de ce petit air pour aboutir à ses fins.
Sur ces entrefaites, Sakuko vient rendre son chapeau à Ukichi et soupçonne du fait de la musique d'ambiance, que c'est un love hôtel. Ukichi confirme à demi mots et s'empresse de conseiller à Takashi de raccompagner Sakuko. Les deux adolescents discutent longuement sur la route et Takashi fait comprendre à Sakuko que son oncle n'est pas l'ex de Mizuho comme tout le monde semble le croire mais eut autrefois une relation très forte avec Mikie, déjà spécialiste de l'Asie du sud-est, et qui ne fut brisée que parce que Mikie ne pouvait avoir d'enfants. Il épousa alors sa maîtresse quand celle-ci tomba enceinte. De son côté, Sakuko explique que sa mère est depuis toujours complexée, moins belle que ses tantes, et s'est repliée sur elle-même. Ukichi dit vivre dans une famille normale. Sakuko l'invite à venir à la plage le lendemain
Chez Mikie, le professeur Nishida, son ami, fait la discussion avec Toshie et des amies peintres amateurs comme elle. Elles sont en admiration devant ce professeur célèbre qui va faire une conférence à l'université proche de Kuriyama. Quand Sakuko rentre, Toshie dit du mal d'Ukichi, ce qui irrite Mikie et plus encore Sakuko quand Toshie prétend que Takashi est venu se réfugier chez son oncle pour fuir la zone irradiée de Fukushima et que ses parents doivent être désespérés pour l'avoir ainsi confié à une fripouille.
Jeudi 30 août. Sur la plage, le professeur Nishida regarde se baigner Mikie et Sakuko quand il est abordé par Tatsuko qui reconnaît en lui le célèbre professeur d'histoire de l'art. Elle lui reproche gentiment d’être trop réservé dans son livre et de ne pas donner son avis. Celui-ci lui dit être adepte de l’objectivité formelle: "Mon point de vue est exprimé dans les choix que je fais que ce soit en termes de sujets ou de données". Takashi rejoint le groupe sur la plage et s'éloigne avec Sakuko quand il est abordé par une jolie fille de l'université de Fukushima qui tient absolument à avoir ses coordonnées.
Vendredi 31 août. Le professeur Nishida donne une conférence sur Marie-Madeleine à l'université de Kuriyama. Tatsuko vient le rejoindre ensuite. Il propose de la ramener en voiture, Tatsuko est jalouse de Mikie dont elle a vite compris qu'elle était la vraie raison du déplacement de Nishida. Celui-ci est par ailleurs marié et père de deux enfants. Tatsuko lui raconte la triste histoire de son père qu'elle méprise. Il n'a jamais su rendre sa mère heureuse car vivant de petits trafics et même du commerce de sexe-toys avant que sa femme ne meurt de chagrin. Il tient désormais un love hôtel mais fait tout pour lui payer de bonnes études. Nishida propose à Tatsuko de la payer pour coucher avec elle.
Takashi passe une nouvelle fois la musique pour le conseiller et rejoint Sakuko qui l'invite au restaurant. A peine a-t-il commandé le magret de canard qu'il répond au téléphone à la fille de la plage. Sakuko se retire alors,laissant Takashi seul attendre son nouveau rendez-vous. Elle va sur la plage et court sous la pluie.
samedi 1er septembre. Uchiki invite Mikie pour le soir car c'est l'anniversaire de sa fille. Mikie accepte et prévient qu'elle viendra avec Sakuko et Nishida. Celui-ci est gêné et prétend avoir réservé pour un dîner en tête à tête qu'il devra donc annuler. Le soir, la conversation dérive rapidement vers la fidélité ou l'infidélité de Nishida. Il se sent mis en défaut au point de sortir de table. Il est rabroué par Mikie qui ne veut pas entendre parler d'amour tant qu'elle n'a pas fini de travailler à sa traduction. Du coup, Nishida veut partir sur le champ. Il est giflé par Tatsuko qui le traite de vieux pervers.
