DVD Gustave Courbet

Gustave Courbet, les origines de son monde de Romain Goupil : Film lyrique sur la vie de Courbet et précis dans l'analyse des tableaux.

L'Origine du monde de Jean-Paul Fargier : le film retrace l'histoire d'un des tableaux les plus mystérieux de l'art occidental.

La place du mort de Alain Jaubert : analyse précise, complète et, ce qui en gâche rien, subjective du tableau de 1851 : Un enterrement à Ornans.

Dans les coulisses d'une exposition : le transfert spectaculaire d'une oeuvre monumentale.

 

Gustave Courbet, les origines de son monde de Romain Goupil

Film lyrique sur la vie de Courbet et précis dans l'analyse des tableaux. La voix timide et douce de Valeria Bruni Tedeschi commente le contexte politique, celle d'Hypolytte Girardot les réactions de l'époque alors que la voix fière de Romain Goupil lit les lettres de Courbet.

Les lettres structurent le film depuis celle écrite à Besançon en novembre 1837 pour demander à ses parents de quitter le collège jusqu'à la dernière, du 23 décembre 1877, à sa sœur et à son père où il fait part de son désir de rentrer en France et accepte de payer les 5 000 francs qu'on lui réclame pour la colonne Vendôme.


Courbet arrive à Paris en décembre 1839. Il a besoin d'argent. En avril 1840, il travaille beaucoup : académie, copies au Louvre et cours de dessin après dîner. Il fréquente Théophile Gautier, Baudelaire avec lesquels il fume le haschich.

En 1845 il veut faire un grand tableau qui le fasse connaître car "Je veux tout ou rien". En 1848 Baudelaire et Champfleury sont sur les barricades. Ils éditent un journal éphémère dont Courbet illustre la première page mais celui-ci ne participe pas aux barricades : il fait "la guerre de l'intelligence".

Première rupture avec Un après-dîner à Ornans, un grand format pour un sujet banal et un personnage de dos au premier plan suscite l'éloge de Delacroix et Champfleury : Courbet a osé peindre un tableau de genre de grandeur naturelle. Il obtient une médaille d'or a tout juste trente ans et devient un peintre reconnu.

autoportrait
Un après-dîner à Ornans

En février-mars 1850, Courbet est à Ornans : il fait poser ses amis, sa famille pour un grand tableau qui sera Un enterrement à Ornans. " Ici les modèles sont à bon marché. Tout le monde voudrait être dans L'enterrement. Ont déjà posé, le maire qui pèse 400 livres, le bedeau avec un nez gros comme une cerise..."

Il reprend la composition du sacre de Napoléon 1er de David il en transgresse le but, la glorification politique peinture anti-héroïque aux personnages aux regards fuyants absence du sujet central refuse la représentation romantique de la mort avec consolation religieuse et participation de la nature rien de tel chez Courbet ni lune, ni piété, ni épopée

Les critiques sont violentes. Le critique Oger le qualifiera de prédication du néant. On dira encore : "Ce n'est pas la restauration du laid c'est la poursuite de la recherche de l'ignoble répugnante trivialité provinciale, une habilite qui n'est pas de l'art".

Dans une lettre du 19 novembre 1851, il se revendique peintre socialiste, démocrate et républicain, représentant de la révolution et, par-dessus tout, réaliste : ami sincère de la réalité

En 1852 Il peint Les demoiselles de village et dit faire dans "le gracieux". Exposé au salon de juin 1952, il ne recueille que des critiques. Même chose au salon de 53 où est accepté Les baigneuses. Le tableau est attaqué par Théophile Gautier: "rompre définitivement avec l'antique et les traditions du beau, Courbet c'est le Watteau du laid". Même incompréhension de la part de Delacroix : "Quel tableau, quel sujet ! La vulgarité des formes ne ferait rien, c'est la vulgarité et l'inutilité de la pensée qui sont abominables : que veut cette bourgeoise qui sort de l'eau, d'une petite mare d'eau pas même assez profonde pour un bain de pieds."

Le salon de 1853 est pourtant l'occasion pour Courbet de rencontrer Alfred Brouillas qui achète le tableau et restera son mécène toute sa vie.

