Chronique d'Anna-Magdalena Bach

1968

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(Chronik der Anna Magdalena Bach). Avec : Gustav Leonhardt (Johann Sebastian Bach), Christiane Lang (Anna Magdalena Bach), Paolo Carlini (Hölzel), Ernst Castelli (Steger), Hans-Peter Boye (Born), Joachim Wolff (Le recteur), Rainer Kirchner (Le Superintendent), Eckart Bruntjen (le prefet Kittler), Walter Peters (le prefet Krause), Kathrien Leonhard (Catherina Dorothea Bach), Nikolaus harnoncourt (Le prince Leopold d'Anhalt-Cöthen). 1h33.

dvd aux Editions Montparnasse

Dans la chambre de musique du château du prince d'Anhalt-Cöthen, Bach joue la grande cadence du concerto brandebourgeois n°5, assis au clavecin. Un groupe de musiciens, avec le prince d'Anhalt-Cöthen à la contrebasse, l'accompagne pour conclure l'allegro du concerto.

Anna Magdalena, assise dans un fauteuil devant une fenêtre dit qu'il était maitre de chapelle, directeur des musiques de chambres à la cour d'Anhalt-Cöthen où elle était elle-même cantatrice. Bach était alors veuf depuis un an et avait quatre enfants. Pour le plus âgé, il avait composé un petit livre de clavier dans lequel différents exercices s'ajoutèrent et qui devinrent deux œuvres particulières à l'usage de la jeunesse musicale désireuse de s'instruire en 1722 et 1723.

Anna Magdalena joue le menuet n°2 de la suite en Ré mineur du petit livre de clavier pour Anna Magdalena qui, dit-elle, il composa pour elle. Bach et sa fille de treize ans font la révérence qui clôt la danse du menuet.

Bach bénéficie de la protection du prince qui joue avec lui l'adagio de la sonate n°2 en ré majeur pour viole de gambe et clavecin. Mais, lorsque le prince se maria avec une princesse de peu d'inclination musicale, Bach fut appelé à Leipzig comme directeur de musique et cantor à l'école saint Thomas. Comme cela ne convenait pas à Bach, sa résolution traina un trimestre.

Anna Magdalena, sur le largo de la sonate en trio n°2 en do mineur pour orgue, rappelle alors les voyages de la jeunesse de Bach pour écouter de bons organistes, à Lüneburg ou, de nombreuses fois à pied, à Hambourg. A dix-huit ans, il est organiste à Arnstadt. Il fait le voyage à pied jusqu'à Lübeck pour écouter Dietrich Buxtehude. Il est ensuite appelé à Mühlhausen puis à Weimar chez le prince qui lui demanda de travailler pour l'orgue.

Mais Bach ne pouvait pas, tant ses taches d'enseignement du chant et de composition pour chaque dimanche, énumérés longuement et précisément par Anna-Magdalena lui prenait tout son temps à Leipzig.

Dans l'église saint Thomas de Leipzig, un orchestre et un cœur dirigés par Bach interprètent le Magnificat en ré majeur BWV 243.

Dans l'appartement des Bach, Anna Magdalena, assise à l'épinette, joue le tempo di gavotta de la partita en ré mineur du petit livre de clavier A.M.D. BWV830 de 1725. A ses pieds, sa fille Christina joue avec une poupée. Ses deux premiers nés avec Bach sont morts. Elle se réjouit qu'en 1726, Bach ait fait imprimer pour la première fois une partition.

Dans une salle de l'université de Leipzig, Bach dirige, assis au clavecin, un ensemble qui joue les 2e et 3e mouvements de la cantate BWV 205, "Eole apaisé". Bach est en effet sollicité par les étudiants. Mais son succès suscite des jalousies notamment lors de l'exécution de la musique funèbre pour la mort de la reine Christiane Eberhardine. Bach obtint comme une faveur de diriger à la tribune de l'orgue sa propre composition, l'ode funèbre BWV 198 (qui deviendra le chœur final de la passion selon saint Marc.)

Un an après, mourut le prince à Cöthen et, comme ancienne cantatrice, Anna-Magdalena chanta sous la direction de son mari le 24 mars 1729 la musique funèbre BWV 244a en sa mémoire. Et trois semaines plus tard, Bach dirigeait La passion selon saint Mathieu BWV 244 à Leipzig (plan de mer).

Pourtant, dans la salle du conseil municipal de Leipzig, trois conseillers se plaignent que Bach ne respecte pas toutes ses obligations d'enseignement. Bach, chez lui, rédige un mémoire où il se plaint de ce que le conseil refuse de payer des musiciens associés aux étudiants bénévoles de Leipzig pour exécuter correctement ses compositions.

