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Adieu au TNS

1998

Vidéo. Avec : Jean-Luc Godard. 7'20.

Lettre filmée qui s'adresse au TNS, le Théâtre National de Strasbourg avec lequel Godard voulait collaborer et dont il reçut plusieurs refus cinglants. Composée en trois actes (plan d'ensemble, plan américain, plan rapproché hanche) où, à chaque fois, Godard allume une nouvelle cigarette pendant que les trois mots du titre, s'affichent. Il parle alors face à la caméra en piétinant comme un amoureux éconduit qui "chante" sa complainte :


"O vous jeunes maîtres et maîtresses
Acceptez la complainte d'un voyageur
Qui poursuivit une princesse
Dans un théâtre - Ciel quel malheur !"

"Je ne sais pourquoi doux camarades
Faut-il tellement que je supplie
Et vous jeunes et belles amies
Pourquoi faut-il que je mendie"

"La parole sort de la bouche
Peut-on l'embrasser ma très chère
Avant que tu prennes la mouche
Et réclame comme le putois
Que la vie privée est force de loi"

"Vous qui chaque soir sous l'oreiller
Claudel Artaud Molière trouvez
Antigone et Lorenzaccio
Des fois pensez à l'autre idiot
Ramant pour aligner trois mots"

Dans les noirs, entre les plans, on entend Godard allant vers la caméra pour se recadrer et écraser sa cigarette.

Dans un entretien avec Alain Bergala, Godard précise que personne n’a vu ce film sauf les gens du TNS. "On peut montrer le texte, que j’ai écrit, mais pas le film" (Texte publié dans JLG par JLG tome 2, Alain Bergala). Puis il ajoute qu’il s’agit "d’une lettre d’un théâtre privé à un théâtre d’Etat, si l’on peut dire".

Comme une lettre écrite, le pocédé cinématographique, bien que très préparé est simple (personnage, décor et costume identiques). Godard est seul et fait lui-même les recadrages sur lui-même qui fait l'acteur entre les plans. Il ne cache pas son ton texte posé sur la table. Dans un mélange d'immédiateté et de maîtrise Godard évoque sa tristesse, son amertume de s'être vu refuser cette collaboration. Se comparant à l'idiot de Dostoïevski, il semble mettre son âme à nu avec une simplicité et un manque de roublardise, de cynisme rare.

 

Sources : les indispensables Shan et Gols sur Shangols ; Rayon polar.

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