Element of crime

1984

Voir : photogrammes
Genre : Film noir
Thème : Serial Killer

(Forbrydelsens element). Avec : Michael Elphick (Fisher), Esmond Knight (Osborne), Me Me Lai (Kim), Jerold Wells (Kramer), Ahmed El Shenawi (Le psychiatre), Astrid Henning-Jensen (La gouvernante). 1h44.

Le Caire. Dans la moite atmosphère de son cabinet, un psychiatre ventripotent tente de soigner Fisher par hypnose. Il lui recommande de fantasmer, de se laisser guider mais de ramener des faits. Fisher a tout abandonné, même sa femme, il y a deux mois de cela pour partir en Europe. Il en est revenu et souhaite se débarrasser des migraines qu'il a depuis. S'il veut s'en débarrasser, il va lui falloir remonter dans le temps ; revenir au commencement dans cette Europe qui l'obsède.

Il y a deux mois donc, il revenait en Europe après treize ans d'absence, rappelé pour résoudre une affaire criminelle. Il avait commencé par une visite au vieil Osborne, qui fut son professeur à l'académie de police. Il lui offre sa traduction en égyptien de son ouvrage, "The Element Of Crime" devenu l'un des éléments essentiels de sa philosophie, même si son auteur, pour qui le policier doit nécessairement s'identifier au criminel, rejette désormais ses théories (L'élément du crime n'est pas toujours sociologique, on le trouve dans la nature humaine). Osborne ne se souvient pas avoir donné son accord pour cette traduction, comme il se souvient de peu de choses depuis sa disgrâce de l'académie de police. Il regrette surtout sa femme, morte, son sourire enjoué.

Fischer est alors appelé au téléphone par Kramer. C'est Kramer, le chef de la police, qui l'a fait revenir en Europe. Il l'appelle car une gamine a été retrouvée étripée au port. Kramer sait qu'il est un mauvais policer qui n'a obtenu son poste que parce que Osborne et Fischer en ont été chassé par des chantages diverses. Sa police étant incapable. Il supervise ainsi Fisher qui enquête sur les meurtres atroces ayant pour victimes de jeunes vendeuses de billets de loto.

Le médecin légiste lui apprend que la jeune fille est morte par suffocation et a ensuite été mutilée avec un tesson de bouteille. Un pneumatique lui donne des photographies accompagnant un rapport de filature d'un mystérieux Harry Grey.

Puis Fisher est contacté par la gouvernante d'Osborne : celui-ci s'est évanoui. Quatre meurtres commis à un mois d'intervalle rapport avec la géographie d'un rapport de filature vieux de trois ans d'un certain Harry Grey : Halberstadt, Friedlingen, Oberdorf et Neukalau. Un carré parfait ; son œuvre accomplie, Grey pouvait mourir. Il craint que son professeur soit menacé? Sa femme n'était qu'une jeune femme ramené il y a un mois et qu'il n'a gardé qu'une semaine chez lui mais en laissant l'enfant.

Le psychiatre lui rappelle qu'avec ce rapport vieux de trois ans on est loin des meurtres du loto. Des exercices mentaux pour aider à saisir le comportement des criminels; reconstitution de ce que l'on sait de la vie du criminel. Sorte de portrait psychologique qui permet au policier de retrouver par déduction ce qu'il ignore des activités du criminel et ainsi d'élucider le crime

Un nouvel appel de l'hôtel Schatz de Halberstadt pour ouvrir le placard de Hary Grey. Vit du tourisme des meurtres et des talismans et le bordel de Mme Gerda où il rencontre Kim, une prostituée qui s'offre à lui pour un entracte.

Il la retrouve une fois le ferry pris à Friedlingen. Il lui ait l'amour sur sa WW1200. A l'hôtel Elite, Fisher signe sous le nom d'Harry Grey. Le concierge le reconnait pour être venu il y a deux mois set avoir réservé la chambre pour deux nuits set commandé un médicament, de la salicyne, contre les migraines. C'est un aphrodisiaque, il oublie sa femme et sa petite étoile bleue au dessus du sein droit. Sur la photo, Fisher découvre l'endroit où a été enterrée la victime : une fosse sceptique dans laquelle débarque bientôt Kramer. Mais cette victime du loto cachée ne correspond pas à la technique de Grey; il s'agit d'une victime pour prouver une théorie.

Dans son errance d'une nuit Fischer établit une nouvelle théorie : si l'on prend le port de Innenstadt comme centre et que l'on rapporte les quatre autres points, on obtient une nouvelle figure à la place du carré : un H avec deux nouveaux points Drittenmarsk et Halle. Il va ainsi commettre son septième et dernier meurtre à Halle dans une dizaine de jours. Kim vaudrait arrêter ce jeu.

Un Harry Grey est venu il y a deux mois et non pas trois ans. Harry la contraint à dire qu'elle a eu un enfant de Grey

Il comprend en voyant le sang qu'il a suivi la même route que Grey. Il avait trouvé la même fille, Kim qui avait été avec Harry, il se débarrasse des pilules. Il est trop fatigué pour continuer et nécessité d'une discipline : ne pas avoir faim du coupable

Un télégramme d'appel à l'aide pour une petite fille du loto adressé par quelqu'un qui connait Osborne. Fisher tente de la sauver, dresse un piège contre Grey mais c'est lui qui est victime de migraine et effraie la fillette qui  prend peur. Pour l'empêcher de crier, il l'étouffe. Les habitants se jettent avec un élastique à la cheville du haut d'une tour.