A saint Thomas, il dirige à l'orgue la symphonie d'introduction de la cantate BWV 42, "Mais au soir du même sabbat" puis indique au ténor de chanter. Bach se plaint off des mauvaises conditions économiques qui lui sont faites à Leipzig et demande à des amis de solliciter pour lui un autre poste.

A l'orgue de l'église de Dresde, Bach joue, mains sur le clavier et pieds sur le pédalier, le prélude en si mineur pour orgue BWV 544. Anna-Magdalena raconte ses voyages à Dresde où il fut appelé comme organiste de l'église sainte Sophie ainsi qu'à Cassel où elle l'accompagna. Durant ce temps, ils perdirent trois enfants en bas âge.

Kyrie Eleison de la Messe en Si mineur BWV 232 que Bach dédie au nouveau prince électeur de Saxe à Dresde. Celui-ci prend la succession de son père et Bach lui demande de lui conférer un titre à sa cour. Lorsque le prince se déplace à Leipzig, Bach et ses étudiants l'honorent d'un concert nocturne avec la cantate BWV 215. Bach donna ensuite des oratorios pour Noel et l'ascension (plan de mer).

Bach se plaint au surintendant des diocèses de Leipzig de ce que le recteur lui retire son premier préfet Kittler pour lui imposer Krause, 21 ans. Celui-ci dirige le motet ordinaire pour le XIe dimanche de la trinité. Il est chassé par Bach. Le recteur s'en va puis revient dire à Bach que le surintendant lui a donné raison et que personne ne dirigera à la place de Krause. Ce même soir au réfectoire, Bach reproche à Kittler de ne pas avoir osé diriger et lui demande de quitter la salle.

Sur une gravure de la ville de Dresde par Canaletto, Anna Magdalena explique que Bach échoua à faire revenir le conseil sur sa décision mais que le prince électeur le nomma compositeur de la cour. Il donna ainsi sur le nouvel orgue de l'église de Notre Dame à Dresde un grand concert. Il put alors demander au roi lorsque le service de Kraus fut arrivé à terme de lui restituer pleine autorité sur l'école ce que le roi exigea du conseil. Bach joue le choral Kyrie, "Dieu saint esprit" BWV 671 de la troisième partie de la méthode de clavier.

Bach dicte à ses élèves hors champs des extraits d'un manuel de Friedrich Erhnard Niedt sur le rôle fondamental de la basse continue et l'illustre d'exemples au clavecin. Anna Magdalena souligne l'excellence de son travail de pédagogue et de bon père. Il cherchait à tout mettre en œuvre pour aider et promouvoir le bien être de ses enfants. Si Friedemann fut appelé à Dresde, Bach n'eut pas le même succès avec Bernhard qui ne remplissait pas les missions fixées et dépensait sans compter si bien qu'après plusieurs mises en garde, Bach lui coupa les vivres espérant que Dieu entendrait sa souffrance. Mais Bernhard mourut brusquement à Iéna où il était étudiant en droit. En cette année 1739, Bach publia sa troisième partie de la méthode de clavier.

Bach héberge chez lui son jeune cousin étudiant en théologie, Johann Elias Bach, qu'il fait progresser en musique. Celui-ci interprète l'andante du Concerto dans le goût italien. Anna Magdalena ajoute que, pour elle-même, Bach fit venir des plantes pour le jardinage et une linotte en cage afin qu'elle lui apprenne à chanter. Alors qu'elle était malade, Bach se hâta de rentrer de Berlin où il était en voyage (off duo n°1 de la cantate BWV140)

Le soir, Bach joue la 25e variation Goldberg BWV 988. Ces variations écrites pour les insomnies du comte Keyserlingk lui valurent cent Louis d'or. Johann Elias annonce à Anna-Magdalena (et Bach hors champ), le suicide du vice-recteur. Anna Magdalena note que, dans ses dernières années, Bach redonna quelques morceaux d'église d'autrefois, ainsi la cantate BWV 82 "J'en ai assez".

Bach est grand-père car Emanuel a un fils. Il voyage avec Friedemann à Berlin puis va à Potsdam à la demande du roi qui joua un thème de fugue que Bach développa et qu'il joua le jour suivant à l'orgue et qui deviendra l'offrande musicale BWV 1079 (fond noir). A Berlin, Emanuel lui montre le nouveau bâtiment de l'opéra à l'acoustique si particulière.