Le soir, Takashi rentre tard, prétextant avoir raté le dernier bus. Sakuko lui donne des conseils pour draguer la fille de la plage qui lui a donné rendez-vous le lendemain.
Dimanche 2 septembre. Takashi tombe de haut quand il comprend que la fille de la plage ne l'a pas convié à un rendez-vous amoureux mais qu'elle est en couple avec l'organisateur de la manifestation antinucléaire. Elle ne lui a demandé de venir que pour témoigner de son exil de Fukushima. Du coup, Takashi, déjà déstabilisé pour avoir vu une lycéenne se faire racketter par deux autres élèves, se met à bafouiller son témoignage. C’est le nucléaire qui faisait manger sa famille dit-il et elle n'a donc que ce qu'il mérite. Il est content d'avoir quitté Fukushima et sa famille avec laquelle il ne s'entendait plus.
Sakuko, qui a regardé Takashi témoigner sur internet sur Our planet TV, décide de le rejoindre.
Revenu chez son oncle, Takashi voit la jeune collégienne rackettée venir se prostituer avec le conseiller municipal. Il déclare à son oncle que s'est mal et celui-ci le licencie gentiment mais fermement. Takashi supprime alors la musique de jazz et le vieux conseiller perd ses moyens ce qui fait rire la lycéenne jusque là terrorisée.
Comme Takashi sort en trombe de l'hôtel, il est face à Sakuko qui le poursuit et accepte de fuguer avec lui. Le long des rails, ils parlent cinéma (Trust by me) et voyages. Le soir, Ukichi vient voir Mikie mais Sakuko n'est pas rentrée et ils décident de partir à leur recherche. Tous les deux sont dans un bar, discutent de leur avenir, et regardent un mime.
Lundi 3 septembre. Sakuko et Takashi dorment à la belle étoile. Mikie regarde Ukichi qui s'est endormi après leur vaine recherche de la nuit. Ils se rappellent de leurs jours heureux et de la rupture due à la stérilité de Mikie. Sakuko et Takashi se réveillent au bord de la voie de chemin de fer et décident de rentrer chez eux après un timide au revoir.
Quand Sakuko rentre, Mikie l'informe qu'elle a fini sa traduction. En se promenant sur la plage, Mikie explique pourquoi elle s'est intéressée à l'Indonésie. En voyage d'agrément, elle avait rencontré des gens devenus des amis. Lorsqu’ils ont été confronté à une guerre ou une catastrophe, elle s'en est encore rapproché. A force d'y aller, elle en a fait son métier. Sakuko lui dit qu'elle sera toujours une étrangère. Il lui semble plus efficace que ce soit un natif qui aide son pays. Mikie lui demande si elle est sûr de se connaîitre mieux que personne. "Sais-tu que quand tu ris, tu gonfles les narines ? Comme Sakuko s'esclaffe, Mikie enfonce le clou : "ça marche aussi pour les pays."
Mardi 4 septembre. Sakuko apprend au téléphone que sa mère vient de recevoir son acceptation pour intégrer une prépa afin de réussir le rattrapage de l'entrée à l’université. Cela commence le surlendemain ; elle doit donc rentrer ce jour même. Mikie et Ukichi l'accompagnent à la gare. En chemin, ils croisent Tatsuko qui lui donne le cadeau promis: une photographie des jours heureux. Dans le train, Sakuko dit un dernier au revoir à Mikie et Ukichi. Le quai de la gare est désert. Takashi n'est pas même venu dire au revoir.