Kramer a reçu une confession d Osborne, c'est lui qui est responsable du meurtre du port et du dernier, ici  à Halle. Quand Harry Grey est mort il a poussé la théorie encore plus loin. Kramer découvre le corps d'Osborne, pendu. Kim est là aussi avec son fils. Fisher s'enfuit sous la pluie puis découvre, sous terre la cache d'un lémurien qui le regarde de ses grands yeux. Il veut que cesse l'hypnose et rentrer chez lui.

L'intrigue possède un fil conducteur mais n'est pas pour autant totalement explicable. Seuls trois meurtres sont montrés, l'un assurément commis par Osborne, l'autre par Osborne sur le lieu du dernier crime de Grey et l'autre probablement par Fisher. Or il en faudrait au moins sept pour assurer une logique qui va des quatre meurtres en carré de Grey aux trois qui le complètent en dessinant un H. Néanmoins, ce portrait d'un serial-killer s'incarnant dans trois personnages successifs pour accomplir sept meurtres est pour le moins original. L'univers plastique n'est pas moins étonnant, jouant sur quelques tâches de couleurs au milieu d'un univers d'eau et de flammes.

Une intrigue psychanalytique lacunaire

Fisher subit l'hypnose dans le but de se défaire de migraines qui l'assaillent depuis son retour au Caire. Il y a deux mois, il avait tout quitté, même sa femme, pour résoudre une énigme policière, les meurtres du loto, en Europe. Fisher était treize ans plus tôt un policier qui avait dû s'exiler pour une raison qui restera mystérieuse et ce retour, deux mois plus tôt, constituait donc une sorte de seconde chance. Il renoua ainsi avec celui qui l'avait formé à l'école de Police, le vieil Osborne qui habite toujours Innenstadt (ville à la consonance allemande mais qui, comme toutes les autres citées dans le film, est imaginaire). Celui-ci semble s'être éloigné de ses anciennes théories qui sont toujours la base de la philosophie de Fisher et qui sont rassemblées dans un livre-méthode The element of crime.

Mais un second crime est commis sur la personne d'une fillette dans le port d'Innenstadt et Kramer, le chef de la police qui a fait revenir Fisher en Europe, souhaite qu'il résolve cette affaire. Il lui fait parvenir des photos qui accompagnaient un mystérieux rapport de filature d'un certain Harry Grey. Rappelé d'urgence chez Osborne victime d'un malaise, Fisher tente de savoir qui fut ce Grey. Osborne lui tend alors une photographie prouvant que Grey s'est tué trois ans plus tôt après avoir commis quatre meurtres. Osborne l'avait suivi dans ces quatre villes formant un carré où il avait commis ses meurtres et avait écrit un rapport de filature. Fisher ne croit pas que la photographie prouve la mort de Grey et il pense que celui-ci menace son vieux professeur. Fischer apprend plus tard qu'il lui a déjà menti : Osborne n'a jamais été marié et l'enfant qui vit chez lui est le fils d'une femme qui n'est resté qu'une semaine chez lui. Dans la chambre de l'enfant,  Fisher découvre un cahier déchiré sur lequel il fait des dessins et qui est le fameux rapport de filature.

Fisher reçoit un second appel téléphonique et se rend alors à Halberstadt, ville où fut commis le premier meurtre de Grey. Il y rencontre Kim avec qui il fait l'amour et qui le suit à Friedlingen où il découvre un cadavre jusqu'alors caché dans une fosse septique. Au cours d'une nuit d'errance, Fisher place la seconde vague des meurtres du loto dans la géographie des quatre premiers meurtres de Grey et en déduit une nouvelle figure du crime, un H, qui le fait penser qu'un dernier crime aura lieu à Halle. C'est probablement lui qui étouffe la dernière petite fille mais comme Osborne a avoué en avoir eu l'intention avant de se suicider et il n'est ainsi pas inquiété. Néanmoins, lui aussi s'est identifié à Harry Grey, en connait les migraines. Il a probablement compris que comme l'âne qui hante ses rêves, il avait assumé une trop lourde charge. S'identifiant au petit lémurien découvert sous terre, il veut être rappelé à la réalité et terminer ce cauchemar qu'il faudra interpréter.

L'univers plastique d'un monde parallèle

Il s'agit d'un voyage mental et Fischer patauge dans l'eau de sa mémoire qui participe à la déformation de ce monde fantasmé dans lequel il essaie de trouver l'origine de sa migraine. L''eau est associée à l'Europe et au passé alors que les flammes, le sépia, l'orange qui imprègne la pellicule sont peut-être une force du rappel de sa situation présente, au Caire. Comme si l'Egypte en dépit des imprécations du psychiatre (quittez le sable, le désert) n'était quand même jamais bien loin.

Au sein du souvenir d'eau et de flammes de taches vertes (tubes fluorescents, lumière du gyrophare) et rouge (feux de la voiture de Grey, ampoule de la chambre, sang de Kim) se détachent alors que les surimpressions se multiplient.

Autres éléments du rêve : déformations des postures, penché sous la table pour le téléphone ou petite voiture de police se transformant en vraie ;  comptines effrayante des enfants : "Voici la bougie pour aller vous coucher, voici le tranchoir pour vous couper le cou. Coupe, coupe, le dernier est un homme mort.

Jean-Luc Lacuve le 15/11/2014