Revenu à Leipzig, Bach travaille au clavecin l'offrande musicale BWV 1079 qui, dit il au roi, fut inspirée par lui lors de leur rencontre et qu'il lui dédie. Bach est honoré à Leipzig. Sa petite fille, Regine Susanna, se réjouit des cadeaux pour son père reçus du cousin Elias. Alors que l'art de la fugue BWV 1080 se déploie off, Anna-Magdalena parle du mariage de leur fille Liegen, de leurs cinq enfants qui restent encore à la maison alors qu'un sixième reçoit un poste de musicien quelques semaines avant la mort de Bach.

Bach travaille beaucoup mais ne peut finir L'art de la fugue et n'en prépare qu'une partie pour la gravure empêché qu'il fut par une maladie des yeux dont il ne put se défaire malgré plusieurs opération. Anna-Magdalena explique, sur un plan de Bach debout avec off le choral pour orgue "Devant ton trône, je parais" BWV668 qu'après quatre mois de maladie, Bach recouvrit brusquement la vue un matin. Il fut néanmoins pris le jour même d'un coup de sang et d'une forte fièvre à laquelle, malgré tous les soins possibles, il succomba un soir doucement et saintement.

Quelques mois après la mort de sa première femme en 1720, Jean-Sébastien Bach épousa la chanteuse Anna-Magdalena Wülken. Prenant pour point de départ la date de son mariage, Anna-Magdalena Bach évoque les différentes étapes de la vie du compositeur allemand ; de ses démêlés avec ses nombreux protecteurs, princes et mécènes, jusqu'à sa mort, le 28 juillet 1750.

A l'inverse de l'usage habituel, les Straub souhaitent que ce soit la musique qui soit au centre du film et que l'image l'accompagne. La musique n'est en effet pas seulement le sujet du film, mais la matière dont il est fait. L'image n'a qu'une fonction d'illustration dans la plupart des longs et beaux moments d'exécution musicale. Ceux-ci valent alors pour eux-mêmes, dégagés des fonctions dramatiques illustrant la vie du compositeur comme c'est habituellement le cas. On notera néanmoins que le largo de la sonate en trio est particulièrement bien adapté aux pérégrinations de jeunesse de Bach, que choral Kyrie, "Dieu saint esprit" BWV 671 souligne le triomphe de Bach auprès du conseil de Leipzig ou que le choral pour orgue "Devant ton trône, je parais" BWV668 s'impose pour accompagner la mort de Bach.

Le besoin d'authenticité se traduit par le souhait de s'en tenir aux instruments d'époque comme aux documents d'époque et par le choix d'un acteur qui interprète lui-même les extraits musicaux. Tout est filmé en son direct avec micros invisibles. Les douze morceaux musicaux interprétés dans le champ, durant de 3 à 7 minutes, sont filmés dans un seul plan. Ainsi la grande cadence du concerto brandebourgeois n°5 (plan 1, 3'25" avec travelling arrière), le Magnificat en ré majeur BWV243 (plan 33, 3'6" avec travelling arrière), la cantate BWV205, "Eole apaisé" (plan 37, 5'39" avec travelling avant), l'ode funèbre BWV 198 (plan 39, 4'6", fixe), la musique funèbre BWV 244a (plan 41, 3'8", fixe), La passion selon saint Mathieu BWV 244 (plan 42, 7'24, fixe), la cantate BWV 42 (plan 48, 3'53"), la cantate BWV 215 (plan 57, 3'24", fixe), le choral Kyrie, "Dieu saint esprit" BWV 671 (plan 69, 5'20", travelling avant), l'andante du Concerto dans le goût italien (plan 80, 4'31", fixe), 25e variation Goldberg BWV 988 (plan 85, 4'3", panoramique des mains au visage), la cantate BWV 82 "J'en ai assez" (plan 89, 4'49", travelling avant). Ces douze plans sur les 114 du film représentent un ensemble musical de près de 53 minutes sur les 92 du métrage total.

Dans un premier temps, les cinéastes se contentent d'enregistrer les morceaux joués par les musiciens. Après l'extraordinaire souffle de la Passion selon Saint Mathieu, ils raccordent sur un plan de mer, pause méditative après tant d'intensité. Plan qui réapparaîtra une autre fois avant qu'un morceau de Bach soit entièrement monté sur un plan de nature.

D'après Le Nécrologe (1754) de Carl Philippe Emanuel Bach et Johann Friedrich Agricola, des textes (lettres et mémoires) de Johann Sebastian Bach (1685 - 1750) et divers documents d'époque.

critique du DVD
Editeur : Montparnasse, décembre 2008 (volume 3) puis janvier 2013 (Le bachfilm).
critique du DVD
Coffret Straub - Huillet vol. 3 avec DVD1 : Chronique d'Anna-Magdalena Bach DVD2 : Leçons d'histoire. DVD3 : Sicilia ! DVD 4 : Fortini / Cani  

 

Le Bachfilm, coffret 2DVD.