Durant une semaine et demie, Sakuko va ébaucher une histoire d'amour mais surtout réfléchir à sa vie future; reprendre ou non les études; étudier un pays étranger ou le sien propre. Son timide amour, Takashi, ne comprends pas les sentiments de Sakuko, amoureux qu'il est lui même de la belle fille de la plage, étudiante à Fukushima, mais qui ne s'intéresse à lui que parce qu’il est un exilé après la catastrophe nucléaire. Mikie, la tante de Sakuko qui l'a pris sous son aile, durant ses vacances, finira la traduction qu'elle avait prévue de faire, ce qui la préserve sans doute du charme facile du professeur Nishida. celui-ci se salira lui-même en proposant une relation tarifée à l'intelligente Tatsuko. Celle-ci, qui méprise déjà son père, Ukichi, pour avoir rendu malheureuse sa mère donnera, à la fin, la photo réconciliatrice où figure Sakuko, Takashi et elle-même enfants qui surent alors être heureux. Ce bonheur est plus difficile à atteindre étant adulte ainsi celui de Ukichi et Mikie fracassé autrefois par la stérilité de cette dernière.
Sakuko au bord de la rivière
La structure du film, scandée par la page d'un carnet d'écolier où figure chacun des jours, et son ton rappellent le cinéma d'Eric Rohmer. Le titre original, Sakuko au bord de la rivière, peut faire penser aussi bien à Pauline à la plage qu'à Conte d’été, où des personnages se remettent en question durant des vacances. Le ton est proche de celui, aigre-doux, des comédies de Hong Sang-soo, lui-même admirateur de Rohmer.
Comme dans Pauline à la plage, le jeune couple peut être mis en danger par les jeux troubles des adultes. Le professeur Nishida ne donne sa conférence que pour renouer avec Mikie qui, même si ce n'est jamais dit, fut sa maitresse autrefois. Avant d'essuyer un refus il propose à Tatsuko de la payer pour coucher avec elle. Ukichi fait travailler Takashi dans un love hôtel avant de comprendre que cela risque fortement de perturber son sens moral
Pourtant plus cruel est l'aveuglement de Takashi qui ignore l'amour de sa confidente ce que Gaspard avait lui compris quand même de Margot à la fin des vacances. Ce que l’on croit être l'éblouissement de la rencontre au bord delà rivière ne vaut que pour Sakuko alors que pourtant deux raccords regards de Takashi sur le corps de plus en plus rapproché de Sakuko emblaient avoir dit
Dureté de la société japonaise
Ces rondes amoureuses, de Sakuko et Takashi, Mikie et Ukichi, Tatsuko et professeur Nishida, révèlent aussi des relations familiales complexes. D'abord pour elle et sa sœur, venant dans une belle-famille où elles rencontrent la mère de Sakuko. Pour Sakuko qui semble élevée par sa mère seule, personnage qu'elle dit complexée et repliée sur elle-même; pour Takashi, battu par ses parents Globalement la société japonaise apparait très dure: on y .survit de petits boulots, love hôtel, conseiller libidineux abusant de mineures, tsunami et catastrophe de Fukushima.
Tatsuko fait remarquer à Sakuko que tous les sirops ont le même goût; les différencier est une illusion du cerveau qui cesse quand on ferme les yeux. En revanche la Lychnis miqueliana, cette fleur que le héros du roman indonésien porte toujours à son frère avant de la manger se révélera amère au bord de la rivière; sans doute comme les souvenirs de Mikie et Ukichi et plus tard sans doute Sakuko et Takashi
Sakuko, attentive aux déclarations de Takashi dit à sa tante qu'elle sera toujours une étrangère pour les Indonésiens. Il lui semble plus efficace que ce soit un natif qui aide son pays. Mikie lui demande si elle est sûre de se connaître mieux que personne. "Sais-tu que quand tu ris, tu gonfles les narines ? Comme Sakuko s'esclaffe, Mikie enfonce le clou : "ça marche aussi pour les pays."
Nishida abordé par Tatsuko se voit reproché d’être trop réservé dans son livre et de ne pas donner son avis. Celui-ci lui dit être adepte de l’objectivité formelle: "Mon point de vue est exprimé dans les choix que je fais que ce soit en termes de sujets ou de données".
jean-Luc Lacuve, le 21/11/2020, critique provisoire.