54ème Biennale de Venise. Les Giardini, L'Arsenal Du 4 juin au 27 novembre 2011 |
Placée sous le commissariat de Bice Curiger, historienne et critique dart suisse, la 54ème Exposition internationale dart a pour thème «ILLUMInations», car la Biennale est lun des plus importants forums pour la dissémination et lillumination des développements actuels dans le domaine de lart international.
Un jury composé dacteurs du monde de lart, artistes et critiques récompense plusieurs artistes à chaque édition de La Biennale de Venise. En 2011, La 54ème Biennale de Venise, son président Paolo Baratta et la commissaire générale Bice Curiger ont récompensé sept artistes. Quatre artistes ont reçu un Lion dOr, deux mentions spéciales ont été attribuées, et un Lion dArgent a récompensé la meilleur jeune artiste.
Deux Lion dOr, avaient été annoncés en début dannée 2011. Il sagit de lAutrichien Franz West et de lAméricaine Sturtevant qui recevaient chacun un Lion dor pour lensemble de leur carrière. Le Lion dOr de la meilleure participation nationale revient au pavillon allemand dont le commissaire, artiste et metteur en scène Christoph Schlingensief est décédé en 2010 dun cancer du poumon à lâge de 49 ans. Il était considéré comme lune des figures les plus importantes du théâtre et du cinéma allemand. Connu aussi pour ses qualités dartiste plasticien, il se démarquait par ses uvres provocantes et contestataires. À son décès, les plans du pavillon nétaient pas terminés, mais Susanne Gaensheimer directrice du Museum of Modern Art de Francfort et conservatrice du pavillon allemand a conservé lidée initiale de Schlingensief.
Le Lion dor du meilleur artiste de la 54ème Biennale de Venise revient à lAméricain, Christian Marclay pour The clock.
The
clock de Christian Marclay
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La Britannique Haroon Mirza reçoit le Lion dargent de la meilleure jeune artiste. Deux mentions spéciales étaient aussi accordées au Pavillon lituanien et à lartiste Klara Lidén.
Le pavillon français
Pour Jean-Hubert Martin, Commissaire du Pavillon français :
"Luvre créée pour le Pavillon français de Venise par Boltanski, Chance, marque une étape importante dans son évolution. Contrairement à lensemble de son travail dominé par la disparition et la mort, il souvre ici à une interrogation plus large sur le hasard et le destin. Le déroulement de la vie et le rythme incessant des naissances posent la question de luniversel et du singulier sous une forme nouvelle, pour sinterroger sur ce qui distingue un être dun autre.
Lambiance, au lieu dêtre sombre, est ici accueillante. Même si la brutalité dun dispositif industriel et mécanique vient contrecarrer lharmonie néoclassique du bâtiment, des rayons de lumière filtrés par des moucharabiés illuminent au hasard des visages de nourrissons. Périodiquement lun deux est élu. Rien ne le distingue en apparence des autres et pourtant cest peut-être celui dont le pouvoir et la notoriété laisseront une trace dans lhistoire.
Cette mystérieuse main de Dieu pour les croyants était déjà présente au Grand Palais sous la forme de la grue et de son grappin qui semparait de quelques vêtements avant de les relâcher, symbolisant la fortune ou linfortune qui touche les uns ou les autres.
Pour les athées, orphelins des dieux, ce nest quune fatalité, le résultat dun hasard dans une contingence indéchiffrable. Ce hasard est heureux, quand on parle de chance en français et cest ainsi que lentend lartiste, mais dans une telle Biennale internationale, le sens anglais de hasard ou risque prend le dessus. La chance est sur du hasard qui ne va pas sans risque, mais pour ces bambins, la seule objectivité du hasard est le coup de dés joué par leurs parents pour les concevoir. Ils nont pas eu le temps de se hasarder à prendre des risques et pourtant certains naissent sous une bonne étoile dont un rayon vient les frapper.
Un décomptage rappelle les chiffres quotidiens de morts et de naissances, démontrant que la population saccroit chaque jour dans un monde à la conscience devenue planétaire et que chaque être irremplaçable en soi est en fait remplacé.
Le visiteur est invité à participer à un jeu consistant à recomposer sur un écran un visage à partir de fragments de visages de bébés et de vieillards qui défilent à toute allure. Sil arrive à restituer un vrai visage en poussant le bouton au bon moment, il gagne luvre. Ce jeu du hasard se traduit jusque dans nos physionomies, car comme dans la projection de ces visages hybrides, on hérite du nez de son père, du menton de sa grand-mère et du front de larrière grand père.
Pendant toute la durée de la Biennale, le jeu sera également proposé sur internet : www.boltanski-chance.com. Chacun pourra tenter sa chance afin de gagner une surprise qui lui sera directement envoyée par lartiste lui-même.
Toute sa vie Boltanski a été hanté par le mystère de sa naissance, par létrange sentiment quà quelques secondes près, il aurait été un autre, lorsque ses parents lont conçu.
De cette interrogation lancinante et de la fréquentation des cours de catéchisme, surgit la question du déterminisme ou du libre arbitre, ce quil appelle sa lutte avec Dieu. Notre vie est-elle écrite ? Les jeux sont-ils faits à lavance ? Ou au contraire y a-t-il liberté et hasard ? Jusquà quel point pouvons-nous décider de nos actes ? Pouvons-nous agir sur le cours des choses ?
Cette uvre de Boltanski se présente comme un conte philosophique où le spectateur ne se contente pas denregistrer un récit de manière passive, mais est impliqué dans un jeu où il peut lui-même devenir lélu du destin, si la chance lui sourit. Il est invité à se frayer un chemin dans un dédale de poteaux où il devient acteur de la tranche de vie qui sy joue. Toujours préoccupé de toucher son public, Boltanski agit ici moins dans le registre de lémotion pure que dans celui dune réflexion ludique sur la fortune et linfortune.
La démonstration est impressionnante de la part dun artiste internationalement reconnu qui na plus rien à prouver. La maîtrise de sa grammaire et des techniques de présentation lui permet de créer une nouvelle pièce aussi bien sur le plan conceptuel que formel. Lâge avançant, la mort toque à la porte et le face à face avec son image cède la place à celle de la naissance et de linéluctable reproduction de lespèce. Son expérience dans le domaine du spectacle lui a ouvert une voie inédite. Les arts plastiques se sont emparés dans les dernières décennies des disciplines et des méthodes les plus diverses.
La performance en partie liée avec le théâtre et les frontières se font de plus en plus floues. Boltanski sait, sans se mettre en scène lui-même, théâtraliser ses expositions dans un genre qui tente dimpliquer le spectateur.
Certes, la question du destin et de son déterminisme sopposant à la chance et à son hasard était sous-jacente dans bien de ses pièces traitant de la mort qui frappe de manière inopinée. Mais laccent est mis ici plus sur la vie et ses aléas, aussi injustes soient-ils, que sur son interruption."