A la fin des années 70, à la différence des Américains qui continuent de puiser dans la vie contemporaine, Polke ouvre le champ de ses ressources à tout type d'images graphiques, anciennes ou modernes. Ce refus de l'art comme progrès historique aussi bien que le rejet d'une modernité emblématique font de Polke le précurseur du post-modernisme.
À l’approche du bicentenaire de la Révolution française, Polke entreprend sur ce thème un ensemble de vingt-deux tableaux, dont Jeux d’enfants constitue sans aucun doute le fleuron. Le dialogue avec l’histoire est une sorte de seconde nature chez l’artiste, et ces œuvres semblent comme l’emblème de son recours insistant à un fonds d’images du passé. De quoi s’agit-il ici ? On sait grâce au catalogue de l’exposition « Sigmar Polke et la Révolution française » (Vizille, 2001) que l’artiste a repris dans Jeux d’enfants le détail d’une gravure anonyme contre-révolutionnaire dénonçant les massacres perpétrés à Paris en septembre 1792 après la chute de la monarchie, gravure qui montre notamment, à proximité d’une religieuse égorgée, deux enfants jouant avec une tête coupée (douze dessins préparatoires témoignent du travail de Polke autour de ce petit duo ludique et macabre).