Un homme et deux femmes sur un bateau dérivent en pleine mer. L'eau manque comme la nourriture. A l'avant du bateau, la première jeune femme se souvient.
Un gardien la fit sortir de prison. Elle s'enfuit à pied et en train. Occupée à coudre, elle lit dans un journal que l'étau se resserre autour d'elle.
Sur le bateau, la seconde jeune femme, jusqu'alors endormie, se réveille. L'homme lui vient en aide. Il se souvient.
Il se souvient des jours heureux où avec elle, il se promenait sur la plage. Mais le manque d'eau trouble son souvenir qui revient obstinément à la fontaine du village.
Sur le bateau, la première jeune femme tente vainement de faire avancer le bateau avec une pagaie. La seconde pose sa main sur l'homme qui constate que le bateau commence à prendre l'eau. Autrefois, la jeune femme rentrant chez elle aperçu un homme endormi qu'elle reconnu mais préféra fuir, songeant même à se jeter à l'eau.
Autrefois, alors qu'il s'en allait au cimetière poser une fleur sur la tombe de sa femme, il fut pris à parti par un homme qui l'accusa de sortir avec sa femme comme lui-même sans doute sorti avec la sienne morte ici. L'homme marche, marche et appelle avant de s'écrouler devant des barbelés.
Sur le bateau, la première femme croit apercevoir quelque-chose au loin. L'homme se jette à l'eau et se noie. La seconde jeune femme cherche à agresser la première mais c'est elle qui prend un coup certainement mortel. La première jeune femme regarde devant elle et s'imagine une mer agitée. Pourtant rien ne bouge si ce n'est que le bateau prend l'eau puis coule.
La première jeune femme s'accroche encore à une planche puis rien : la mer étale. Au loin des oiseaux s'envolent. Retour de l'image de la femme entourée des bras d'un homme menotté.
Tout comme de nombreux artistes brésiliens de son temps, Mario Peixoto a été fortement influencé par l'art européen. Son séjour en Angleterre à la Hopedene School de Willingdon dans le Sussex en 1926-7 à l'âge de 19 ans, lui permettra non seulement d'assumer son homosexualité mais lui donnera une solide connaissance des films russes et allemands. Il y admirera le travail de Fritz Lang, Georg Wilhelm Pabst, FW Murnau, Ernst Lubitsch, Sergei Eisenstein et Vsevolod Poudovkine.
Ses contacts avec la scène artistique locale de Rio de Janeiro, comme avec le cameraman Edgar Brésil, le réalisateur Adhemar Gonzaga (Peixoto est assistant sur Barro Humano en 1927) ou le critique et écrivain Octávio de Farias affermissent sa vocation.
Peixoto déclare avoir commencé à travailler sur Limite en août 1929, lors de son deuxième voyage en Europe. En se promenant à travers Paris, il a vu une photographie d'André Kertesz dans Vu, un magazine français qui publiait d'autres célèbres photographes comme Man Ray. C'est cette image d'une femme menottée et embrassée par un homme qui le conduit à écrire le scénario de Limite. Cette image ouvre et clôt le film.
Le scénario, publié pour la première fois en 1996,avec ses 220 plans décrit très précisément les positions de caméra, les angles et les mouvements que le caméraman Edgar Brésil devra utiliser. Le montage final du film de Peixoto suit de très près le scénario.
Chef-d'uvre maudit, longtemps invisible, le film a été restauré par Walter Salles et Martin Scorsese réunis sous l'enseigne de la World Cinéfondation et présenté à Cannes en 2007.
Source : Michael Korfmann sur sense of cinéma