Départ
Max Beckmann , 1932-1933
Triptyque, huile sur toile
Panneau central: 215,3 x 115,2 cm
Panneaux latéraux: 215,3 x 99,7 cm
Collection MOMA
En 1932, quelques mois avant la prise du pouvoir par Hitler
(janvier 1933), Beckmann met en chantier son premier triptyque Départ.
Le peintre séloigne dune politique quil condamne
pour puiser dans le temps, propre au mythe, des significations, des récits
quil veut universels (Picasso, confronté à la tragédie
de lhistoire, réagit de même en 1937 avec Guernica).
Par leur forme, les triptyques disent un monde polarisé mais divisé
comme lest lunivers du mythe. Les panneaux latéraux sopposent
par leur sens au tableau central, qui en constitue lalternative ou la
synthèse.
Départ a dérouté les contemporains du peintre, qui ne
comprenaient pas le sens de son iconographie trop personnelle. Beckmann a
livré en 1937 à une amie, Lilly von Schnitzler, quelques clés
très utiles. Les deux volets latéraux représentent la
vie qui se traduit par le désespoir et la torture auxquels tout homme
est soumis. Le départ du roi et de la reine, qui se sont dégagés
des souffrances de la vie, constitue la seule issue à cet état
désespéré. Lenfant que la reine tient sur ses genoux
représente le bien suprême, la liberté. "La liberté
est ce qui importe - elle est le Départ, le recommencement", confie
t-il.
Comme au temps des années de crise, des scènes
de corps mutilés refont leur apparition dans ses uvres, sorties
de son inconscient: "Vous traînez avec vous cette part de vous-même
qui est le cadavre de vos souvenirs, de vos méfaits, de vos échecs,
du meurtre que chacun a commis une fois dans sa vie. Vous ne pouvez vous libérer
de votre passé."
Dans ce premier triptyque (comme dans les suivants) les représentations
de la violence et du crime expriment son sentiment du malheur et témoignent,
en même temps, du contexte historique et politique de la société.
Mais Départ, au-delà des circonstances historiques, peut sappliquer
à toutes les époques car il a pour contenu le chemin fatidique
de lhomme.