Saigon, près d’un terrain de foot urbain, un homme, déguisé en mascotte publicitaire, vient à la rencontre de trois jeunes hommes discutant à table autour d’une bière. Il en est rapidement chassé tout comme un autre marchand ambulant et la conversation des trois hommes continue sur le sujet de la religion, Thien dit qu'il est attiré par la foi mais que sa rationalité l’empêche d'y adhérer. Une jeune femme vantant les mérites d'une nouvelle marque de bière qui vient les interrompre avant que le bruit terrible d'un choc entre deux scooters ne fasse se lever tout le monde vers l’accident : au sol, un homme, une femme et une petite fille.
Les trois jeunes hommes sont maintenant dans le sauna et Thien néglige son téléphone qui sonne. Lors du repas qui suit, ils évoquent l'accident et le fait que la petite fille en soit miraculeusement sortie indemne. Ils se renseignent auprès du serveur quand une cabine de massage sera libre. Bientôt celle de Thien se libère et la jeune masseuse allume avec délicatesse les bougies et prépare les linges. Thien se fait masser et refuse d'être dérangé par son téléphone. Il plaisante; c’est peut-être Dieu qui l’appelle. Il se prépare à être masturbé quand la collègue de la masseuse insiste pour que Thien réponde au téléphone ; ses amis lui disent qu'il s'agit d'une urgence familiale.
Thien se rend à l’hôpital où Dao, son neveu de cinq ans, a miraculeusement survécu à un accident de scooter conduit par sa mère. Dao ne se plaint que d'une égratignure et voudrait surtout revoir sa maman. Thien lui cache la vérité. Sa belle-sœur est morte à la suite à ses blessures lors de son arrivée à l’hôpital. On ne remet à Thien que ses maigres effets personnels dont une photo de mariage entre elle et le frère de Thien.
Thien accueille Dao chez lui et travaille au montage d'un film de mariage qu'il réalise pour gagner sa vie. Quand Dao a peur le soir, il lui fait un tour de magie avec des cartes à jouer.
Le corps de la belle-sœur doit être ramené dans leur village natal. Thien amène avec lui Dao qu’il sert contre lui dans le convoi funèbre. L’assistance est nombreuse pour les funérailles avec fanfare et longue cérémonie. Trung, un autre de ses frères avec qui il partage le coût de la cérémonie, lui prête sa moto pour aller rembourser monsieur Luu du linceul qu'il a confectionné. Après un long trajet en scooter, Thien trouve M. Luu, un vieil homme, ancien soldat, qui lui parle de sa guerre contre les Viêt-Cong et de la blessure par balle qu'il reçut dans le flanc la lui faisant examiner comme le Christ l'avait demandé devant l'incrédulité de saint Thomas.
Dao s'ennuie un peu et Thien lui fait prendre soin des poussins ; puis lui fait enterrer l’oiseau blessé qu'il avait recueilli à Saigon. Thien rencontre sœur Thao qu’il n’avait pas vue depuis son départ. Il avait oublié de revenir vers elle, ce qu'il lui avait pourtant promis quand il était parti pour Saigon avec ses parents. Ceux-ci avaient émigré à l’étranger ; lui était resté dans la capitale vietnamienne. Il lui demande pourquoi elle est entrée dans les ordres. Elle s’enfuit.
Pour le dernier jour du deuil, Trung réussit à capturer un coq sauvage en se servant du sien comme appât. Il va pêcher pour compléter le repas qui sera offert aux invités.
Thien emmène Dao à l’école où travaille Thao et lui demande pardon de sa question lors de leur précédente rencontre, la félicitant pour son travail. Il lui remet la petite clochette dont elle s'étonne qu'il l’ait gardée. Ils avaient admiré ensemble La vie est belle (Frank capra) Chaque fois qu'une cloche teinte un ange obtient ses ailes
Thien prend son grand sac rouge et va visiter un immeuble en ruine dégradé par la pluie où il ressent la présence furtive de Thao ; c’est là qu’ils s’étaient dit adieu, se promettant de se revoir dans de meilleures conditions. Les parents de Thao refusaient qu'elle épouse Thien sans que celui-ci ait un métier ; Thao lui avait donné la petite clochette pour qu'il se souvienne d'elle à Saigon.Il va chanter son amour perdu dans un karaoké de la ville.
