En compagnie de son valet Sganarelle, Don Juan, un seigneur revendiquant son goût de la liberté, parcourt à cheval les routes du sud de l'Espagne, pour régler des affaires le plus souvent en rapport avec ses nombreuses conquêtes féminines. Dans un village, il humilie un enfant pauvre et pieux en tentant de le faire jurer contre une pièce d'or. Puis il signifie à Elvire, jeune noble qu'il devait épouser, sa décision de rupture. Elvire, outragée, lui crie son désir de vengeance et ses frères se lancent à la poursuite du " grand seigneur méchant homme". Mais Don Juan - que rien n'effraie, pas plus la loi de Dieu que celle des hommes, et encore moins les reproches de son fidèle Sganarelle - pense déjà à une autre femme et monte une expédition en bateau. Tempête, naufrage. Des paysans le sauvent. Il s'empresse de faire la cour à deux filles à la fois, dont l'une est la fiancée du brave Pierrot.
Le voyage continue. Don Juan sauve la vie aux frères d'Elvire quand des brigands les attaquent. Malgré ses déclarations provocatrices, on le sent gagné par une certaine lassitude. Pourtant il invite à dîner la statue du Commandeur, un homme qu'il a tué en duel... et qui donne son accord. Il reçoit la visite de son père, qu'il humilie. Puis Elvire, qui est devenue religieuse, vient exhorter Don Juan à se repentir. Il tente de la séduire à nouveau; elle s'enfuit. Le Commandeur arrive, au grand effroi de Sganarelle. Don Juan troublé rend visite à son père et à sa mère, lors d'un banquet et leur dit qu'il se repent. Puis, après avoir habilement éconduit un créancier, il refuse de se battre avec le frère d'Elvire et avoue à son valet que tout cela est feint, qu'il a décidé de pratiquer l'hypocrisie et la fausse dévotion. Il se rend chez le Commandeur et tombe terrassé au pied de sa statue. Il ne reste plus à Sganarelle qu'à mendier devant une église, en pensant au salaire qu'il n'a pas touché.
Le film fut tourné dans le sud de l'Espagne. Dans son adaptation pour l'écran, Jacques Weber prit quelques libertés avec la pièce de Molière : suppressions (on n'entend pas l'éloge du tabac prononcé au début par Sganarelle), transformation des identités (le pauvre n'est plus un ermite vivant dans une forêt mais un enfant croisé dans un village), interversions des entrées en scène (le pauvre, le créancier Monsieur Dimanche), apparition de nouveaux lieux (la maison du père) et de nouveaux personnages (la mère de Don Juan, qui prononce même quelques répliques puisées dans le rôle du père)...
Michel Boujenah avait déjà joué Sganarelle au théâtre, aux côtés de Gérard Desarthe, dans une mise en scène de Jacques Rosner. Jacques Weber, qui signait là son premier film, avait tenu le rôle-titre sur scène sous la direction de Francis Huster. Weber confiait : "C'est l'histoire d'un type à bout de souffle. (...) Avec des ciseaux et du Scotch, je me suis amusé comme un fou. J'ai coupé en petits morceaux ce texte génialement inachevé, que Molière avait écrit en urgence, quinze jours à peine, sans trop se soucier de la construction, des raccords. " (Télérama, 18 mars 1998)
Jacques Weber
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