En octobre 53, il déclare : "Il faut vaincre ou mourir" et développe une théorie un peu fumeuse : "la solution". Nous appellerons solution une peinture qui unit tout grâce à ses pouvoirs merveilleux : simplicité, nature vraie avec un sentiment délicat.

En mai 1854, il déclare n'avoir jamais fait et ne faire jamais la moindre concession. Il se rend à Montpellier à l'invitation de Brouillas et dans Bonjour monsieur Courbet, inverse la tradition : le peintre prend le pas sur le mécène.

En novembre-décembre 1854, il est un peu dépressif. Il se dit l'âme triste. Il "baise" sa servante "tout cela ne m'égaye pas" et se dit nostalgique de voir sa femme remariée après 14 ans de vie commune. Il s'exalte pour son nouveau tableau L'atelier. Il dit peindre " 30 personnages grandeur nature : ce sont tous les gens qui me servent et qui participent à mon action. A droite, les actionnaires c'est à dire les amis, les travailleurs, les amateurs du monde de l'art. A gauche, l'autre monde de la vie triviale, le peuple, la misère, la pauvreté, la richesse, les exploités, les exploiteurs, les gens qui vivent de la mort… les gens qui voudront juger auront de l'ouvrage. Ils s'en tireront comme ils pourront".

Dans une lettre du 5 avril 1855 il annonce à Brouillas qu'on lui a refusé L'enterrement et L'atelier pour l'exposition universelle. On le pousse à une exposition particulière face à l'exposition universelle où les plus grands peintres européens confrontent leurs tableaux. Il se propose, si Brouillas lui en donne les moyens d'opposer ses 40 tableaux aux 50 000 toiles de l'exposition universelle. Visitant le pavillon de Courbet, Delacroix reconnaît un chef d'œuvre dans L'atelier.


Pour Cézanne le grand apport de Courbet c'est l'entrée lyrique de la nature." Ce n'est pas le peintre de l'éphémère ; tout ce qu'il voit, il le voit de l'intérieur".

1857. Les demoiselles du bord de Seine fait l'objet de vives attaques au salon. On n'apprécie pas ces femmes "vouées au vice". Abandon gestuel, regard mi-clos jupe relevée sur jupon engagent Courbet moins sur la voie du réalisme que sur celle d'une peinture charnelle, celle du désir.

En juillet 1963, il se révèle athée et misogyne dans sa correspondance avec Proudhon. En juin 1865 parait le volume que lui consacre Proudhon.

En mai 1867, il peint L'hallali du cerf, dernier grand format. Au raffinement maniériste des détails s'oppose let déchaînement de la mise à mort du cerf. Théophile Gautier l'attaque violemment : "Courbet est dénué de toute esthétique regardé comme une claque parmi les novateurs".

En septembre 1869, il accepte d'être décoré comme chevalier de saint Michel parce que des artistes allemands en ont fait la demande au roi de la Bavière. Dans une lettre du 23 juin 1870 adressé au ministre, il refuse la légion d'honneur : l'état est incompétent en matière d'art.

Dans une lettre du 5 octobre 1870, il demande au gouvernement de la défense national d'enlever la colonne Vendôme de la rue, dite rue de la paix, au motif que ces blocs de canons fondus perpétuent la tradition de carnages, de conquêtes et de pillages.

En avril 1871 Courbet arrête de peindre et s'engage dans la commune. Le 16 mai, alors que la commune est écrasée, la colonne Vendôme est abattue au son de la Marseillaise.

L'écrasement de la commune aura fait 30 000 morts, 45 000 arrestations et des milliers de déportés. Courbet est condamné à 6 mois de prison.

En mars 1872, à sa sortie de sainte Pélagie, on détruit ses tableaux et Barbey d'Aurevilly et Alexandre Dumas fils l'attaquent très violemment dans la presse. Courbet s'en moque : cela augmente la valeur de ses tableaux.

En 1873, l'assemblée conservatrice décide de relever la colonne Vendôme et intente un second procès contre Courbet. Ses biens et ses tableaux sont saisis Courbet quitte la France en juillet 1873 et se réfugie en Suisse où il y mourra.


 

L’Origine du monde de Jean-Paul Fargier

Ce tableau est resté caché, secret pendant plus d'un siècle. Pendant longtemps, deux textes seulement le décrivaient, l'un de Maxime Ducamp publié en 1877, l'autre de Edmond de Goncourt quelques années plus tard.