Thien part à la recherche de son frère mais son scooter tombe en panne d'essence. Un homme lui en donne en ponctionnant son réservoir. Mais cela ne suffit pas, il le pousse alors vers un petit garage ou la grand-mère prétend être revenue des morts et appelle les humains à se dépouiller de leurs attaches terrestres; Thien repart mais un troupeau de buffles barre la route. Il se réveille devant une bâtisse fermée et tente de reprendre la route mais la pluie tombe très fort jusqu'à ce qu'il atteigne l’arbre aux papillons d’or. La pluie a cessé et Thien lave son scooter maculé de boue. Il est chez la nouvelle femme de son frère qui calme son bébé tout en préparant le déjeuner de son mari qui cultive les vers à soie.Thien la conduit sur son scooter et s'étaonnat quil ne soit paslàs afemmepart à sa rencontre luilaissant son bébé. Thien fait quelques pas vers la rivière.Il se réveille sur son scooter. Un paysan lui demande de laisser libre le passage et dit ne pas connaitre le frère de Thien; Thien descend vers la rivière, se déshabille puis va s'allonger dans la rivière.
La foi étant le sujet du film, ou plutôt sa quête, sans doute faut-il prendre au sens littéral la boutade de Thien quand la masseuse l'interroge sur son correspondant au téléphone auquel il ne veut pas répondre. Sans doute s’agit-il de Dieu qui l'appelle après l'accident de sa belle-sœur. Cet accident avait été annoncé par celui qui ouvre le film à la fin du plan-séquence initial. Il s'agissait alors d'un homme, d'une femme et d'une petite fille qui avait miraculeusement survécu à l'accident. Une sorte de signe divin fait à Tien qui s’accrochait au rationalisme pour ne pas croire.
Si le film est ancré dans la religion catholique, minoritaire au Vietnam, il s'inscrit plus généralement dans une quête de spiritualité. En ce sens, les plans longs sont parfaitement appropriés au propos du réalisateur. Le plan long se distingue du plan-séquence qui implique une virtuosité à faire tenir plusieurs actions dans une seule séquence. Il s'agit plutôt là, notamment autour de longues discussions, de trajets en scooter, de capter de l'inattendu sans l'artifice d'un montage qui désigne ce qui doit être vu. Le plan long désamorce la continuité dramatique, rend quasiment impossible de savoir quand il va s’arrêter et ce qui va suivre ; expérience un peu éprouvante pour le spectateur habitué à se laisser guider par la prise en charge du récit par la réalisateur.
Ici rêve et réalité se mêle dans une forme de boucle qui implique de lâcher prise dans la quête d'une action réparatriceque ce soit celle de l'amour perdu de Thao ou le décès de la belle-sœur en trouvant un père pour Dao.
L'amour de Thao inaccessible pour Thien | Autrement que dans le rêve d'autrefois |
A l'intérieur du cocon de soie (titre original), comment percevoir l'extérieur, comment effacer la brume des montagnes pour atteindre Dieu qui s'y cache peut-être ? L'incrédulité de saint Thomas (Caravage, 1603), allégé des autres deux saint observateurs, est reproduit lorsque Mr Luu cherche à montrer la preuve qu'il a été blessé au flanc ; lors de sa recherche d'un père pour Dao, Thien se trouve en rêve bloqué par un troupeau de buffles ; un christ émerge dans l’eau.
route barrée pour une quête inutile | La présence du divin dans l'eau de la rivière |
Le discours de la grand-mère dans l'atelier de réparation de scooters vise à se dépouiller des recherches inutiles pour se laisser envahir par la présence divine, perçue dans les rêves.
L'arbre au papillon d'or (beau titre français qui cherche une transposition au titre original) que voit Thien à la fin de l'orage ouvre sur son rêve d'un cocon familial possible pour Dao dont il se réveille en acceptant de se laisser baigner par l'eau de la rivière.
Jean-Luc Lacuve, le 21 septemre 2023