Editeur
: Wild Side Video, octobre 2010. Master restauré. V. O. avec sous-titres
français. 10 € chacun.
Après la quatrieme
série Vintage Classics éditée par Wild side
en mai 2010, cette cinquième série propose trois films
noirs, et deux films d'espionnage... Si l'on peut classer ainsi Le
criminel d'Orson Welles (1942). Outre ce film trop peu connu de
Welles, l'un des premiers à montrer les camps de concentrations
nazis, on retiendra aussi Impact
d'Arthur Lubin (1949) pour ces deux héroïnes, celle
perfide de la ville et la fraîche mécanicienne de l'Idaho.
Meurtre
au chenil (ou Le mystère de la chambre close) de Michael
Curtiz
Archer Coe, un riche collectionneur d'objet d'art chinois, est
trouvé mort dans une chambre fermée à clé. Tout le monde pense au suicide
! Sauf Philo Vance le détective qui, lui, a une autre version. Qui démontre
qu'il s'agit en fait bien d'un meurtre. Et qui établit la liste plutôt
étoffée de tous ceux qui avaient intérêt à tuer : sa nièce, sa maîtresse,
ses clients. Vance pourrait résoudre l'affaire grâce à un chien, un
Doberman Pinscher.
Philo Vance est un détective mondain un peu oublié.
Il est le héros de douze romans policiers signé S.S
Van Dine (il s'agit du pseudonyme de Willard Huntington Wright) publiés
dans les années 20 et 30. Philo Vance est bon vivant new yorkais,
porte monocle, a goût pour le poker, les courses de chevaux
et les chiens également -ce qui se retrouve dans le film. Son
aventure la plus célèbre évoque encore un animal
: The Canari Murder Case. D'ailleurs on remarque que tous les titres
de ses romans sont fondés sur la même structure : The
XXXX Murder Case. Le livre est le 6ème, paru en 1933, l'année
ou précisément le film est tourné !
Il existe plusieurs interprètes
au cinéma de Philo Vance : Warren William, Basil Rathbone,
mais William Powell est le meilleur. Trois fois le rôle lui
est confié par la Paramount, notamment pour The Canary Murder
Case aux côtés de Louise Brooks. C'est la dernière
fois que Powell incarne le détective avant de devenir sur l'écran
un autre détective mondain, à savoir Nick Charles, The
Thin Man (en français L'Introuvable).
British
Intelligence service de Terry O. Morse
Pendant la première guerre mondiale. Une infirmière française se
fait passer pour un agent du Kaiser. Elle se rend à Londres et, pour
obtenir des renseignements, parvient à s'introduire dans la maison
d'un haut fonctionnaire britannique. Valdar, le maître d'hôtel, y
est un espion allemand infiltré auquel elle est hiérarchiquement tenue
d'obéir.…
Il s'agit d'une pièce d'Anthony Paul Kelly, déjà
filmée à deux reprises, une première fois en
1926 avec Clive Brooks. Et une deuxième fois en 1930 avec Eric
Von Stroheim. C'est une série B typique, tournée très
vite pendant que la guerre s'intensifie en Europe. Boris Karloff -
qui rappelons-le, est anglais ! - figure au centre du film. Il incarnait
le monstre de Frankenstein quelques années plus tôt.
Il se spécialise désormais dans les rôles de savant
fou transplantant sur l'écran un nombre incroyable d'organes.
Karloff se délecte des rôles de composition, comme celui
de British Intelligence Service ou il porte cicatrice et traîne
la jambe. Le réalisateur Terry O. Morse a signé une
grosse quinzaine de films, des séries B, des Charlie Chan ainsi
que la version américaine de Godzilla d'Inoshiro Honda. Mais
Morse se veut avant tout monteur, et l'on trouve dans cette partie
de carrière plus remplie, des participations aussi bien à
l'Impossible Amour (Vincent Sherman, 1943) qu'à Robinson Crusoé
sur Mars (Byron Haskin, 1964), en passant par Le Dernier de la liste
(John Huston ,1963). La comédienne Margaret Lindsay a partagé
sa carrière entre les rôles secondaires dans les séries
A, comme L'Insoumise et les rôles en vedette dans les séries
B. Bien qu'originaire de Dubuqe dans l'Iowa, elle joue souvent les
anglaises à l'écran, à grand renfort d'accent
distingué. A la Warner Bros, Margaret Lindsay travaille dans
l'ombre de James Cagney (G Men) et de Bette Davis (L'insoumise). On
la voit également aux côtés de Joan Bennett dans
La Rue Rouge de Fritz Lang.