Alors qu'on le croyait à jamais disparu, soudain, en 1967, il apparaît dans un livre du docteur Zwang, Le sexe de la femme. Photographie unique d'un photographe anonyme qui ne cessa ensuite d'être dupliquée avec des informations contradictoires sur sa localisation entre Budapest et Paris.

En 1982, lors d'un entretien télévisé réalisé par Jean-Paul Fargier, le trou de la vierge où Philippe Sollers est interrogé par Jacques Henric, André Cuny révèle avoir vu le tableau chez Lacan, caché derrière un tableau d'André Masson. Jacques Lacan, comme les précédents possesseurs du tableau, avait trouvé un moyen de le soustraire au regard commun pour mieux le faire briller lorsqu'il apparaissait dans des conditions exceptionnelles à ses visiteurs.

 

L'histoire d'un tableau

Khalil-Bey est le premier propriétaire du tableau. Il possède à Paris une collection d'une centaine d'œuvres, l'une des plus belles du moment (Delacroix, Chasseriaux, Ingres, Courbet). Ce riche diplomate, possède des chevaux, attire le tout Paris, à pour maîtresse Jeanne de Tourbay (1837-1908), l'une des grandes demi-mondaines qui tient salon.

Khalil-Bey souhaite acquérir Venus et psyché, tableau aujourd'hui disparu. Mais Courbet vient de le vendre. Il propose de réaliser pour lui "la suite", Le sommeil. Son nu le plus audacieux.

L'origine du monde est-elle une commande ou un cadeau pour faire passer le prix élevé : 20 000 francs alors que La femme au perroquet était estimé à 6 000 francs par l'administrateur des beaux-arts ? Pour l'historienne Michèle Haddad, Khalil-Bey serait rentré à Paris en 1866 pour soigner de sa syphilis. Il aurait alors pu commander une Icône de la source de ses plaisirs et de ses tourments, une sorte d'ex-voto, d'image pieuse dans laquelle il vénère la puissance qui éloigne et rapproche de la mort.

Qui a posé ? Jeanne de Tourbay, la maîtresse du commanditaire, Joe l'Irlandaise la maîtresse du peintre, la femme brune du sommeil ou une anonyme sur une photo pornographique qui aurait pu servir de modèle.

Le tableau ridiculise la fausseté de l'académisme, celle d'un Cabanel et dépasse ingres et même, L'Olympia de Manet qui fit scandale un an auparavant.

En 1868 Khalil-Bey vend sa collection mais l'Origine du monde ne passe pas en vente publique. En 1889, Edmond de Goncourt après une visite chez le marchand d'art Antoine de la Narde en décrit que derrière "un panneau extérieur représentant une église de village dans la neige, il vit un ventre de femme au noir et proéminent mont de venus sur l'entrebâillement d'un con rose. Devant ce tableau je dois faire amande honorable à Courbet : Ce ventre c'est beau comme la chair d'un Corrège."

En 1913, Berheim jeune vend L'origine du monde et son cache, tableau également de Courbet, à deux collectionneurs hongrois, le baron Herzog et le baron Hatvany qui emportent les deux tableaux à Budapest. Herzog garde le château de Blonay, François de Hatvany, L'origine du monde.

En 1944, le château est pillé et Hatvany fuit en France. En 1948, il récupère une partie de ses tableaux dont L'origine du monde qui entre en France caché dans une valise diplomatique.

En 1955 Jacques Lacan et sa femme Sylvia achètent L'origine du monde à Paris. Jacques Lacan a rencontré Sylvia Bataille, la femme de Georges et l'interprète de la partie de campagne de Renoir chez André Masson, qui vit avec la sœur de Sylvia. Accroché à Guitrancourt dans leur maison de campagne, le tableau est caché derrière un panneau, non pas le paysage sous la neige, resté à Budapest mais par un tableau spécialement commandé par les Lacan à André Masson. Masson reprend les courbes du nu de Courbet et compose un paysage érotique.

 

Après la mort de Lacan, en janvier 1981, Sylvia prête le tableau pour une exposition à Brooklyn de 1988 puis en 1992 à l'exposition Masson qui a lieu à Ornans

En 1993, Sylvia meurt. En 1995, ses héritiers par dation remettent à l'état le tableau de Courbet.

