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My dinner with Andre

1981

Avec : Wallace Shawn (Wally), Andre Gregory (Andre), Jean Lenauer (le serveur). 1h50.

dvd chez Carlotta Films

Wallace Shawn, 36 ans, est un New-yorkais pas très fortuné - dans tous les sens du terme : auteur de théâtre, il n'arrive pas à placer ses pièces, et par voie de conséquence, il ne parvient pas non plus à payer ses factures ! Ce soir là, Wally (comme on l'appelle familièrement) a un dîner avec André Gregory, ancien ami et metteur en scène que personne n'a revu depuis des années.

Lorsqu'il arrive dans le restaurant très chic où ils se sont donnés rendez-vous, Wally retrouve un André au sommet de sa forme, et, pendant l'heure et demie que va durer le dîner, il va le presser de questions. Il s'avère que l'une des expériences qui ont le plus marqué André au cours des 5 ans qu'il a passés loin de New York est un séjour dans une forêt polonaise, à l'initiative de Grotowski, célèbre metteur en scène de théâtre expérimental : avec un groupe d'hommes et de femmes dont il ne comprenait pas la langue, André a vécu dans une totale liberté. Le dernier jour on lui a offert une cérémonie en forme de baptême qui l'a complètement transformé. Revenu à New York, André s'est naturellement dit qu'en comparaison les citadins menaient une vie de robot, confortable et insensible.

Il a poursuivi ses expériences avec Grotowski et dirigé une transe collective avec un "essaim" de 100 personnes se réunissant le soir à 20 heures pour des exercices théâtraux consistant à improviser sur un lancer d'ours en peluche blanc, à réciter des chants répétitifs à la lumière de centaines de bougies.

Il a aussi dirigé une performance simulant un avion en panne où deux acteurs se sont mariés. Il a reçu une lettre qui lui a fait comprendre qu'il fallait apprivoiser les acteurs comme saint Exupery dans Le petit prince. Il a enfin compris que le sens de la vie est connecté au sens de la mort.

Il a enfin subi une effroyable expérience dans le désert pour avoir voulu se documenter pour une mise en scène du Petit prince et où n'a cessé de penser à sa femme Chiquita. Cette expérience, il l'a mené avec Kozan, un moine asiatique qui a fini par s'installer chez lui jusqu'à ce qu'il ne le supporte plus, voyant en lui un monstre le jour de Noël.

Mais Wally, qui, jusqu'à présent, n'a fait que questionner, intervient à son tour et donne sa vision du monde : ancré dans sa petite vie quotidienne, il est toujours actif même s'il n'obtient pas de résultats immédiats, et il ne pose pas trop de questions métaphysiques.

André essaie inutilement de convaincre à nouveau Wally qu'il y a une autre façon de vivre. Ils sont les derniers à quitter le restaurant. Dans le taxi qui le ramène chez lui -André a payé la note- Wally repense à toute cette conversation, et apprécie les petits riens des rues de New York qui lui rappellent tous un souvenir qui lui fait chaud au coeur.

Louis Malle est un cinéaste qui cache sous une forme classique et une psychologie subtile le désir de mettre à nu les passions vénéneuses cachées chez les individus. On comprend ainsi qu'il ait été enthousiasmé par le scénario écrit par les deux protagonistes à partir de leurs expériences personnelles. L'un écrivait ce que lui racontait l'autre pour échapper à la dépression que le second avait subie ; les deux hommes espérant tirer un film de cette thérapie.

Wallace Shawn fait assez souvent penser à Woody Allen. Même aspect modeste, même recours à la voix off et même auto-ironie " Enfant je ne pensais qu'à l'art et à la musique, aujourd'hui, à 36 ans, qu'à l'argent". Debby sa compagne est obligée de travailler comme serveuse pour subvenir aux besoins du couple et il se plaint de constater les réactions de ses amis comme s'il avait annoncé "qu'elle allait en prison pour avoir tué leurs enfants"

Le sens du film et de la conversation entre les deux hommes se retourne plusieurs fois. Wally craint d'abord qu'André ne soit complètement névrosé. Il aurait sangloté sur une réplique de Sonate d'automne : "J'existe dans ma musique mais pas dans ma vie". André montre pourtant une superbe infaillible. Certes, il se demande "Qui suis-je?", "D'où je viens", "Où vais-je ?" Mais il semble riche et est un protégé du célèbre Grotowski.

Les expériences décrites semblent toutefois de plus en plus grotesques et Wally tente d'imposer son point de vue. André le renvoie alors à son échec. Sans doute ne faut-il pas montrer au théâtre des solitaires confrontés à la violence comme dans la vie. Si on montre un monde sans issue, le spectateur devient passif.

Sur la première gymnopédie de Satie, c'est néanmoins Wally qui semble avoir raison, appréciant les petits riens des rues de New York qui lui rappellent tous un souvenir qui lui fait chaud au coeur alors qu'André a fini par montrer une incroyable misanthropie.

Test du DVD

Editeur : Arte Edition. Octobre 2009.

Supplément :

  • Entretien inédit avec les acteurs Wally Shawn et André Grégory (50')

 

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