Le balafré
de Steve Sekely
John Muller n'a pas réussi en médecine, mais il a d'autres dispositions,
notamment en matière de délinquance. Il a été condamné pour vol à
main armée avant de se voir confier un travail dans une entreprise
médicale. Sans pour autant lâcher les hold-up, dont un qui précisément
tourne mal. Or, travaille dans son établissement, un psychiatre Victor
Bartok qui lui ressemble comme deux gouttes d'eau, à la seule exception
d'une cicatrice sur la joue. John pourra t'il se substituer à Victor
? Qu'y gagnera-t-il vraiment s'il parvient à ses fins ? Sans oublier
la réaction de la secrétaire qui le connaît si bien.
La carrière de Steve Sekely - pseudonyme d'Istvan Szekely -
est vraiment difficile à suivre. Né hongrois, celui-ci
a dirigé dans les années 30 des films dans son pays
natal, mais aussi en Autriche, en Allemagne et en France (Rouletabille
aviateur avec Roland Toutain). Puis après la guerre, d'autres
films en Italie et en Angleterre. Mais entre ces deux repères,
c'est-à-dire entre 1938 et le début des années
50, il signe plusieurs films à Hollywood, plein de séries
B pour plein de compagnies modestes, des films d'horreurs comme Revenge
of the zombies.
Dans ce panorama cosmopolite, Le Balafré est
certainement son film le plus connu, à égalité
avec The Day of the Triffids (d'après le roman de John Wyndham)
au tournage particulièrement chaotique. Le film sort à
Paris le 3 mai 1950 et il y connaît un certain retentissement
critique. Paul Henreid y interprète un double rôle, lui
qui fut jadis le mari d'Ingrid Bergman dans Casablanca et qui se faisait
allumer sa cigarette par Bette Davis dans Now Voyager. Paul Henreid
lui aussi, comme Sekely, vient de l'Autriche Hongrie, de Trieste très
précisément. Son vrai nom est Paul Georg Julius Herneid
Von Wassel-Waldingau. Le film est sa première production, il
y en aura deux au total, avant qu'Henreid devienne à son tour
réalisateur de cinq ou six films et de beaucoup de télévision.
Daniel Fuchs qui a écrit Le Balafré
est aussi un romancier et un scénariste brillant qui a reçu
l'Oscar pour un film un peu oublié : Les pièges de la
Passion avec Cagney, alors qu'il avant écrit un scénario
bien plus costaud : Criss Cross - Pour toi j'ai tué - tourné
par Robert Siodmak.
Le criminel
de Orson Welles
Konrad Meinike qui vient d'être libéré de prison, est pris en filature
par l'inspecteur Wilson qui traque les anciens nazis. Quand Meinike
demande l'adresse de Franz Kindler, un criminel de guerre, il lui
est remis une carte postale représentant le square de la petite ville
de Harper dans le Connecticut. Franz Kindler y réside. Son nom est
désormais Charles Rankin. Il est professeur. Il mène une vie paisible
et doit prochainement épouser Mary Longstreet. Meinike se rend à Harper,
et Wilson le suit. La chasse à l'homme va se déployer dans la petite
communauté.
Lon
troisième long métrage d'Orson Welles qui en disait lui-même
pis que pendre, par exemple aux Cahiers du cinéma : " C'est
de tous mes films celui dont je suis moins l'auteur. Je ne sais pas
s'il est bon ou mauvais. Les seules choses que j'aime vraiment, ce sont
les notations sur la ville, le droguiste, les détails de ce genre.
"
Il est vrai qu'après le fiasco de It's all True, Welles est
alors commercialement un peu au creux de la vague, il survit grâce
à la radio et c'est International Pictures qui se rapproche de
lui pour prendre en charge la réalisation du projet clé
en main. Le contrat de Welles en reflète certains aspects humiliants,
comme quoi il garantit qu'il achèvera la réalisation,
que sa femme Rita Hayworth s'engage à ses côtés,
qu'il versera certaines sommes d'argent en cas de dépassement
et d'échecs. Et que bien sûr, il n'a aucun droit de regard
sur la version finale.