La place du mort de Alain Jaubert

Ce film de 1996 est accompagné de l'Ode Funèbre K 477 de Mozart. Choix aussi lyrique que malicieux, vu l'interprétation finale de Alain Jaubert sur l'identité du mort.

Le tableau mesure 3,15m sur 6,68m. 46 personnages et un chien se pressent autour d'une fosse ouverte au premier plan en trois groupes de personnages, les femmes, les hommes et les gens d'église. A gauche le rocher du château, à droite la roche du mont, deux falaises qui surplombent Ornans la ville natale de Courbet. Le fossoyeur a posé sa veste et son bonnet de laine à côté de la fosse qu'il vient de creuser. Les porteurs, gants blanc, chapeau rond, soutiennent le cercueil à l'aide de draps blancs. Le curé a revêtu la chasuble noire de l'office funèbre et les trois sacristains portent une curieuse coiffure. Un enfant de chœur porte un porte-cierge, l'autre tient le vase d'eau bénite.


Les vêtements des deux bedeaux ne sont pas inspirés de peintures italiennes anciennes comme on l'a longtemps cru. En 1994, on a découvert une de ces toques rouges à palmettes dans l'église. Deux personnages seulement ne sont pas habillés de noir. Ils portent redingote avec guêtre pour le premier et bas bleus pour le second ; celui-ci est coiffé d'un bicorne. Ce sont des costumes de 1793, soit un demi-siècle auparavant, sous la première république. Or le tableau est peint sous la deuxième république


Courbet a peint l'enterrement dans le grenier de 4 mètres de large sur 7,4 mètres de long qui lui servait d'atelier. Selon la légende, le peindre doit enrouler sa toile à droite et à gauche pour peindre son tableau. La toile se compose de trois laies dont les coutures sont aujourd'hui visibles. Le format panoramique est souligné par la crête des falaises, le groupe s'étire parallèlement aux contours des falaises. Les personnages sont figurés grandeur nature ce qui renforce l'effet de réalisme du tableau. Pour rompre la monotonie d'un groupe compacte, l'orientation des regards est très variée.

Le moment peint est celui l'arrivée au cimetière. Les gens d'église à gauche, les hommes à droite tandis que les femmes continuent d'avancer pour contourner le groupe des hommes

Sont peints de façon illusionniste, le crâne et les os, le vase, la boule et les plis du drap mortuaire. Mais les personnages semblent aplatis ce qui a choqué à l'époque où l'on a parlé de figurines découpées.


Le tableau est composé selon des principes géométriques simples : la tombe au centre, le crucifix au premier quart et les lignes de fuite de la tombe ont pour point defuite la hampe du crucifix.

Courbet avait obtenu avec un après dîner à Ornans une deuxième médaille qui le dispensait ensuite de présenter ses tableaux au jury. Il espère que le Tableau de figures humaines historiques d'un enterrement à Ornans sera acheté pour le musé de Lille. Ce qui ne sera pas. En 1855 plusieurs toiles de Courbet sont acceptées pour l'exposition universelle mais L'enterrement et L'atelier sont refusés. Courbet, par défi, les expose dans un barrement en face de l'exposition. Il recommencera en 1867.

En 1881, sa sœur Juliette le donne à l'état. Il restera un siècle au Louvre à coté de Gros, Jéricho et Delacroix. En 1986, il est transféré à Orsay.

Deux ans avant de peindre un enterrement Courbet est en Hollande et a vu La ronde de nuit. Autres influences possibles : Goya, des gravures de faire-part, le retour des cendres de Napoléon en 1840.

Le tableau n'est pas du tout représentatif de la population de Ornans où dominent ouvriers, paysans et petits artisans. Courbet peint des vignerons, bourgeois aisés, petits propriétaires, des rentiers, des connaissances.

L'enterrement de la république figurée par l'opposition des républicains et de l'église conservatrice. Le crâne d'Adam apparaît au moment de la mort du christ mais aussi symbole de la franc-maçonnerie avec les larmes symbole de renaissance dans une autre vie. L'animal accompagne l'âme du défunt dans l'au-delà

Plusieurs hypothèses pour l'identité du mort :

Dans les coulisses d'une exposition (7')


 

 
présente
 
Gustave Courbet par Romain Goupil, J.-P. Fargier et Alain Jaubert