Welles quand même travaille son sujet dans son coin avec le
scénariste Anthony Veiller. John Huston a de façon anonyme
écrit une bonne partie du scénario et Welles a pu placer
quelques idées, la scène du pharmacien qui joue aux dames
-elle rendra Edward G Robinson fou furieux !- ou encore le dénouement
final qu'il souhaite comparable à une sorte de bande dessinée.
En revanche Welles ne parviendra pas à imposer Agnes Moorehead,
(celle qui jouait la maman de Kane) pour le rôle principal, celui
de l'agent du FBI qui sera confié à Edward G. Robinson.
Cette version est celle qui a été présenté
en salle en juillet 1946, et une partie importante du métrage
est préalablement tombé dans la salle de montage, environ
25 minutes auxquelles Welles tenait, plus particulièrement au
début du film, des scènes de traque de nazis en en Amérique
du Sud.
Welles a un comportement d'une docilité exemplaire sur le plateau.
Il passe tous les caprices de Loretta Young qui ne souhaite pas y entendre
de gros mots. Il accepte les exigences d'Edward G Robinson qui veut
être filmé sous son bon profil. Et il respecte autant le
budget que son calendrier. Le film gagna de l'argent tout de suite,
seul cas dans la carrière d'Oron Welles. Qui déclare immédiatement
" Je l'ai tourné pour montrer que je pouvais être
aussi un bon réalisateur que n'importe qui d'autre ".
Impact d'Arthur Lubin
Un homme d'affaires de San Francisco, Walter Williams, que l'amant
de sa femme essaie d'assassiner en jetant du haut d'une falaise. Patatras.
C'est l'assassin qui meurt à son tour dans un accident de voiture après
avoir accompli son forfait, ou plutôt cru le faire. Car le mari en réchappe
et se cache. Sa femme est envoyée en prison pour complicité de meurtre.
Considéré comme mort, le mari se fait embaucher comme mécanicien dans
un garage et tombe amoureux de sa patronne. Son passé le rattrape pourtant,
les rôles vont changer, et c'est lui qui se voit à son tour accusé de
meurtre…
Impact
est emblématique du film noir américain, en se nourrissant
de nombre de ses différents, du documentaire en montrant en détail
le travail de la police, du drame psychologique dans les rapports entre
les personnages, de la chronique dans la description d'une petite ville
de province. Et bien sûr du suspense le plus classique pour alimenter
toute la dernière partie.
Brian Donlevy d'origine irlandaise est certes un comédien aux
multiples registres, méchant dans Beau Geste par exemple, généreux
en professeur Quatermass dans Le Monstre. Avec plein de rôles
très marqués qui vont de la Clé de Verre au Carrefour
de la Mort en passant par Association Criminelle, Brian Donlevy est
aussi un symbole du polar. Quand il meurt, le Times écrit sur
lui à bon escient : " Toutes considérations sur le
film noir américain ne seront pas complètes sans son évocation
".
Quatre ans après la fin de la guerre, les films montrant la
communauté asiatique de San Francisco, sont assez peu courants.
Jour de terreur
de Tay Garnett
Georges Jones est physiquement et mentalement malade. De plus il
est persuadé que sa femme Helen entretient une liaison avec
son médecin, et que les deux veulent le tuer. Il écrit
à son avocat en détaillant la façon dont son
propre meurtre va être commis. Il fait poster la lettre par
sa femme, puis révèle son contenu à celle-ci
avant de succomber à une crise cardiaque. Comment Helen va-t-elle
pouvoir récupérer un courrier l'accusant d'un meurtre
qu'elle n'a pas commis ?
Après
Voyage sans Retour, Her man, la Maison des Sept Péchés ou encore Le
Facteur Sonne Toujours Deux Fois, Tay Garnett commence à s'orienter
vers la télévision, mais aussi vers l'Europe où il veut passer des vacances.
Il est appelé au dernier moment juste avant que son avion ne décolle
pour Paris par la comédienne Loretta Young qu'il a dirigé à deux reprises
dans le passé et qui lui propose de réaliser son prochain film. Garnett
accepte, car le film représente un défi pour lui : tenir toute une intrigue
dans trois pièces.
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